Laurent Dherbecourt (Orga Consultants) : "Les nouveaux enjeux des DSI concernent la gestion des compétences"

Quelles sont actuellement les préoccupations principales des DSI ?
Parmi les préoccupations actuelles des DSI, il y a l'axe "alignement de la DSI aux enjeux métiers". La question de l'alignement stratégique est donc encore et toujours aussi présente.

Mais à présent, certaines directions générales ont le sentiment que leur DSI dépense en termes de ressources et de moyens engagés une énergie trop importante par rapport à la valeur produite au final et perçue par les métiers. La généralisation progressive de certains référentiels comme COBIT ou ITIL et les opportunités de comparaison qu'ils offrent confirment souvent ce sentiment…

C'est bien connu, ma capacité à faire évoluer de façon agile les SI de mon entreprise passe par leur niveau de documentation. Moins celle-ci est riche, plus je suis tributaire de ceux qui s'en occupent et moins je dispose de flexibilité pour les faire évoluer rapidement. A ce titre, le lien est assez flagrant entre le niveau de documentation d'un parc applicatif et les difficultés rencontrées lors d'une opération d'externalisation de ce même parc.

Que préconisez-vous sur ce dernier point qui concerne la gestion des compétences ?
On va assister à un départ de compétences de type technique dans les années à venir. Et ce qui va manquer aux entreprises et aux DSI, ce sont des personnes capables de comprendre les besoins métiers pour ensuite spécifier vite et bien. L'enjeu est donc de faire monter en compétences les personnes "techniques", pour les emmener vers des compétences plus "métier".

Cette problématique a toujours existé, elle n'est pas récente. Ce qui est récent, c'est que cette situation va être de moins en moins tenable. Compte tenu de l'enjeu et du temps nécessaire pour "métiériser" des compétences techniques, un DSI qui ferait son schéma directeur sur 4 ans sans cette dimension ferait une erreur.

Il faut donc travailler sur les parcours RH, sur les perspectives de carrière, avec des allers-retours entre la DSI et les métiers. Aujourd'hui, il existe des personnes "métier" qui ont basculé vers la DSI, mais très peu ont fait l'inverse. Et quand il en existe, c'est trop souvent une bascule sans retour.

Quid de l'offshore ?

Il y a aujourd'hui en France un vrai intérêt pour l'offshore et il faut à présent admettre qu'il y a plus de réussites que d'échecs. Mais pour de nombreuses DSI la question se pose encore de savoir, si elles doivent y aller tout de suite. L'offshore en Inde, la barrière de la langue... sans parler des questions sociales liées à ce type d'externalisation.

Ce que l'on voit aujourd'hui est qu'il existe deux populations de DSI : ceux qui sont prêts, et ceux pour qui il est d'abord nécessaire d'apprendre à fonctionner en front / back office, via un centre de service partagé interne par exemple.

C'est souvent le cas dans le secteur public où un vrai travail est à mener pour expliquer que recourir à ce type de fonctionnement peut faire évoluer le mode de recours à la sous-traitance sans pour autant nuire systématiquement aux compétences internes dont la valeur future sera leur connaissance du métier et de ses contraintes.

Laurent Dherbecourt est responsable de l'entité stratégie et gouvernance des SI du cabinet de conseil Orga Consultants.