Alain Kergoat, directeur marketing division PC chez Toshiba
: "La rumeur se confirme. C'est un acteur qui n'a pas d'implantation
ou guère à l'international. Le rachat apparaît donc comme un
moyen rapide et efficace de parvenir à ses fins, l'avenir nous
dira si ce moyen est efficace. Il s'agit tout de même de deux
cultures d'entreprise extrêmement différentes. Je serais par
ailleurs assez surpris que les personnes concernées soient ravies
de cet accord et que tout fonctionne parfaitement."
"A
terme ne survivront que les acteurs présents sur
les trois continents majeurs : Amérique, Asie,
Europe" |
"Aujourd'hui le marché chinois est encore relativement petit,
il égale à peine le marché français même s'il enregistre des
croissances bien supérieures. Toutefois, à terme, ne survivront
que les acteurs globaux ayant réussi à s'implanter sur toutes
les plates-formes géographiques. Il faut non seulement une
taille critique, ce qu'avait réussi à obtenir IBM, mais également
la volonté à long terme de maintenir cette activité. Et c'est
ce qui explique ce rachat, IBM voyait son avenir ailleurs."
"Le
marché des PC a toujours été très bataillé, encore plus sur
le marché des portables car il enregistre de plus fortes croissances
que celui des ordinateurs de bureau. IBM, positionné sur le
marché professionnel, n'a pas pu bénéficier de la bouffée
d'oxygène offerte par la croissance du marché grand public.
Je ne pense pas que le marché se concentre à nouveau.
Peut-être que la liste des acteurs ne sera pas la même d'ici
cinq ans mais parler d'une réduction du nombre d'acteurs,
c'est faire une prédiction très aléatoire."
Jean Philippe Bouchard, consultant senior chez IDC France
: "C'est une bonne solution pour Lenovo. Il achète directement
de la notoriété et c'est cela qu'il vise. L'entreprise dispose
déjà des centres de production, le rachat d'IBM va donc permettre
d'accroître les économies d'échelles. C'est un argument important
dans un marché de volume tel que celui des PC où l'offre est
déjà très mature. IBM dispose d'une base installée déjà importante
et donne accès à Lenovo aux marchés américains et européens.
Le rachat d'une marque était la seule solution possible pour
s'y introduire."
"Il
aura fallu un an et demi à la fusion HP / Compaq
pour réussir l'intégration" |
"En France par exemple, le marché professionnel croît plus
vite que le marché grand public en raison du renouvellement
d'un parc arrivé à un état de désuétude. Cependant, rien n'est
gagné d'avance. Si on observe un cas comparable, celui de
la fusion HP / Compaq où chez les deux entreprises, il y avait
un réel écart de philosophie, il aura fallu un an et demi
pour parvenir à s'intégrer. Mais ce sont les chinois qui produisent
les PC, ils disposent déjà d'une expertise métier. Toutefois,
les managers ont tout intérêt à conserver les équipes déjà
en place."
"C'est un marché qui va continuer à se concentrer. Seuls
les constructeurs capables de faire du volume et de proposer
une offre diversifiée pourront continuer leurs activités.
Face à des marges étroites, un constructeur à tout intérêt
à proposer du matériel plus rentable comme des imprimantes
par exemple. Pour IBM, c'est aussi un moyen de mettre un pied
sur le marché chinois. Les deux acteurs y gagnent. Qui y gagne
le plus ? c'est difficile à dire."
Le directeur marketing d'un constructeur : "C'est un événement
en lui-même, une étape qui s'inscrit dans un dynamique globale
du marché. L'histoire prouve que dans le hardware, les marges
sont très faibles compte tenu de la standardisation des composants
et de la baisse du coût de la main d'uvre. Du point de vue des
hommes, cela pose un réel problème social. Ce sont deux cultures
très différentes et deux entreprises très différentes ce qui
pose un risque aussi bien pour l'acheteur que pour le cédant.
10 000 personnes vont devoir passer d'un mode de gouvernance
à un autre. C'est aussi une marque célèbre qui va être diluée."
"Quelle
autre alternative avait IBM ?" |
"Mais je me mets à la place d'IBM : quelle autre alternative
avait-il ? Le marché est piloté par des standards, ce qui
fait qu'aujourd'hui pour se différencier du concurrent il
ne reste que le coût et le service. Concernant le coût, le
seul facteur sur lequel il est encore possible de jouer, c'est
le coût de la main d'uvre et aujourd'hui la Chine est capable
d'employer de la main d'uvre qualifiée à des coûts imbattables.
Nous sommes dans une logique de marché implacable."
"Pour Lenovo, l'acteur accède d'un coup à une marque très
connue ainsi qu'à un savoir faire et à une technologie réputée.
Or aujourd'hui, la puissance de la marque est flagrante dans
nos marchés. Pour IBM, c'est aussi un moyen de s'introduire
sur le marché des services en Chine. Et cette clause, c'était
loin d'être seulement la cerise sur le gateau. Elle donne
une assise forte sur un marché potentiellement stratégique,
même s'il n'est pas aujourd'hui très développé. Je suis d'ailleurs
étonné que cette partie ait été signée par Lenovo. Au mieux,
cet accord a donné naissance à une société capable de concurrencer
les géants tels HP et Dell, au pire, IBM a réussi à se débarrasser
d'une activité à peine rentable avec les honneurs."
Michael Dell, PDG de Dell lors d'une conférence de presse
: "Nous ne sommes pas de grands partisans de l'idée d'acquérir
d'autres sociétés ou de fusionner des sociétés entre elles.
A quand remonte la dernière fois où une acquisition ou une
fusion s'est révélée être un succès dans l'industrie informatique
? Ce n'est pas arrivé depuis très longtemps
Je ne vois pas
pourquoi celle-ci serait différente. Nous préférons conquérir
nos clients l'un après l'autre. Nous estimons la croissance
organique comme la solution la plus pérenne."
"Il
est clair que le marché de la micro-informatique
n'est pas une priorité pour IBM". |
"Si vous observez ces dernières années, il y a eu non seulement
un déclin en terme de part de marché, mais aussi un désengagement
sur plusieurs aspects de la micro-informatique chez IBM. Il
est clair que ce n'est pas une priorité stratégique à long
terme pour IBM. Dans notre cas, c'est assez différent. La
semaine dernière par exemple, nous avons annoncé une nouvelle
usine de fabrication en Caroline du Nord pour soutenir notre
croissance aux Etats-Unis."
Ovum, cabinet de conseil, dans un communiqué de presse
: "IBM souhaite changer sa chaîne de valeur et envisage
son futur dans le conseil de haut niveau, les services IT
ainsi que les logiciels et le matériel à forte valeur ajoutée,
une activité qui représente le cur de ses clients entreprise.
Le prix payé, environ 15% du chiffre d'affaires de l'activité,
peut paraître un peu léger. Mais ramené au fait que sa division
PC contribue pour 13% de son chiffre d'affaires total mais
pour moins de 1% à ses résultats, IBM va considérablement
augmenter sa marge brute. De toute manière, la plupart des
clients de son activité services achètent des PC assemblés
par différents constructeurs."
"Par le biais de cet accord, IBM dépose son nom sur les ordinateurs
de bureau du marché IT à la croissance la plus forte et potentiellement
le plus grand de tous : la Chine. C'est une relation gagnant-gagnant.
Nous ne croyons pas à un positionnement à tout niveau. Dans
le marché actuel, il est possible d'être soit un Accenture,
soit un Dell, mais il devient de plus en plus difficile d'être
les deux."
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