Pour éviter les sanctions américaines, Londres pourrait supprimer sa taxe Gafa
Le Royaume-Uni pourrait prochainement renoncer à sa taxe Gafa instaurée en avril 2020, afin d'éviter l'imposition de lourds tarifs douaniers américains. Cette taxe, initialement portée par le gouvernement conservateur et reprise par l'actuel gouvernement travailliste, fait actuellement l'objet de négociations avec Washington.
Une taxe à 800 millions de livres remise en question
La taxe britannique sur les géants numériques, surnommée "taxe Gafa", s'élève actuellement à 2% sur les revenus générés au Royaume-Uni par les entreprises technologiques dépassant 500 millions de livres de chiffre d'affaires mondial, telles que Google, Meta ou Amazon. Elle rapporte au budget britannique environ 800 millions de livres chaque année, selon Les Échos.
Malgré cette recette fiscale significative, le Royaume-Uni pourrait renoncer à cette taxe afin d'éviter les tarifs douaniers américains que l'administration Trump s'apprête à annoncer le 2 avril prochain. Selon Rachel Reeves, chancelière de l'Échiquier britannique, interrogée sur la BBC dimanche dernier, cette taxe "fait bien l'objet d'une discussion avec Washington". Elle a toutefois refusé de garantir son maintien.
Le contexte budgétairement délicat dans lequel se trouve le Royaume-Uni complique pourtant cette décision. Le gouvernement de Keir Starmer prévoit déjà des économies importantes, dont la suppression de 5 milliards de livres d'allocations maladie longue durée et potentiellement 10 000 suppressions de postes de fonctionnaires.
Négociations économiques entre Londres et Washington
Ce possible abandon de la taxe Gafa intervient alors que le Premier ministre britannique Keir Starmer et le président américain Donald Trump discutent actuellement d'un accord économique bilatéral plus large. Les deux dirigeants ont récemment échangé à ce sujet au cours d'une "brève discussion" téléphonique.
"Le Royaume-Uni travaille avec les États-Unis sur un accord de prospérité économique, en s'appuyant sur nos forces communes et notre engagement en faveur de la sécurité économique", a précisé un porte-parole de Keir Starmer, cité par Le Figaro. Ces négociations pourraient inclure la question de la fiscalité numérique britannique, aujourd'hui source de tensions avec Washington.
Risques de représailles commerciales américaines
Depuis son introduction en 2020, cette taxe numérique britannique, comme celles appliquées dans plusieurs pays européens, suscite une vive opposition aux États-Unis. L'administration Trump considère ces prélèvements comme injustes envers les grandes entreprises technologiques américaines. Les représailles commerciales évoquées par les États-Unis pourraient notamment toucher le secteur de la métallurgie britannique, très vulnérable face aux augmentations de tarifs douaniers américains.
Washington critique aussi la TVA de 20% prélevée par le Royaume-Uni sur les importations, perçue comme injuste par Donald Trump. Cette pression américaine pousse Londres à envisager une concession sur la taxe Gafa afin d'éviter des sanctions plus sévères.
Le Royaume-Uni avait déjà amorcé un rapprochement avec les États-Unis en refusant de signer la déclaration du sommet de l'intelligence artificielle à Paris, et en discutant d'un assouplissement de la législation britannique sur les droits d'auteur favorable aux entreprises américaines de l'IA.
Une position différente de l'Union européenne
Contrairement au Royaume-Uni, la France affiche une fermeté sur la question de la fiscalité numérique. La taxe française sur les géants du numérique, elle aussi fixée à 2%, rapporte chaque année plus de 800 millions d'euros à l'État français. Paris applique également d'autres prélèvements spécifiques sur les plateformes numériques étrangères telles que Netflix ou YouTube afin de financer la création française. Jusqu'à présent, la France n'a montré aucune volonté de céder aux pressions américaines.
Ainsi, en envisageant la suppression de sa taxe Gafa, le Royaume-Uni adopte une approche distincte des Européens dans la gestion de ses relations économiques avec Washington, cherchant à éviter les conséquences de mesures douanières américaines imminentes.