Impôts sur le revenu 2025 : le flou persiste après la censure budgétaire

Impôts sur le revenu 2025 : le flou persiste après la censure budgétaire Face à l'absence de budget voté, le gouvernement mise sur une loi exceptionnelle pour éviter le blocage administratif, laissant en suspens plusieurs mesures fiscales clés.

L'annulation du budget 2025 par le Conseil constitutionnel a plongé la France dans une situation budgétaire inédite. Pour éviter une paralysie administrative, une loi spéciale reconduisant temporairement les dispositions de 2024 a été annoncée. Mais cette mesure soulève de nombreuses interrogations, notamment sur l'impact fiscal pour les particuliers et les entreprises.

Une loi spéciale pour éviter la paralysie administrative

Après la censure du budget 2025 par le Conseil constitutionnel, le gouvernement a annoncé une "loi spéciale" pour reconduire temporairement les dispositions du budget 2024. Cette mesure, destinée à assurer la continuité des services publics, repose sur l'article 45 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Selon Laurent Saint-Martin, ministre démissionnaire du Budget, cette disposition permet de garantir la continuité des services publics jusqu'à l'adoption d'un nouveau budget en début d'année prochaine.

Cependant, cette loi spéciale ne peut inclure certaines mesures, notamment l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation. "La loi spéciale ne peut pas indexer le barème de l'impôt sur le revenu sur l'inflation. Ce n'est pas possible constitutionnellement", a confirmé Laurent Saint-Martin, cité par Capital.

Un impact direct sur les contribuables

En l'absence d'indexation, le barème de l'impôt sur le revenu reste basé sur les seuils et taux de 2024. Selon les chiffres de l'OFCE relayés par Les Echos, cela entraînera l'imposition de 380 000 nouveaux foyers et une augmentation des prélèvements pour 17,6 millions de foyers. Ce gel pourrait néanmoins être corrigé rétroactivement si un budget 2025 est voté au début de l'année prochaine.

Ce scénario est juridiquement complexe mais envisageable, comme l'explique Emmanuelle Mignon, avocate et ancienne conseillère de Nicolas Sarkozy : "Bercy peut assez facilement se montrer créatif pour imputer le trop-perçu de 2024 sur les impôts de 2025. Cela demande un peu de gymnastique, mais ils savent faire".

En revanche, il serait juridiquement improbable que des mesures rétroactives défavorables soient appliquées aux revenus de 2024. Jean-Yves Mercier, vice-président du Cercle des fiscalistes, souligne : "La jurisprudence du Conseil constitutionnel, sous l'influence de la Cour européenne des droits de l'homme, permet de retoquer une mesure qui contrarie une attente légitime du contribuable".

Contrairement aux contribuables soumis à l'impôt sur le revenu, les retraités bénéficient de mécanismes automatiques d'indexation prévus par le Code de la Sécurité sociale. Cela garantit une revalorisation de 2,2% des pensions dès janvier 2025, bien au-delà des 0,8% initialement prévus.

Laurent Saint-Martin a précisé sur TF1 que cette revalorisation s'appliquera indépendamment du vote d'un nouveau budget. Cette mesure bénéficie particulièrement aux petites retraites, qui auraient dû attendre juillet 2025 pour une seconde augmentation dans le cadre du budget initial.

Entreprises et perspectives fiscales

Pour les entreprises, le flou demeure également. Si une surtaxe sur les bénéfices de 2024 semble exclue, des mesures fiscales pourraient être introduites en cours d'année 2025. Selon Pierre Bonamy, associé du cabinet Reinhart Marville Torre, "le législateur peut décider de mesures fiscales applicables en cours d'année, dès lors que le "fait générateur" survient en 2025, après l'introduction de la mesure".

Des dispositifs comme une taxe sur les rachats d'actions ou une révision de la flat tax pourraient voir le jour, mais uniquement pour des opérations postérieures à leur adoption. Cette flexibilité laisse planer une incertitude sur la fiscalité des entreprises, notamment dans un contexte de finances publiques tendues.