Centrex IP : l'offre est prête et attend la demande

Externaliser la gestion de son PABX [ndlr : autocommutateur chargé des liaisons téléphoniques de l'entreprise] et mutualiser ses communications sur un réseau partagé : c'est ce que propose aux entreprises les spécialistes de l'offre Centrex IP. Mise en avant au début des années 2000 avec la généralisation des connexions Internet haut débit et la démocratisation des modèles hébergés, elle n'a pas tenu toutes ses promesses.

"Le centrex IP est un marché en pleine effervescence au niveau de l'offre, et nous constatons aussi un intérêt marqué au niveau de la demande, que ce soit auprès des TPE PME ou des grands comptes pour équiper leurs petits sites. Toutefois, nous observons que le marché n'a pas décolé. Cet état de fait est lié essentiellement à la maturité des offres, mais aussi à des freins psychologiques quand au recours à l'externalisation et à la mutualisation", résume David Oberlé, consultant au sein du Groupe Solucom.

"Nous sommes sur un marché difficile. Pourquoi ? Selon moi, parce que nous nous retrouvons dans une situation où il faut évangéliser le marché, c'est-à-dire convaincre les DSI de faire confiance à une start-up, sur des technologies encore peu répandues que des leaders ne proposent pas encore à leur offre", estime Alexandre Garnier, co-fondateur d'Ipex.

"En octobre / novembre, les choses vont changer je pense. Mais même là, cela prendra du temps de former les techniciens, de connaître l'offre commerciale et de savoir la valoriser...", ajoute Alexandre Garnier. Les spécialistes de l'offre Centrex IP reconnaissent tous aujourd'hui que l'offre Centrex IP se destine pour le moment à un public bien ciblé, pour des tailles de parc réduit.

"Le profil moyen d'un client correspond à un site d'une vingtaine de poste, c'est le résultat d'une limitation technique mais aussi économique dépendante des liens IP. On peut aller jusqu'à 90 postes, voire au delà, mais le cœur de métier porte sur les sites de moins de 50 postes. La limite technique tient à la sollicitation du lien IP par le service et d'une manière générale à la stabilité que l'on est capable d'offrir au client", affirme Christophe Berkani, directeur associé de Scipio.

"Il est par exemple fondamental à partir d'un certain niveau de qualité de service d'avoir des liens exclusivement dédiés à la voix sur IP avec des mécanismes de QoS. Dès qu'on souhaite monter en connexions simultanées et en nombre de poste, il faut tout de suite prévoir une ligne SDSL et économiquement on arrive vite au même niveau que le coût d'une ligne Numéris", complète Christophe Berkani.

Ainsi, avec un lien ADSL 1 Mo, le site du client peut atteindre jusqu'à 8 communications simultanées. En lien SDSL 4 Mo, ce nombre est porté à 100 connexions simultanées. La fibre optique, si elle est encore coûteuse pourrait en revanche étendre à l'avenir cette limitation technique des offres Centrex IP. En revanche, cette limitation passée, l'offre Centrex propose pour 30 euros par mois et par poste une offre de téléphonie IP standard, à condition toutefois de posséder un câblage réseau de catégorie 5 en 100 Mo.

"L'image est souvent fausse vis-à-vis des Centrex IP, que les clients assimilent parfois à la voix sur IP sur Internet. Nous sommes capables d'offrir un taux de disponibilité de 99,85% avec une garantie de temps de rétablissement de 4h sur la partie PABX Centrex, et des liens ADSL redondés pour une meilleure sécurité. La qualité de la voix n'a rien à voir avec les box des FAI proposées aux particuliers", insiste Eric Malauzet, co-fondateur de l'offre Centrex Telecom.

Si la qualité n'a pas toujours été au rendez-vous dans les débuts, l'offre de Centrex IP est désormais compétitive face aux solutions de PABX gérées en interne. La sécurité est également un problème réglé avec des communications qui, bien qu'utilisant les protocoles Internet, transitent sous forme cryptée via des réseaux privés. Reste pour le client à gérer une offre foisonnante.

"En France, plus de 50 acteurs de toute taille et de positionnement différent se positionnent sur ce marché. Il y a des fournisseurs de plate-forme comme NetCentre, Cirpack, ItalTel, mais aussi des fournisseurs de solutions pour ces plates-formes comme B3G, Sentil, DirectCentrex, des opérateurs télécoms traditionnels avec France Telecom ou Verizon et des opérateurs mobiles type Bouygues ou SFR. Pour finir le tableau, des intégrateurs se présentent également sur le marché, par exemple NextiraOne ou Spie Communications, ainsi que de nouveaux entrants comme Colibri", évalue David Oberlé (Groupe Solucom).

Un choix qui insuffle un nouvel air frais sur le marché de la téléphonie d'entreprise après le monopole de France Télécom mais qui ne rassure pas toujours quant à la pérennité de ces offres Centrex IP. Pour se différencier, les nouveaux entrants jouent donc sur la carte de la personnalisation à l'instar de la solution Open Source Asterisk, de la proximité ou des nouveaux services.

"Avec notre offre Centrex, nous proposons la notion de convergence fixe / mobile par le biais du GSM pour l'instant et demain peut être par le biais du WiFi lorsque la couverture sera suffisante. Les tarifs sont attractifs et du coup l'entreprise peut en voix sur IP connecter ses postes mobiles pour faire du renvoi d'appel entre fixe et mobile mais aussi pour obtenir des fonctions comme le répondeur mail sur portable", indique David El Fassy, directeur général adjoint chez Altitude Telecom.

Même chose pour Neuf Cegetel qui, avec sa NeufBox Pro, propose aux entreprises un boîtier qui fait office de mini-autocommutateur orienté pour les PME / TPE.

"Les PME réfléchissent à l'offre Centrex IP car elle pourrait leur apporter une simplicité, une souplesse grâce à l'administration par interface Web, et une baisse de l'investissement pour migrer vers la voix sur IP. Pour les grands comptes, ils s'y intéressent pour des réseaux de petits sites, dans une logique de rationalisation d'exploitation avec des coûts relativement prévisibles", analyse David Oberlé du Groupe Solucom.

Reste à lever les derniers points de blocage comme l'ergonomie des interfaces Web proposés aux clients, l'internationalisation de l'offre Centrex IP pour pouvoir couvrir entre entreprise présente par exemple dans plusieurs pays d'Europe, et un plus grand panel de services de téléphonie proposé. L'aspect coût, en revanche, demande à être évalué très précisément pour pouvoir estimer un éventuel retour sur investissement.

"On peut s'attendre à un certain nombre de facteurs de réduction des coûts : les équipements mutualisés, l'administration mutualisée, la tarification des communication, les frais d'accès au service réduits... Il y a aussi la partie communication gratuite inter sites à prendre en compte et la suppression de l'abonnement au réseau d'accès. Mais attention car l'entreprise remplace l'investissement de départ par un coût d'abonnement mensuel sans oublier les frais de mise à niveau de l'infrastructure», conclut le consultant de Groupe Solucom.