Energie : seule l’innovation permettra une vraie concurrence

Dix ans après l'ouverture du marché de l'électricité, seuls 15% des foyers ont quitté le fournisseur historique.

Nous avons célébré en 2017 les 10 ans de l’ouverture du marché de l’électricité. En d’autres termes, depuis 2007, tous les français ont la liberté et le pouvoir de quitter le fournisseur historique pour tester d’autres acteurs, le tout gratuitement et simplement. Comment justifier, alors, que seuls 15% des foyers en aient fait l’expérience aujourd’hui, et que ces autres acteurs soient encore affublés de l’adjectif "alternatif" ?

Il y a en réalité de multiples raisons à cela. Certaines sont légitimes et légales à mon sens. D’autres le sont bien moins. Or, le sujet de leur traitement ne doit pas se résumer, comme il l’est actuellement, à un seul débat d’experts, de régulateurs, ou encore d’autorités de la concurrence. Car il s’agit ici d’un débat essentiel sur l’organisation du secteur de l’énergie, stratégique pour notre économie comme pour notre préservation de l’environnement. Nous devons toutes et tous y prendre part. Et en premier lieu nous, ces fameux "fournisseurs alternatifs", de plus en plus nombreux, de plus en plus visibles, de plus en plus soutenus, mais encore trop souvent accusés, à tort, d’affaiblir un "Service Public" à la française incarné par l’opérateur historique.

Ne pas se vendre à tout prix…

Cette concurrence qui se met en place depuis 10 ans a au moins atteint l’objectif qui lui avait été fixé : faire baisser les prix au bénéfice des consommateurs. Le succès des opérations d’achat groupées montre d’ailleurs que les associations de consommateurs ne s’y sont pas trompées, et ont su bien au contraire faire jouer la concurrence au bénéfice des clients finaux. Mais face aux enjeux que nous savons aujourd’hui colossaux de la transition énergétique, ce succès de la "concurrence par les prix" a aussi son ironique revers.

En premier lieu, il est important de savoir que cette baisse des tarifs affichée – qui atteint 15% chez les fournisseurs les plus agressifs – ne concerne qu’une partie de notre facture d’électricité. A ce jour, ni les taxes, ni la part d’abonnement fixe ne sont concernés. En second lieu, de nombreuses études démontrent qu’une baisse des prix seule incite en réalité les clients… à consommer davantage. En conclusion, si l’impact sur leur facture est finalement minime, celui qu’ils laissent sur l’environnement est quand-à lui… catastrophique.

Miser sur la pédagogie

Faut-il pour autant renoncer à une concurrence des prix ? Je ne le crois pas. Mais elle doit absolument s’accompagner d’une concurrence dans le service, qui concilierait ainsi les intérêts individuels (réduire les factures des Français) et les intérêts collectifs (réduire l’empreinte environnementale et la dépendance énergétique). En termes de services, la priorité je crois est de donner aux consommateurs le pouvoir de maîtriser leurs dépenses énergétiques, en leur permettant dans un premier temps d’en avoir pleinement et lisiblement conscience ! En effet, bien que matraqués de messages publicitaires et institutionnels, bien que s’avouant concernés par les enjeux environnementaux, ces derniers n’ont en réalité réalisé que peu d’efforts en ce sens pour une raison toute simple : à l’heure de la collecte de données à grande échelle, ils ne disposent aujourd’hui d’aucun outil de suivi en temps réel, d’aucun conseil personnalisé, ni d’aucun véritable levier incitatif… et se contentent encore d’un relevé relativement opaque tous les 12 ou 6 mois.

Mais l’innovation peut prendre encore mille formes dans ce secteur sclérosé de l’électricité ! Tant qu’elle œuvre dans le sens d’une baisse drastique et durable de notre consommation, qui elle seule saura être bénéfique pour notre planète ET notre budget.  Puisque nous n’y serons a priori pas incités à court terme par les forces en présence, rivalisons d’ingéniosité à l’aide des nombreuses clés technologiques à notre portée. Soyons innovants… et éclairés.