L'économie numérique transforme les rapports de confiance

L'économie numérique transforme les rapports de confiance Face à des échanges décentralisés et à la disparition des intermédiaires, les consommateurs vont devoir trouver de nouveaux garants, analyse la Fevad.

Les avancées technologiques et les innovations numériques accélèrent la dématérialisation et la décentralisation des échanges. Auparavant, les modèles intermédiarisés étaient la norme. Aujourd'hui, les systèmes qui mettent en relation les gens et les organisations sont de plus en plus ouverts, les frontières s'effilochent les unes après les autres. "Dans cet environnement où les intermédiaires disparaissent, nous allons avoir besoin de nouveaux éléments de confiance, souligne Marc Lolivier, délégué général de la Fevad. Ces attentes vont aller croissant et faire de la confiance une valeur capitale, notamment en matière d'achat en ligne."

Parmi les attentes des internautes vis-à-vis des sites marchands, les trois premières sont liées à la notion de confiance

L'enquête Fevad/CSA de janvier 2016 le révélait déjà. Parmi les attentes des internautes vis-à-vis des sites marchands, les trois premières sont liées à cette notion de confiance. Sur le podium : la sécurité des paiements (60% des répondants), la sécurité des données personnelles (55%), puis la loyauté de l'affichage des prix des produits et de la livraison (52%). L'intérêt des entreprises pour ces questions se renforce également.

Comment répondre à ces attentes ? D'abord par la réglementation, notamment dans le domaine des données. Le règlement européen sur la collecte et le traitement des données, adopté en mars et qui entrera en vigueur dans deux ans, donne de nouveaux droits aux internautes : droit à la portabilité des données, à l'oubli, à l'information renforcée et à la transparence en cas de faille de sécurité.

Communication de crise 2.0

"Mais la loi n'est pas le seul outil, d'autant que le temps législatif est souvent en décalage par rapport au temps du Web et des affaires, remarque Marc Lolivier. Elle doit donc être accompagnée par d'autres dispositifs." On pense par exemple à la Cnil, qui accompagne les démarches des entreprises et qui travaille avec elles à l'élaboration de codes de conduite.

Ce besoin de confiance qui, dans l'e-commerce, est en train de prendre le pas sur la recherche des prix bas (où sont les pure players low cost des débuts du secteur ?) doit aussi être pris en compte par les marques et les marchands. Notamment en cas de crise ! Faille de sécurité, produit défectueux… Comment s'adresser aux consommateurs lorsque la communication top-down est noyée dans la masse des échanges ? La parole de la marque elle-même se décentralise : chacun dans l'organisation devient son ambassadeur, quand ce rôle n'est pas confié aux clients eux-mêmes.

Il est d'ailleurs intéressant de constater que si, du fait de leur statut d'hébergeur, les marketplaces (Priceminister, Airbnb, Vestiaire Collective…) ne sont pas responsables en cas de problème côté vendeur, elles décident souvent de se poser en tiers de confiance. Un engagement commercial par lequel elles maîtrisent aussi leur réputation.

Une piste technologique : la blockchain

"Des solutions technologiques apparaissent aussi pour répondre à ce besoin de confiance, note Marc Lolivier. A ce titre, la blockchain est certainement l'une des plus prometteuses." Dans ce système très distribué, les données sont sécurisées, infalsifiables et immuables. Les applications sont très nombreuses : transactions, paris, assurances, contrôle d'identité, certification, traçabilité… Par exemple, le Honduras a placé son cadastre dans une blockchain pour éviter la corruption immobilière.

Toutefois, cette sécurité renforcée ne constitue peut-être pas l'ultime martingale. D'abord, la blockchain ne deviendra pas mass market tout de suite et les institutions, bancaires notamment, ont encore de beaux jours devant elles si elles savent faire évoluer leur proposition de valeur. Ensuite, le "tuyau" blockchain est peut-être parfait, mais la question de la confiance ne se déplace-t-elle pas à l'entrée et à la sortie de ce tuyau ? Qui y rentre les informations ? Tous les agents de change sont-ils fiables ? La taille nécessaire à la solidité des blockchains sera-t-elle toujours atteinte ?

Autant de questions sur lesquelles nous nous pencherons lors des Enjeux E-Commerce qu'organise la Fevad le 14 juin, en partenariat avec le JDN. Autour de la table : Isabelle Falque-Pierrotin (présidente de la Cnil), Natalie Rastoin (DG groupe d'Ogilvy), Antoine Yeretzian (cofondateur de Blockchain France) et William Ben Chemouil (directeur du développement d'Oney - Banque Accord). Aurore Domont (présidente de MEDIA.figaro) introduira cette session en abordant la notion de confiance dans les médias, qui implique non seulement la qualité de l'information délivrée mais également une responsabilité sur l'ensemble de la chaîne de valeur.