Souveraineté numérique : 300 entreprises appellent à un réveil stratégique en Europe

Souveraineté numérique : 300 entreprises appellent à un réveil stratégique en Europe Le document commun détaille une trentaine de pistes concrètes pour favoriser l'essor d'alternatives locales aux outils technologiques dominants.

Ce jeudi 22 mai, un manifeste réunissant plus de 300 entreprises, administrations et acteurs du numérique français a été rendu public. Il liste 33 propositions concrètes pour renforcer la souveraineté numérique européenne.

Une mobilisation inédite autour d'un manifeste commun

Sous l'impulsion de l'Innovation Makers Alliance (IMA), le texte a été rédigé avec la participation de 150 grands groupes, ETI, start-up, institutions publiques, et soutenu par des entités telles que France 2030, Station F, France Digitale, la Direction générale des entreprises ou encore le Hub France IA. Parmi les signataires figurent Airbus, Orange, OVH, Mistral AI ou encore la Région Occitanie, selon La Dépêche.

Le manifeste vise à proposer un cadre opérationnel pour réduire la dépendance européenne aux solutions technologiques étrangères, notamment américaines. Il formule 33 recommandations, dont cinq mesures considérées comme prioritaires par les signataires.

Des propositions pour réduire la dépendance au cloud et à l'IA américaines

Selon Les Échos, les solutions cloud de trois entreprises américaines — Amazon Web Services, Microsoft Azure et Google Cloud — captent environ 80% du marché européen, dans le secteur public comme privé. Le Cigref chiffre le coût annuel de cette dépendance à 265 milliards d'euros pour les pays européens.

Parmi les mesures avancées, les signataires proposent la création d'un Small Business Act européen, qui réserverait une part des marchés publics aux PME et startups du numérique installées dans l'Union. Le manifeste appelle également à lancer une plateforme centralisée d'appels d'offres, afin de mieux connecter les besoins des grands groupes avec les offres technologiques locales.

Un bonus souveraineté, sur le modèle du bonus écologique, est aussi suggéré. Il consisterait à accorder une réduction de prix ou un avantage fiscal lors de l'acquisition de solutions numériques européennes. D'autres propositions portent sur la mise en place de data spaces interopérables respectant le RGPD, et sur le financement d'infrastructures IA sur le sol européen, y compris des centres de données et de calcul.

Une inquiétude renforcée par le contexte international

Dans les échanges qui ont précédé la publication du manifeste, plusieurs intervenants ont pointé l'accélération des tensions technologiques avec les États-Unis. Christophe Grosbost, directeur de la stratégie de l'IMA, a ainsi déclaré :

"Il y a des annonces et des menaces claires. Nous pouvons voir les prémices d'une guerre froide technologique", propos relayés par Maddyness.

L'arrivée de Donald Trump à la tête des États-Unis a alimenté les inquiétudes concernant l'accès européen aux composants critiques, comme les GPU. Les décisions récentes des GAFAM, telles que la suppression de programmes de modération par Meta, sont également citées comme exemples d'un éloignement croissant avec les standards européens.

Clara Chappaz, ministre déléguée au numérique et à l'intelligence artificielle, a annoncé en avril la création d'un Observatoire de la souveraineté numérique, ainsi qu'un appel à projets doté de plusieurs dizaines de millions d'euros pour renforcer les solutions cloud nationales.