"Les dernières grandes ruptures technologiques en date sont Internet,
l'ordinateur portable et les capacités accrues des réseaux. Mais
force est de constater qu'elles jouent un rôle mineur dans la vie du dirigeant
qui se repose encore essentiellement sur son assistante, notamment pour gérer
sa messagerie électronique", note Gilles le Cottier, directeur exécutif
du secteur énergie chez EDS.
Les directions générales seraient-elles en retrait par rapport aux
bénéfices que les nouvelles technologies - et notamment les solutions
d'analyse décisionnelle (business intelligence) - peuvent apporter
?
Marc Vienne, spécialiste de cette dernière activité et directeur
associé chez Plaut consulting, semble le confirmer : "déjà, si on arrivait
à avoir des outils décisionnels dans l'entreprise, les apports des nouvelles
technologies - comme la mobilité - suivraient naturellement. C'est l'organisation
qu'il faut repenser en conséquence. Le clivage entre les décideurs d'un côté
et les producteurs/opérationnels de l'autre, doit disparaître".
Assouplir les organisations
L'organisation de l'entreprise, notamment sa structure pyramidale et hiérarchisée,
est donc au coeur de la tourmente. "Les systèmes d'information ont récupéré
leur retard sur l'humain, ils couvrent désormais tous les besoins d'un
individu, mais l'humain est aujourd'hui en retard en termes de management, l'organisation
pyramidale doit évoluer vers le réseau neuronal, vers l'information distribuée,
le data hub, la répartition des données", poursuit Marc Vienne.
Cela étant, les bénéfices en termes notamment de qualité
des données remontées sont nombreux. Le cas de la société
société d'affacturage Factocic
est révélateur. "Il y a quatre ans, des statistiques en provenance
du gros système d'information nous remontaient sous forme de données
périodiques et nous devions, pour plus de détails, effectuer des
extractions en fin de mois. Aujourd'hui, grâce à des outils décisionnels, nous
avons accès à des données sur chacun de nos clients et sur le volume
d'affaires global, par niveau de responsabilité, ce qui nous donne une vision
immédiate des grandes masses", déclare Bernard Sancier, directeur
général de Factocic qui a, pour ce projet de site, fait appel à
Micropole-Univers.
Des apports en interne mais aussi vers l'externe
Cet exemple est particulièrement révélateur des transformations
opérées au sein des directions générales depuis trois
ou quatre ans, grâce à l'apparition des nouvelles technologies. Il
montre que les plus hauts décideurs d'entreprise se familiarisent de plus
en plus avec elles, qu'ils se sentent plus impliqués par leur déploiement,
même s'ils ont parfois tendance à les tenir à distance pour
leur usage personnel au quotidien.
Dans le cas de Factocic, la plus grande finesse des informations obtenues ne se
fait pas sentir qu'en interne : les clients et partenaires bancaires accèdent
eux aussi, à tout moment, à des données personnalisées
relatives, par exemple, à la position de leur compte.
De plus, un système d'information portant sur les clients communs de FactoCIC
et des réseaux CIC a été créé - toujours avec l'aide
de Micropole - pour fournir des données statistiques mensuelles. "Dans notre
métier, le contact est le nerf de la guerre. Grâce au suivi global
et à la répartition par grande banque apporteuse d'affaires, je fais preuve
d'une plus grande réactivité lors de mes visites auprès des banques",
confirme le directeur général de la société, Bernard
Sancier.
De plus en plus de réactivité et de précision requises
Une exigeance de réactivité et de précision que bien d'autres
directions d'entreprises poursuivent. C'est le cas de Camaïeu qui, en 2002,
réalise un audit de sa plate-forme de business intelligence déployée
en 1996. Les utilisateurs étaient globalement satisfaits mais "ils
rencontraient certaines difficultés lorsqu'il s'agissait de réaliser des requêtes
complexes nécessitant la prise en compte de plusieurs niveaux au sein de la base
de données (types d'articles, collections, produits, etc.)", affirme Xavier Debal,
responsable du pôle informatique / commerce de la société (lire l'article
du 16/02/04). Un cube OLAP (OnLine Analytical Processing) - intégré
à Oracle 9i et consultable par des interfaces Business Objects - qui permet
de croiser plusieurs facteurs est alors déployé.
Même cas de figure au sein de la filiale du Parisien (SDVP) chargée de la
distribution et de la vente du quotidien qui, fin 2001, décide de transformer
son intranet en portail décisionnel. Les informations initialement disponibles
concernaient les ventes réalisées par le réseau de distribution, répondant aux
besoins métiers les plus élémentaires. Via un système d'onglets, des informations
à plusieurs niveaux - du simple utilisateur au directeur de région - ont par la
suite été fournies. "Il nous a même fallu freiner les demandes des
utilisateurs", précise Michael Dehoorne, responsable du projet chez SDVP, qui
s'est fait accompagner dans ce projet par Clever Age (lire l'article
du 11/02/03).
Définir le périmètre
"Freiner les demandes des utilisateurs", certes, mais aussi circonscrire
les innombrables potentialités offertes par les solutions. "Leur potentiel
est infini, les directions d'entreprise n'arrivent pas à digérer
ce qu'il est possible de faire avec les outils décisionnels, seuls 20 ou
30% des fonctionnalités sont utilisées", estime Gilles le Cottier,
d'EDS.
Et Philippe Chevassut, directeur associé en charge de la division "Information
strategy for business" chez Orga
Consultants, d'ajouter : "le directeur général se réfère
- à son niveau - à très peu d'indicateurs, pas plus d'une douzaine.
Ensuite, il demande des explications. Le DG d'aujourd'hui a deux tropismes très
forts : il veut d'une part savoir si son entreprise vend et si elle est en croissance,
d'autre part si elle vend de façon rentable. Il veut par ailleurs connaître
l'état de son cash flow et prévoir le plut tôt possible son résultat".
La façon dont se positionnent aujourd'hui les directions générales
par rapport aux nouvelles technologies oscille donc, comme on peut le constater
à travers ces témoignages, entre une certaine distance à
les utiliser en leur sein et une exigence forte de les voir déployées
dans les directions opérationnelles, pour une meilleure qualité
des remontées. Les plus hautes instances des entreprises ont en outre pour
mission de transformer l'organisation afin de s'adapter aux changements induits
par ces technologies, notamment en termes de processus. |