Blocage des cookies, quels enjeux pour le marketing à la performance ?
Mozilla a provoqué un tsunami dans la profession du marketing online en annonçant que sa dernière version du navigateur Firefox allait bloquer par défaut les cookies principalement des intermédiaires, qu’est-ce que cela signifie pour ces derniers et principalement pour le marketing à la performance ?
Les professionnels du marketing online ont effectivement reçu avec choc,
voir même prise de panique, cette nouvelle du blocage des cookies par défaut
dans la nouvelle version du navigateur.
Le General Counsel de l’IAB US, Mike Zaneis, est allé jusqu’à qualifier cet
évènement de « déclaration de guerre nucléaire à l’industrie publicitaire
online » sur Twitter. On pourrait penser, vu le niveau de publicité obtenu
par cette nouvelle, que c’est la toute première fois qu’un blocage de ce type
arrive. On est en fait loin de la nouveauté car Safari bloque ces cookies par
défaut depuis des années et Internet Explorer et Google proposent des options
de blocage automatique. Sur le papier, on pourrait s’attendre à ce que toute la profession se mobilise,
considérant que la perte d’activité potentielle est énorme, mais pour certains
acteurs du marketing à la performance, ceux qui principalement fonctionnent au
post-clic CPA/CPL, ce n’est pas le cas.
La clé, c’est le post-clic
Tous les cookies des intermédiaires post-clic, plateformes d’affiliation,
réseaux publicitaires, moteurs de recherche, sont considérés par Firefox comme
des 1st party cookies, parce qu’ils sont attachés aux domaines des
sites que les internautes visitent. Les intermédiaires se contentent d’effectuer
une redirection lorsque les internautes cliquent sur leurs liens qui génèrent
des appels à leurs serveurs avant d’être redirigés vers les pages des sites
qu’ils visitent. Après test d’une version beta du navigateur nous confirmons
que ces cookies ne sont pas bloqués.
Malheureusement ce n’est pas la même histoire lorsqu’on parle de cookies de
post-impression. Comme il n’y a pas de redirection opérée après un clic vers
des serveurs tiers, tous les cookies identifiés via ces intermédiaires sont
considérés comme des cookies tiers (third party) qui n’ont pas de lien avec les
sites visités. Les intermédiaires qui valorisent dans leur approche et dans
leurs modèles économiques le post-impression sont ceux qui vont être
véritablement impactés par cette approche. Les activités de display à la
performance sont notamment à notre avis les cibles premières de Mozilla, avec,
en ligne de mire, le retargeting.
Des raisons valables ?
La raison avancée par Mozilla Foundation est la protection de l’utilisateur et avant tout le fait que ses souhaits soient respectés, notamment en termes de sécurité et de vie privée. Mozilla Foundation annonce avoir effectué des études auprès de sa communauté d’utilisateurs. Vue l’importance du débat, la part de marché du navigateur oscillant entre 15 et 20 % du parc en fonction des marchés, il eut été judicieux de la part de Mozilla que son étude utilisateur fût publiée, d’autant plus que son statut de fondation lui confère une obligation de transparence. En réalité, lorsqu’on a lu ce qui est écrit plus haut, qu’on sait que Mozilla Foundation tire la plus grande de ses revenus via un opérateur post-clic du nom de Google, on peut aussi se laisser aller à quelques interprétations plus subjectives que la simple étude du comportement de ses utilisateurs.
En effet, dans sa propre FAQ Mozilla
déclare que l'essentiel de ses recettes provient des fonctionnalités commerciales
et de recherche incluses dans Firefox dans le cadre de partenariats avec les
plus grands éditeurs de moteurs et services de recherche comme Google, Bing,
Yahoo, Yandex, Amazon, eBay et d’autres, en hausse de 33% de 2010 à 2011.
Dans un contexte où les annonceurs vont
valoriser de plus en plus dans leurs investissements publicitaires online les
sites visités par les internautes en amont de leurs achats et conversions
online, Mozilla Foundation est en effet très bien placée, puisqu’elle a une connaissance
précise de la navigation de ses internautes, pour savoir que les revenus de
Google pourraient en être impactés, car les clics de ce dernier sont très
souvent les derniers clics avant la conversion, ceux qui remportent aujourd’hui
100% de la paternité de la plupart des conversions.
Quid de demain, les annonceurs vont-ils
continuer à surpondérer les liens sponsorisés Google adwords s’ils savent que
ce ne sont pas ceux qui sont à l’origine de leurs ventes ? La croissance
des revenus n’est-elle plus de 33 % de 2011 à 2012 pour Mozilla ?
En tout état de cause, le Web fonctionne depuis
plus de 15 ans sur un gentleman agreement entre offreurs de contenus et de
services gratuits ou quasiment gratuits et utilisateurs qui acceptent de la
publicité en guise de contrepartie, je pense que les internautes savent qu’ils
ont plus à gagner à accepter et voir des publicités pertinentes qu’à payer tous
les contenus qu’ils visitent. Les initiatives de ce type, et on peut citer
également la récente bien française de Free, ne servent jamais l’intérêt de
ceux qui les enfantent.
La pérennité de l’écosystème passe bien par
l’autodiscipline de ses acteurs et une collaboration intelligente, pas par la
mise en place de stratégies de conservation sous couvert de prétendue bonne
connaissance de ce que souhaitent les utilisateurs.