Vers une nouvelle dualité entre le monde de l'édition logicielle et celui des services

La position du Syntec informatique s’articule autour de trois grands thèmes : mixité des modèles, interopérabilité et pérennité économique du modèle Open Source.

Il ne s'agit donc pas de choisir entre l'Open Source ou le "logiciel propriétaire", mais de construire des systèmes d'information mixant logiciels Open Source et logiciels propriétaires; l'Open Source et le "Logiciel Propriétaire" étant chacun présent sur la valeur ajoutée technique ou métier qu'il apporte.

Le respect des standards ouverts autorise ainsi de mixer les avantages des deux mondes et de se diriger vers un modèle dit "mixte", associant l'Open Source et le logiciel propriétaire.

Cette nouvelle dynamique des systèmes d'information va générer une nouvelle dualité entre le monde de l'édition logicielle et celui des services, par la nécessité de mise en place d'une politique de choix et d'usage de l'Open Source en Entreprise, de manière à maîtriser les processus d'achat, juridique, de support et d'intégration adaptés à des architectures mixtes.

Comme toute nouvelle vague technologique, les logiciels Open Source seront soumis à deux impératifs, l'intégration dans les systèmes d'information existants et la pérennité des modèles économiques associés.



L'interopérabilité: un véritable enjeu ?

En effet, "Open Source" ou "Propriétaires", les produits logiciels ne sont que des éléments des systèmes d'information. Tout système d'information requiert aujourd'hui la mise en oeuvre et la coopération de logiciels de différentes natures et portées : systèmes d'exploitation, middleware, logiciels applicatifs. Le véritable enjeu n'est pas la nature Open Source ou propriétaire de tel logiciel, mais celui de l'interopérabilité, c'est-à-dire la capacité à composer le système d'information souhaité à partir de logiciels coopérant efficacement pour apporter le maximum de bénéfices aux utilisateurs.

La véritable interopérabilité permettant de composer un système d'information de manière économique et sécurisée, selon une architecture rationnelle, suppose la conformité des logiciels aux "standards ouverts". Selon la définition légale en France (loi n° 2004-575 du 21 juin 2004), on entend par standard ouvert tout protocole de communication, d'interconnexion ou d'échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d'accès ni de mise en oeuvre.

Les éditeurs de logiciels commerciaux, tout comme les communautés de développeurs du logiciel Open Source, font de plus en plus souvent le choix de se conformer à ces standards ouverts, de manière à couvrir le plus large marché possible.

Les standards ouverts sont donc indépendants du modèle de développement logiciel et permettent l'interopérabilité entre différents produits et services en provenance de différents fournisseurs. Même si le modèle du logiciel Open Source implémente généralement des standards ouverts, ceci n'est pas systématique.

Si une politique doit être suivie, c'est donc celle en faveur de l'adoption par le plus grand nombre d'acteurs possibles de ces "standards ouverts" et de l'objectif plus général d'interopérabilité, politique à laquelle la quasi-totalité des acteurs du logiciel, Open Source ou propriétaire, doivent pouvoir adhérer, car elle est conforme à leur intérêt et à celui de leurs clients.

Une dualité entre le monde de l'édition logicielle et celui des services ?

Les intégrateurs deviennent de plus en plus prescripteurs de solutions et peuvent donc choisir les solutions les plus appropriées (propriétaires ou Open Source) pour répondre aux besoins de leurs clients. D'ailleurs les intégrateurs sont les plus à même à mixer les différents modèles pour dégager le plus de valeur ajoutée possible pour leurs clients.



Sortir des débats idéologiques

Un certain nombre d'acteurs aux positions radicales sont défaitistes. La France et l'Europe ont bien sûr une place dans le monde du logiciel propriétaire. Il est intéressant de noter que les Etats-Unis ont réussi à développer une industrie logicielle toujours aussi florissante et puissante malgré l'essor de l'Open Source et de l'Offshore.

Le problème vient plus de la perception de la valeur du logiciel que des différents modèles, ainsi que les capacités de financement d'entreprises (start-up). En effet comment expliquer que les taux journaliers et/ou les prix de logiciel soient plus élevés aux Etats-Unis alors que c'est le pays qui fait le plus appel à l'offshore et à l'Open Source ? La raison est à chercher dans la capacité d'investissements des donneurs d'ordre publics ou privés qui sont en général beaucoup moins frileux à engager des investissements informatiques dans les économies Anglo-Saxonne qu'en France ou en Europe.

L'industrie Française du logiciel est une réalité : elle emploie 70 000 personnes et réalise un chiffre d'affaire de 7 milliards d'euros. Cette industrie est très bien positionnée sur l'applicatif et contrôle d'ailleurs 50% de son chiffre d'affaire domestique. Il faut également noter que qu'un certain nombre d'éditeurs français sont très bien placés au niveau international (Dassault System, Business Objects) ou au niveau français (GFI, GL-Trade, etc.) - (Source Truffle 100).

D'ailleurs l'Open Source est peut être une opportunité pour les éditeurs propriétaires qui pourront par exemple concentrer leurs efforts de R&D sur les fonctions métiers à haute valeur ajoutée et utiliser les ressources partagées des communautés Open Source pour les couches basses.
Il faut donc sortir des débats idéologiques sur la gratuite ou la souveraineté nationale et laisser à l'économie de marché de définir les règles de création de valeur pour les clients privés ou public.



Les freins à l'adoption de l'Open source

Tout d'abord le modèle Open Source a amené la création de nouveaux types de contrat de licence qui garantissent les fameuses « libertés » accordées aux utilisateurs par les créateurs du logiciel : Liberté d'utilisation, Liberté d'accès au code source, Liberté de modifier le logiciel - pour son propre usage ou pour des tiers -, Liberté (et dans certaines circonstances, obligation) de diffuser des versions modifiées du logiciel. Aujourd'hui, environ soixante licences sont certifiées "Open Source" par l'organisme "Open Source Initiative". Ces licences peuvent être un frein à la diffusion du logiciel et donc à sa pénétration sur les marchés. (Certaines licences obligent à diffuser les modifications des versions modifiées du logiciel).

Le modèle de partage de code est essentiellement basé sur l'expérience technologique des développeurs et des utilisateurs techniques et non pas sur les besoins métiers des utilisateurs. Tous les grands éditeurs propriétaires investissent énormément en marketing et en R&D pour intégrer les besoins de leurs utilisateurs.

C'est d'ailleurs souvent à partir de ces besoins que naissent les innovations de rupture. L'Open Source aujourd'hui permet une innovation sur les couches basses banalisées, en réduisant essentiellement les coûts d'acquisition. En revanche, l'innovation technologique, et en particulier métier, reste chez les éditeurs propriétaires (comme c'est le cas pour dans l'industrie du médicament avec les génériques).

Finalement, comme toute nouvelle vague technologique, les logiciels Open Source seront soumis à deux impératifs, l'intégration dans les systèmes d'information existants et la pérennité des modèles économiques associés. De plus, la pérennité des modèles économiques des Editeurs Open Source va devenir de plus crucial au fur et à mesure que l'Open Source progresse vers les couches métiers. En effet, les utilisateurs attachent une importance (et donc une valeur) à la pérennité des solutions et des éditeurs qui supportent ces solutions pour leurs applications critiques.