Accord mondial sur l'IA : pourquoi Washington et Londres restent en retrait
Le sommet de Paris sur l'intelligence artificielle a réuni une centaine de pays avec pour objectif de poser les bases d'une gouvernance mondiale sur cette technologie. À son issue, 58 pays ont signé une déclaration en faveur d'une IA "ouverte, inclusive et éthique", mais les États-Unis et le Royaume-Uni ont refusé d'y adhérer. Une absence remarquée, alors que cet accord était soutenu par la France, la Chine et l'Union européenne.
Les motivations américaines entre régulation et rivalité avec la Chine
Lors du sommet, J.D. Vance, vice-président des États-Unis, a défendu la position de son pays, mettant en garde contre une réglementation qui pourrait, selon lui, freiner l'innovation. "Une régulation excessive pourrait tuer une industrie en plein essor", a-t-il affirmé dans un discours relayé par Huffingtonpost. Washington considère que les règles proposées pourraient limiter la croissance des entreprises américaines du secteur, notamment dans un contexte de compétition technologique accrue.
L'un des autres points de friction concerne la présence de la Chine parmi les signataires de l'accord. Pékin a récemment intensifié ses investissements dans l'IA, notamment avec le lancement de son propre modèle conversationnel, DeepSeek. Cette participation chinoise a suscité des réserves du côté américain. "S'associer avec eux revient à enchaîner votre nation à un maître autoritaire qui cherche à infiltrer, s'installer et s'emparer de votre infrastructure d'information", a déclaré J.D. Vance, cité par Le Parisien.
Les États-Unis privilégient ainsi une approche centrée sur leur propre réglementation nationale. Quelques jours avant le sommet, Washington a dévoilé "Stargate", un plan d'investissements de 500 milliards de dollars destiné à renforcer le leadership américain dans l'IA. Ce programme vise notamment à soutenir les géants de la tech et à sécuriser les chaînes d'approvisionnement en semi-conducteurs, cruciales pour le développement de cette technologie.
Le Royaume-Uni veut "suivre sa propre voie"
À Londres, la position est différente mais repose sur une même volonté d'indépendance. Un porte-parole du Premier ministre Keir Starmer a justifié ce refus en mettant en avant la souveraineté britannique : "Nous n'adhérons qu'à des initiatives qui sont dans l'intérêt national du Royaume-Uni", a-t-il déclaré.
Depuis plusieurs mois, le gouvernement britannique affiche sa volonté de faire du Royaume-Uni un "leader mondial" de l'intelligence artificielle. Keir Starmer a récemment réaffirmé cette ambition en présentant un plan permettant aux entreprises de tester leurs innovations avant toute réglementation stricte. Cette stratégie vise à attirer les investisseurs en offrant un cadre législatif plus souple.
"Nous allons suivre notre propre voie […] tester et comprendre l'IA avant de la réglementer, afin de nous assurer que lorsque nous le ferons, ce sera de manière proportionnée et sur la base de données scientifiques", déclarait le Premier ministre britannique il y a quelques semaines.
Une fracture avec l'Europe sur la gouvernance de l'IA
La décision de Washington et Londres illustre une divergence croissante avec l'Union européenne et d'autres acteurs comme la France, qui plaident pour une régulation internationale. Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité d'un cadre de confiance : "Si nous cassons cette confiance, l'intelligence artificielle divisera le monde", a-t-il affirmé en clôture du sommet, selon CNews.
L'Europe mise sur un cadre strict encadrant le développement et l'utilisation de l'IA, tandis que les États-Unis et le Royaume-Uni défendent un modèle plus flexible, tourné vers l'innovation et l'attractivité économique. Cette opposition risque d'accentuer les différences dans les futures réglementations sur l'IA, alors que la compétition technologique mondiale continue de s'intensifier.