La France n'est plus la championne mondiale du tourisme
Malgré plus de 100 millions de visiteurs étrangers enregistrés en 2024, la France ne domine plus le tourisme mondial. Les chiffres de fréquentation masquent une baisse relative des performances économiques du secteur, révélée par des données précises et plusieurs prises de parole d'acteurs majeurs.
Une fréquentation élevée mais une rentabilité moindre
Avec 71 milliards d'euros de recettes touristiques en 2023, la France occupe désormais la quatrième place mondiale, derrière l'Espagne (126 milliards), les États-Unis et le Japon, selon les données citées par Le Figaro. Ce classement traduit un écart grandissant entre la fréquentation et la rentabilité, dans un contexte où d'autres destinations parviennent à générer davantage de revenus avec un nombre plus limité de visiteurs.
D'après une étude publiée par la Commission européenne, la France a enregistré 138,5 millions de nuitées étrangères dans ses établissements touristiques en 2023, contre 301,7 millions pour l'Espagne et 234,3 millions pour l'Italie, comme le rappelle BFMTV. Ces chiffres confirment une durée moyenne de séjour plus courte dans l'Hexagone. Dominique Marcel, président d'Alliance France Tourisme, y voit une spécificité nationale : "C'est dû au fait que la France est un pays de passage", a-t-il déclaré dans une interview accordée à Franceinfo.
Ce phénomène influence directement les performances économiques du secteur. Le Forum économique mondial classe désormais la France en quatrième position mondiale en matière de dépenses touristiques, alors que les autorités françaises revendiquent toujours la première place en nombre d'entrées internationales.
Un modèle en déséquilibre et des investissements jugés insuffisants
L'Alliance France Tourisme, qui regroupe des entreprises telles qu'Accor, SNCF Connect, la Compagnie des Alpes ou European Camping Group, alerte sur les faiblesses structurelles du secteur. Dominique Marcel a affirmé que le seuil symbolique des 100 millions de touristes "ne veut pas dire grand-chose, puisque ce qui est important, c'est la dépense touristique". L'organisation plaide pour une réorientation vers la valeur réelle générée par le tourisme, à travers une amélioration de l'offre et de la qualité d'accueil.
Plusieurs signaux seront évoqués au cours du colloque coorganisé par Alliance France Tourisme et Régions de France au Sénat ce 3 juillet. En montagne ou sur le littoral, de nombreux hébergements vieillissants ne sont plus exploités pleinement, devenant des "lits froids". Dominique Marcel évoque la nécessité de "rénover l'offre d'hébergement" et insiste sur l'importance d'impliquer les collectivités, soulignant que "les co-investissements sont évidemment une bonne chose" et qu'il est essentiel de "faciliter les projets".
La part des touristes français dans les dépenses totales reste majoritaire, avec environ deux tiers des recettes issues de la clientèle nationale. Cette donnée conduit les professionnels à rappeler l'importance de ne pas se concentrer uniquement sur les visiteurs étrangers, dans un contexte où le tourisme de masse rencontre aussi des critiques locales, notamment dans certaines zones sous pression.
Une dynamique internationale en mouvement
En 2023, l'Espagne a enregistré une croissance de plus de 8% de ses recettes touristiques, tandis que la France est restée stable, selon les propos tenus par Dominique Marcel. Cette progression rapide d'un concurrent direct souligne un décalage qui ne peut plus être ignoré. Le président d'Alliance France Tourisme estime que "les autres progressent très vite et on perd des points. Il vaut mieux se poser des questions maintenant parce qu'il faut dix ans pour investir".
Malgré un héritage jugé positif des Jeux olympiques, les années olympiques ne sont pas toujours synonymes de croissance pour le secteur. Pour les professionnels, l'effet d'image ne suffira pas à compenser les retards d'adaptation ni à inverser la tendance dans un environnement de plus en plus concurrentiel.