E-retail media en plein essor : les marketeurs coincés dans les starting-blocks

La montée en puissance du e-retail media, avec une croissance de +30% en France de 2022 à 2023, révolutionne discrètement le paysage marketing.

Pendant que tous les regards sont rivés sur l’intelligence artificielle, le e-retail media passe sous le radar du grand public. Pourtant, avec une croissance de +30% en France entre 2022 et 2023,  il est au cœur d’une révolution silencieuse qui va drastiquement rebattre les cartes. À l’ère de la plateformisation et du cookieless, la montée en puissance du levier reconfigure considérablement les rapports de force. Il est plus que jamais temps, pour les marketeurs, de s’y adapter.

Ne craignons pas les cadors du e-retail

Il y a quelques années, certains signes avant-coureurs laissaient déjà présager une restructuration du marché, lorsque des distributeurs se sont emparés des opportunités offertes par l’économie de plateforme pour capitaliser sur la donnée propriétaire. L’introduction de marketplaces comme Amazon, eBay ou Cdiscount a, depuis, radicalement redéfinit les contours du marché. Les e-retailers se sont assurés une place de choix sur le marché en proposant, sur leurs plateformes, des inventaires publicitaires moyennant finance. Côté hexagone, certains acteurs l’ont vite compris. Tandis que Carrefour est le premier distributeur mondial à s’être équipé d’une data clean room, environnement qui permet à plusieurs entreprises d’échanger des données encryptées, la joint-venture Casino-Intermarché s'est rapidement saisie de l’occasion en créant sa propre régie publicitaire.
Il est évident que la conjoncture joue en faveur de ces mastodontes. Le e-retail embrasse les principes d’une économie de plateforme qui les avantagent : notamment parce qu’elle permet d’agréger de nombreuses données transactionnelles sur des acheteurs dont le niveau d’intention est élevé. Une mine d’or sur laquelle les annonceurs se ruent, tant la dépréciation du cookie tiers et les règles de compliance RGPD rendent l’accès à la data de qualité obstrué.  
L’enjeu est de ne pas frémir devant l’hégémonie des grands acteurs. En l’état des choses, la configuration du marché ouvre la voie à des opportunités business florissantes pour les têtes de gondole, les agences, et les porteurs de solutions technologiques. On le voit bien lorsque les sociétés adtech investissent massivement dans l’intelligence artificielle et la data pour se placer en figure de proue sur le marché du e-retail.
Dans ce contexte, il est impératif, pour les acteurs du digital, de ne pas rater le virage du e-retail. Et, tous les indicateurs sont au vert pour le faire ! Post-covid, la part de marché du e-commerce a drastiquement été tirée à la hausse. Tout le monde s’est rabattu sur le e-commerce, sans pour autant en maîtriser toutes les ficelles. Aujourd’hui, le marché est en passe d’atteindre une maturité suffisante pour que chacun puisse en tirer de véritables bénéfices. Côté consommateur, l’achat en ligne est désormais ancré dans les routines. Côté annonceur, les enseignes commencent à bien intégrer le e-retail dans leur process.

En agence, instituons un marketing intelligent

La question est de savoir comment certains intermédiaires, comme les agences, peuvent se positionner comme acteurs clés dans cette économie en plein boom. Cela passe évidemment par une répartition budgétaire qui intègre le e-retail comme un poste de dépenses à part entière. Difficile à mettre en place lorsque l’on s’obstine à faire du search et du social les graals de notre activité. Cela est pourtant nécessaire si l’on veut ne pas être à la traîne face à un e-retail au grand galop. 

Il est évident que les marketplaces sont désormais pleinement intégrées dans le parcours client : et cela, les agences doivent l’avoir en tête pour adresser qualitativement le consommateur. Elles doivent non seulement investir sur le capital humain et affiner leur expertise pour répondre aux attentes d’annonceurs de plus en plus matures sur le sujet ; mais elles doivent aussi investir dans des solutions technologiques efficientes et adaptées, à même d’assurer une meilleure maîtrise de la donnée.

Il faut ajouter un second élément, et non des moindres : il est aujourd’hui crucial de  s’orienter vers la généralisation d’un marketing plus intelligent. Ceci n’est possible que si les agences, et l’ensemble des parties prenantes, parviennent à avoir une meilleure compréhension de leur environnement. Aujourd’hui, le e-retail soulève des enjeux transverses. L’un des plus importants est celui de la granularité du secteur. Il y a, en l’état, autant d’outils de mesure de la performance que de retailers. Les agences, aux côtés des autres parties prenantes, doivent parvenir à comprendre, structurer et homogénéiser la mesure pour rendre plus lisible l’incrément que génère le e-retail, et faciliter le pilotage de la performance. Le défi est grand, mais il est possible de le relever si un véritable travail d’autorégulation, de normalisation et de mutualisation est engagé.

D’autres questions se posent par ailleurs. Comment déjouer les barrières entre branding et performance ? Comment simplifier le maillage entre détaillants, agences, régies et plateformes ? Ou encore, comment intégrer le e-retail dans une stratégie omnicanale ? Le moins que l’on puisse dire, c’est que de beaux jours se profilent pour le secteur : et qu’il est aujourd’hui impératif de développer les best practices pour ne pas louper le coche.