Scandale chez Nestlé Waters : le Sénat lance une commission d'enquête
La découverte de traitements illégaux et de possibles contaminations dans des eaux minérales commercialisées a déclenché une réaction des pouvoirs publics.
Le Sénat a décidé de créer une commission d'enquête pour faire la lumière sur les pratiques des industriels de l'eau embouteillée, notamment celles de Nestlé Waters. Cette initiative fait suite à des révélations sur l'utilisation de traitements interdits et la possible contamination des eaux minérales à l'arsenic.
Création de la commission et motivations
Le 6 novembre, le Sénat a validé la création d'une commission d'enquête visant à examiner les pratiques des industriels de l'eau embouteillée. Selon Les Echos, cette décision intervient après des enquêtes journalistiques menées par Mediapart, Le Monde, Radio France et Mediacités, qui ont mis en évidence des irrégularités dans le traitement des eaux par Nestlé Waters, propriétaire des marques Vittel, Contrex et Hépar.
Alexandre Ouizille, sénateur de l'Oise et rapporteur de la commission, a déclaré : "Cela va au-delà de tout ce qu'on avait imaginé. On parle désormais de contamination après traitement. On doit faire le point sur l'ensemble des risques liés à l'utilisation massive de techniques prohibées." Il compare l'affaire à "l'hydre de Lerne", soulignant que chaque nouvelle révélation dévoile de nouveaux problèmes.
Accusations portées contre Nestlé Waters
Selon un rapport interne confidentiel de Nestlé datant de juin 2022, révélé par Mediapart et relayé par La République des Pyrénées, les ingénieurs du groupe ont identifié "20 défaillances et manquements à la réglementation sur la qualité des eaux". Ils alertent sur "le risque de concentration d'arsenic dépassant les seuils de sécurité alimentaire" dans certaines eaux minérales naturelles.
L'arsenic, présent naturellement dans la croûte terrestre, est toxique sous sa forme inorganique. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) indique qu'une exposition prolongée peut provoquer des cancers et des maladies cardiovasculaires.
Des autorités sanitaires auraient découvert en mars 2022, dans les usines de Nestlé Waters, "des structures souterraines, de faux murs en inox et des armoires dissimulant des traitements interdits". Ces traitements, tels que l'utilisation de lampes UV et de charbon actif, sont interdits pour les eaux minérales, qui doivent conserver leurs propriétés naturelles.
Réactions de Nestlé Waters et enjeux gouvernementaux
Nestlé Waters conteste ces accusations, affirmant que ses eaux sont sûres pour la consommation et que le rapport interne a été mal interprété. L'entreprise a exprimé son intention de "coopérer pleinement" avec la commission d'enquête du Sénat.
Le gouvernement aurait été informé par Nestlé en 2021 de l'utilisation de traitements interdits. Il a ensuite assoupli la réglementation, permettant aux industriels d'utiliser des microfiltres avec un seuil de filtration inférieur à 0,8 micron.
La commission d'enquête examinera la connaissance qu'avaient les membres du gouvernement de ces pratiques et les actions entreprises. Elle se penchera également sur "l'accaparement des sources par des acteurs industriels et les impacts potentiels de cette exploitation sur la durabilité de la ressource".
Conséquences pour les consommateurs et l'industrie
Les révélations soulèvent des préoccupations majeures quant à la qualité des eaux minérales disponibles sur le marché. Les consommateurs exigent une transparence totale sur les produits qu'ils consomment.
Antoinette Guhl, sénatrice écologiste qui participera à la commission d'enquête, a déclaré : "Il n'est pas question de laisser les intérêts économiques primer sur la sécurité sanitaire."
Cette affaire pourrait entraîner un examen approfondi des pratiques de l'industrie de l'eau embouteillée et une révision des réglementations en vigueur pour garantir la sécurité sanitaire et écologique des ressources en eau.