14/05/01
Pas
de printemps pour l'Alliance, mais un bel été
en perspective pour I2
Depuis
quelques mois, le feuilleton de l'Alliance entre IBM,
Ariba
et I2 Technologies
visant à fournir des plates-formes communes pour
les places de marché b-to-b commençait
à s'essoufler. Les multiples partenariats annoncés
de part et d'autres avec des éditeurs concurrents
(notamment I2 avec Broadvision
et IBM avec Vignette
au mois d'octobre 2000) n'avaient pas pour autant ébréché
leur étroite coopération, les dits accords
signés portant sur des projets différents.
D'ailleurs, à cette date, il ne restait pas moins
d'une dizaine de places de marché concernées
par l'implémentation en cours de l'offre commune.
Mais depuis le début de l'année, l'histoire
a pris une autre tournure. Les deux acteurs plus spécialisés,
Ariba et I2, ont ainsi cherché à marcher
sur leurs plates-bandes respectives. Le premier, positionné
historiquement sur le marché des solutions d'e-procurement
(gestion de la fonction achats des entreprises) a tenté -
en vain - de racheter Agile,
éditeur d'une suite pour la gestion de la chaîne
logistique. Or, ce domaine constitue la spécialité
originelle d'I2 Technologies. Quant à ce dernier,
l'acquisition de RightWorks, concurrent d'Ariba, lui
a permis de se doter des outils qui lui faisaient défaut
en matière d'e-procurement.
Ariba
: "Hors de question de laisser tomber l'Alliance"
Interrogés séparément
sur le thème de leur coopération commune,
les trois fournisseurs peinent à s'accorder et
laissent entendre des sons de cloche totalement différents.
Ainsi, pour le vice-président marketing Europe
du Sud d'Ariba, Gérard Dahan, "l'Alliance
a très bien fonctionné sur de nombreux
grands comptes. Et comme nous avons encore un certain
nombre de prospects en commun, il est hors de question
de [la] laisser tomber. Nous avons simplement entretenu
de petites indépendances de part et d'autres,
comme I2 avec RightWorks. Quant à notre fusion
avec Agile, elle n'a pas eu lieu."
En ce qui concerne l'accord avec IBM, celui-ci se trouve
renforcé. Big Blue s'apprête à fournir
dès le mois de juin sur la plate-forme d'Ariba
un ensemble applicatif baptisé LPS (Leveraged
Procurement Services) comprenant des outils de sourcing
ou sélection stratégique des fournisseurs,
et de gestion des achats indirects, deux domaines qui
font partie intégrante de l'offre d'I2. "Aujourd'hui,
notre objectif est d'atteindre 30 % de notre CA
global avec IBM, en particulier grâce à
des affaires sur le continent nord-américain",
indique Gérard Dahan. Suite à des résultats
moins bons que prévus lorsque le Nasdaq était
au plus haut en septembre-octobre 2000, Ariba s'est
aussi restructuré et a revu ses prévisions
à la baisse. "Nous pensions alors atteindre
1 milliard de dollars de chiffre d'affaires, mais
finalement nous tablons sur 500 millions de dollars
pour la fin de l'année." précise-t-il.
Larry Mueller, son nouveau CEO qui a passé 15 années
de sa carrière chez IBM, vient par ailleurs de
lever le voile - avec plusieurs mois d'avance
sur le calendrier - sur le modèle de rémunération
qu'adopte
Ariba en standard : un pourcentage sur les économies
réalisées par ses clients grâce
à ses solutions.
I2 :
"Nous avons décidé de nous séparer
d'Ariba"
"Nous
n'avons plus besoin d'Ariba", affirme de son côté
Olivier Faugère, directeur des alliances Europe
d'I2 Technologies. "Nous avons décidé
de nous [en] séparer pour deux raisons. D'une
part, nous avons racheté son concurrent RightWorks.
Et d'autre part, il s'avère que cette solution
est au moins égale voire supérieure à
celle d'Ariba. En effet, RightWorks est plus ouvert
et nous offrons le choix de n'importe quelle base de
données, tandis qu'Ariba est plus captif en obligeant
l'installation de sa base propriétaire. Ceci
dit, les deux plates-formes sont de très bonnes
solutions." Quant aux prospects en commun, "la
réalité est déjà consommée.
Nous nous sommes retrouvé en frontal avec Ariba
sur au moins deux projets rien qu'en France."
En parallèle, I2 Technologies signe d'autres
partenariats à tour de bras, notamment de façon
individuelle avec de grands cabinets de conseil et SSII
comme Accenture,
CSC
et Cap
Gemini Ernst & Young. Ainsi, la solution
I2/RightWorks aurait été mise en oeuvre
par les deux derniers chez un client en 8 semaines
seulement. De même, une nouvelle alliance vient
de voir le jour avec Sun,
iPlanet
et PriceWaterhouseCoopers
autour de la gestion de la relation client (CRM) dans
un contexte d'échanges b-to-b. "Nous apportons
des solutions qui permettent au client d'obtenir une
vue unique des commandes émanant de toutes ses
entités ou divisions, et de les consolider auprès
des fournisseurs", explique Olivier Faugère.
Dans la continuité des accords déjà
existants avec I2, Sun apporte ses plates-formes matérielles
et son système d'exploitation Unix Solaris, ainsi
que des espaces de démonstration dans ses iForceCenters.
iPlanet, déjà alliance entre Sun et Netscape,
fournit sa plate-forme b-to-b transactionnelle. Enfin,
le cabinet de conseil PWC va intervenir sur la mise
en oeuvre de la solution chez les clients ciblés
par les quatre forces de vente.
Au final, l'offre devrait être disponible officiellement
à la fin de l'année 2001.
IBM agnostique
: "Si l'Alliance prend fin ? Oui et non."
Face à cette nouvelle alliance qui
vient concurrencer son propre partenariat avec I2, IBM
reste calme et serein. "Nous comprenons très
bien qu'ils s'engagent dans une nouvelle alliance, et
nous ne les obligeons pas à entretenir une relation
unique avec nous" déclare Kevin Condron,
directeur marketing des solutions b-to-b pour la zone
Europe, Moyen-Orient et Afrique chez IBM à Londres.
"D'ailleurs, nous sommes 'platform agnostic', c'est
à dire indépendants des éditeurs."
Enfin, à la question de savoir si l'Alliance
avec I2 et Ariba va définitivement s'éteindre,
Kevin Condron répond "oui, et non. Il n'y
a peut-être plus d'Alliance à trois, mais
nous allons continuer de travailler avec les deux qui
sont des partenaires stratégiques d'IBM."
Ce en quoi il se trouve à la fois confirmé
par Ariba et I2 Technologies. Car si un doûte
subsistait à propos de ce dernier et de sa nouvelle
alliance, Olivier Faugère le fait tomber. "Nos
relations avec IBM sont très stratégiques",
affirme-t-il. "En dehors des autres cabinets de
conseil avec lesquels nous renforçons nos relations,
nous continuons aussi de travailler avec IBM Global
Services en lançant des offres différenciées."
Bref, le schéma est redevenu simple : I2
et Ariba sont à présent concurrents. Mais
chacun travaille toujours avec Big Blue, qui fait en
tout cas partie des rares acteurs quasi- incontournables
du marché, au même titre que Sun.
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