L'Assemblée adopte la suspension des aides publiques en cas de suspicion de fraude
Portée par le député Ensemble pour la République de Gironde, Thomas Cazenave, la loi "contre toutes les fraudes aux aides publiques" a été adoptée par une Assemblée nationale peu remplie ce lundi 27 janvier. Celle-ci autorise les organismes en charge de l'instruction et de l'attribution des aides publiques à suspendre temporairement le versement en cas de simple suspicion de fraude. Les macronistes souhaitent ainsi lutter contre la fraude à la source, les administrations étant souvent dans l'impossibilité de récupérer les sommes versées. "La lutte contre la fraude sous toutes ses formes est une priorité", a déclaré Amélie de Montchalin, ministre des Comptes publics et venue défendre la proposition, le gouvernement ayant engagé une procédure accélérée sur ce texte.
Des efforts déjà mis en place
Un texte qu'avait déjà essayé de faire voter Thomas Cazenave lorsqu'il était lui-même ministre des Comptes publics, mais la dissolution en juin l'a contraint à passer par la voie d'une proposition de loi. Dans ce texte, la fraude est présentée comme un "fléau social, économique et moral", un "enjeu de justice" ainsi qu'un "enjeu majeur pour nos finances publiques". Ces dernières années, le gouvernement a entrepris des efforts pour lutter contre la fraude, notamment grâce à une première loi de 2018, la loi douanes du 18 juillet 2023 ainsi qu'une feuille de route lancée par le précédent gouvernement en mai 2023. Ces efforts ont notamment permis une augmentation de 50% des redressements de l'Urssaf sur la fraude sociale des entreprises.
Des fraudeurs innovants
Mais certaines aides publiques apparues ces dernières années sont considérées comme "fraudogènes", telles que les aides à l'apprentissage, les bonus écologiques, le compte personnel de formation (CPF), MaPrimeRenov' ou les Certificats d'économies d'énergie (CEE). Près de 20 milliards d'euros d'aides publiques seraient "particulièrement exposées à des tentatives de fraude", selon le rapport de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi. Rien que sur 2023, le service de renseignement financier Tracfin a remarqué des mouvements suspects sur près de 400 millions d'euros. Concernant les autres dispositifs, Thomas Cazenave estime entre 700 millions et 1,6 milliard d'euros de fraude potentielle. "Les fraudeurs sont toujours plus organisés et innovants et notre action doit aller plus loin", a-t-il souligné ce lundi. Mais ce texte permet surtout de mettre en place un contexte juridique, les organismes hésitant souvent à suspendre le versement d'aides publiques "faute de cadre juridique les y autorisant et parfois aussi par crainte de contentieux administratifs". La suspension pourra être prononcée pour une durée maximale de trois mois, le temps d'examiner les soupçons. Cette proposition de loi vise notamment à renforcer le partage d'informations entre services de lutte contre les fraudes et les organismes qui versent les aides. Celle-ci interdit également le démarchage sous toutes ses formes, obligeant les entreprises à informer leurs clients lorsqu'elles font appel à des sous-traitants ou encore de publier le nom des sociétés contrevenantes.