31/05/01
Alcatel
pourrait devenir une proie après l'échec sur Lucent
L'équipementier français
en télécommunications Alcatel pourrait bien se transformer
de prédateur en proie après son échec à boucler une
fusion avec l'Américain Lucent et son avertissement
sur bénéfices, estimaient mercredi des analystes.
Mardi soir, après avoir annoncé l'échec de ses discussions
avec Lucent Technologies, Alcatel a averti que le résultat
opérationnel dans son activité centrale de télécoms
devrait cette année être "au-dessous de celui de l'an
dernier" (2,25 mds EUR) malgré un chiffre d'affaires
qui devrait "progresser légèrement". En janvier, Alcatel
avait indiqué que le résultat opérationnel dans les
télécoms augmenterait deux fois plus vite que les ventes,
dont la hausse attendue était de 20 à 25% en 2001. Puis,
fin avril, le groupe avait annoncé que les ventes dans
les télécoms n'augmenteraient cette année que de 15%,
avec une progression supérieure du résultat opérationnel.
"C'est un avertissement sur bénéfices très sévère",
commente un analyste parisien. "On doit se demander
si Alcatel sera si exposé dans certains divisions qu'il
risque de devenir lui-même une cible pour une offre",
en particulier de géants nord-américains comme Cisco,
Nortel ou Motorola.
Des promesses de réduction
de coûts à tenir
"Alcatel n'a pas encore tenu ses promesses" en termes
de réduction des coûts et de gestion de la baisse des
investissements dans le secteur des équipements en télécommunications,
assure une autre analyste. "Rien n'est impossible en
ce moment", ajoute-t-elle. "Il est surprenant de voir
qu'ils (les responsables du groupe) ont été si précis
fin avril et qu'ils sont maintenant tellement en retrait".
Cisco, avec une capitalisation de 149 mds USD, pourrait
facilement se payer Alcatel, dont la capitalisation
s'élève à 37,3 mds EUR. Outre l'apport de clients, une
telle opération permettrait de combiner l'accès aux
opérateurs européens au savoir-faire de Cisco en matière
d'intégration de réseaux. Motorola pourrait aussi vouloir
mettre la main sur l'expertise d'Alcatel en téléphonie
mobile mais les tentatives précédentes des deux groupes
de créer des sociétés communes de recherche et développement
ont échoué. Alcatel et Motorola "ne semblent pas s'être
si bien entendus que cela par le passé", relève un analyste.
Alcatel pourrait se révéler une cible encore plus attrayante
si ses marges d'exploitation se détériorent dans les
mois à venir, ce qu'attendent de nombreux analystes.
Les responsables du groupe "ont indiqué que nous pourrions
toucher bientôt le fond dans le secteur mais nous n'y
sommes pas encore", pense l'un d'eux. Les estimations
situent une reprise des ventes d'équipements de télécommunications
bien après le début 2002. Les responsables d'Alcatel
"incriminent des domaines comme les câbles sous-marins
ou les récepteurs téléphoniques mais lorsqu'on introduit
les chiffres qu'ils ont fournis dans notre modèle, il
semble que certaines des activités de base comme l'optique
ou les réseaux doivent voir leurs résultats baisser
aussi", dit-il.
Drôle de moment pour
lancer un avertissement ?
Le moment choisi par Alcatel pour lancer son avertissement
intrigue également les analystes. Une annonce parallèle
d'un accord avec Lucent aurait donné plus de temps au
groupe français pour s'expliquer progressivement. Les
analystes se demandent si le groupe ne refuse pas d'accepter
l'impact du ralentissement américain sur les groupes
européens de technologie. La meilleure défense qui s'offre
à Alcatel consiste à accélérer ses projets de restructuration,
même si l'un des analystes interrogés pense que cela
ne ferait que réduire le risque d'un rachat par un groupe
plus important. Alcatel "doit alléger ses structures
de coûts, externaliser davantage d'activités et de toute
façon concentrer davantage ses efforts sur son coeur
d'activité", juge-t-il.
|