Le Cloud peut-il répondre aux nouvelles problématiques de la vidéosurveillance ?

Les deux applications cloud les plus utiles pour la vidéosurveillance sont le IaaS pour le stockage vidéo et le SaaS pour la gestion et l’analyse métier. Conjuguées, elles se nomment alors VSaaS, pour vidéosurveillance en tant que service.

En France, le cloud a fait une percée importante depuis quelques années. Aujourd’hui, 46%  des entreprises ou des établissements publics déclarent recourir à des services de cloud et en priorité des applications en mode SaaS (54%). Deux raisons principales motivent chez les entreprises françaises l’adoption du cloud : la recherche d’une flexibilité accrue (60%) et d’une réduction des coûts (66%). Le cloud est de plus en plus perçu comme un levier fort de transformation.

La démocratisation du cloud s’accompagne d’ailleurs d’un changement important dans la vision de cette technologie qui, au-delà d’un simple levier de réduction des coûts, s’avère aussi être un levier stratégique inscrit à l’agenda des directions générales qui attendent également du cloud une capacité à accompagner la transformation de leur modèle économique (24%) et à renforcer leur interaction avec leurs clients (21%). Ainsi, un changement en profondeur s’opère en termes de processus d’analyse des données porté par l’émergence du cloud analytics. Les entreprises veulent désormais disposer d’un pilotage par les données et ne veulent plus être limitées par la technique. De fait, les solutions ‘Cloud Analytics’  permettent de mener des analyses sur l’évolution des activités et la performance des organisations.

C’est ainsi que les plateformes de cloud analytics connaissent un engouement fort. Un article récemment publié sur Computer Weekly[1], estime que le marché de la Business Intelligence, évalué à 85,9 milliards de dollars, devrait croître fortement à un horizon de 3 ans pour peser jusqu’à 4 milliards de dollars d’ici 2017. En France, le recours à des systèmes décisionnels sur le Cloud va suivre la même courbe, passant de 19% en 2015 à 73% en 2018[2] .

Mais la rapide croissance des écosystèmes concernés va nécessiter de nouvelles façons de stocker et d'analyser les datas afin d'en accélérer la restitution en consommant toujours plus de bande passante. Ce constat est encore plus vrai lorsque les données en question proviennent de flux de videosurveillance.

La vidéo sur IP a transformé la caméra de surveillance : d’outil d’investigation légale ayant vocation à résoudre des problèmes, celle-ci s’est muée en un outil proactif visant à améliorer les processus métier. L’intégration[3] d’applications de business intelligence dans la vidéosurveillance est le premier facteur expliquant, en France, l’adoption de la vidéo sur IP par les enseignes de grande distribution, 27% d’entre elles citant cette caractéristique pour justifier leur choix. Près de la moitié des participants interrogés précisent également que le comptage de personnes (49,2%) et la gestion des files d’attente (49,9%) sont les deux applications IP en réseau qui, à leurs yeux, présentent le plus d’intérêt en dehors du domaine de la sécurité. Sachant qu’en parallèle, la vidéo sur IP contribue à optimiser l’éclairage tactique et opérationnel, notamment par la surveillance et l’amélioration du service à la clientèle, ainsi que par le suivi des taux de conversion et des dynamiques de résultats ; elle permet aussi de cerner les possibilités de consolidation stratégique sur divers plans (marketing, opérations, conformité et ventes).

Il n’est guère étonnant, par conséquent, que des prestataires cloud soient sollicités afin de déterminer s’il existe un moyen de mettre à profit la toute puissance de la vidéosurveillance, de l’analyse et du décisionnel dans le cloud. Les deux applications cloud les plus utiles pour la vidéosurveillance sont le IaaS pour le stockage vidéo et le SaaS pour la gestion et l’analyse métier. Conjuguées, elles se nomment alors la VSaaS (vidéosurveillance en tant que service). Mais, en pratique, cette solution fonctionne-t-elle ?

La VSaaS présente un énorme avantage, qui a trait à l’une des forces distinctives du cloud : sa capacité à prendre en charge de précieuses applications d’entreprise, notamment des outils décisionnels. L’analytique peut s’appliquer à des vidéos stockées en local, dont certains extraits sont transmis dans le cloud pour analyse. Le traitement analytique (plaques d’immatriculation ou reconnaissance faciale, par exemple) exige d’énormes quantités de ressources informatiques que le cloud peut aisément mettre à disposition sous forme de service ; il aide alors les entreprises à réduire leur infrastructure interne et leurs besoins en matière de gestion.

Le cloud peut également favoriser un accès mobile efficace et souple à des données vidéo stockées en local. Si certaines applications mobiles ménagent d’ores et déjà un accès via le réseau local, elles limitent, en règle générale, le flux vidéo à un seul équipement. La technologie cloud, en revanche, permet d’ouvrir un accès mobile à des vidéos en direct et enregistrées sur une multiplicité d’équipements simultanément ; concrètement, les professionnels de la sécurité gardent ainsi un œil sur les biens matériels tandis que leurs collègues des pôles marketing, opérations et autres travaillent sur les mêmes vidéos à des fins de reporting et d’analyse.

Mais le marché de la vidéosurveillance en tant que service fait face à des difficultés, compte tenu du coût élevé des infrastructures en lien avec les installations. De même, les protocoles de bande passante et autres régissant le fonctionnement des entreprises privées, conjugués aux problématiques de sécurité réseau font obstacle à la croissance du marché. La plupart des entreprises aujourd’hui ne disposent tout simplement pas de la capacité de bande passante requise pour transférer dans le cloud des vidéos tournées par une multiplicité de caméras IP. Même si elles recourent à la mise en mémoire tampon pour limiter le streaming vidéo le temps que davantage de bande passante soit disponible (après les heures de bureau, par exemple), rares sont celles qui ont accès à une bande passante uniforme sur l’ensemble de leurs sites, surtout si elles en exploitent plusieurs centaines ou milliers. Et même si les débits et l’accessibilité sont encore et toujours appelés à s’améliorer, facilitant ainsi les transferts vidéo dans le cloud, l’évolution vers des caméras IP 4k et 7k risque de neutraliser cet atout.

Le message est simple : le décisionnel et l’analytique en mode cloud fonctionnent bien, mais jusqu’à ce que les problèmes de bande passante puissent être surmontés, il est préférable de ne pas les associer à des solutions de vidéosurveillance et ce, pour la plupart des entreprises de moyenne et grande envergure implantées sur plusieurs sites aux exigences vidéo importantes.

Comme pour la plupart des technologies réseau, le point de faisabilité sera atteint progressivement, à mesure que de nouvelles solutions apparaissent et tirent parti de précédentes capacités techniques. À terme, grâce aux progrès en compression vidéo et aux services de bande passante, à la fois plus rapides et plus abordables, les solutions en mode cloud alliant décisionnel, analytique et vidéosurveillance constitueront un choix plus rentable.

[1] Source
[2] enquête Talend, 2015[3] Etude CRR