Exportations françaises en chute libre : les effets directs des tarifs imposés par Donald Trump

Exportations françaises en chute libre : les effets directs des tarifs imposés par Donald Trump À moins d'un accord commercial de dernière minute, les nouvelles surtaxes américaines viseront des produits emblématiques de l'industrie française, avec des conséquences immédiates sur l'emploi.

À partir du 9 juillet, de nouveaux droits de douane américains doivent s'appliquer à une série de produits européens. Cette mesure, annoncée par Donald Trump, concerne directement plusieurs filières françaises et pourrait entraîner des pertes économiques et sociales significatives, selon plusieurs études publiées ce lundi 30 juin.

Une taxation ciblée sur les secteurs excédentaires

Les nouveaux droits de douane envisagés par Washington visent en priorité les produits européens pour lesquels les États-Unis enregistrent un fort déficit commercial. D'après une analyse publiée par le cabinet Asterès et relayée par BFMTV, trois secteurs français concentrent l'essentiel des risques : les vins et spiritueux (8% des exportations françaises vers les États-Unis), les produits cosmétiques (6%) et la maroquinerie (5%).

Dans ces filières, l'excédent commercial est élevé : 3,8 milliards d'euros pour les boissons, 2,4 milliards pour les cosmétiques et 2,2 milliards pour les articles en cuir. Ces données font de la France l'un des pays les plus exposés aux mesures américaines. Asterès rappelle que le déficit commercial global des États-Unis avec l'Union européenne a atteint 235 milliards de dollars en 2024.

Les surtaxes annoncées pourraient atteindre 20%, voire 50%, selon les déclarations du président américain. Dans le scénario d'une taxe à 20%, les exportations des trois secteurs reculeraient de 11%, entraînant la perte de plus de 17 000 emplois en France, dont 8 000 dans les vins et spiritueux, 5 300 dans les cosmétiques et 3 900 dans la maroquinerie. Le scénario le plus pessimiste, basé sur des droits de douane portés à 50%, évoque jusqu'à 2,5 milliards d'euros d'exportations perdues et 45 000 suppressions d'emplois.

Toujours selon les estimations d'Asterès, l'impact social pourrait être particulièrement fort dans certaines zones industrielles ou rurales fortement dépendantes de ces activités. Le cabinet précise que ses évaluations sont prudentes et que les chiffres réels pourraient s'avérer plus élevés.

Une contraction attendue des exportations françaises

Au-delà de ces données sectorielles, une étude publiée par l'Institut des politiques macroéconomiques (i-MIP) évoque un recul de 2,4% des exportations françaises dans leur ensemble. Ce chiffre correspond au scénario cumulant la mise en œuvre des droits de douane, des mesures de représailles de l'Union européenne et une incertitude persistante dans les échanges internationaux.

L'institut i-MIP a modélisé quatre scénarios, en combinant ou non les mesures de rétorsion et l'instabilité commerciale. Le scénario le plus défavorable, retenu pour cette estimation, inclut à la fois des représailles de la part de l'Union européenne et une dégradation durable du climat commercial entre les deux blocs.

L'économiste Nicolas Bouzou indique que la filière viticole reste "la plus fragile, la plus menacée par les droits de douane de Trump". Il ajoute que "sur certains territoires, l'impact de ces droits de douane serait à proprement parler catastrophique, avec d'inévitables conséquences sociales".

D'après les données évoquées dans l'étude, la baisse de compétitivité française sur le marché américain résulterait principalement de la hausse mécanique des prix induite par les droits de douane. Les pertes en volume affecteraient aussi bien les grandes entreprises que les producteurs plus modestes, notamment dans le secteur viticole.

Des appels à la prudence dans la réponse européenne

Le cabinet Asterès recommande d'éviter les mesures de rétorsion, estimant qu'elles seraient peu efficaces et risqueraient d'aggraver la situation pour les secteurs déjà fragilisés. Ses économistes privilégient d'autres leviers : soutien direct aux filières concernées, diversification des débouchés et renforcement des liens commerciaux existants avec d'autres partenaires.

Dans la même lignée, le think tank Bruegel estime que les États-Unis seraient les premiers perdants d'une guerre commerciale prolongée. Une étude citée par le cabinet chiffre à 51 milliards de dollars les pertes annuelles pour l'économie américaine, soit 0,27% de son produit intérieur brut. À plus long terme, les projections anticipent une baisse de 6% de la croissance et une réduction moyenne des salaires de 5%.

Pour Nicolas Bouzou, une posture de confrontation ne serait pas favorable à la France. Il souligne que "les États-Unis mènent une politique imbécile" mais qu'il "ne faut pas y répondre par une politique tout aussi inefficace qui irait contre nos intérêts".