Avec relevanC, Casino frappe fort dans le business de la data

Avec relevanC, Casino frappe fort dans le business de la data Le géant de la distribution va permettre aux annonceurs de piocher dans ses 50 millions de profils cross-devices pour optimiser leurs campagnes pubs online et mesurer leurs impacts sur les ventes.

Plutôt discret jusque-là dans la bataille qui oppose les géants du retail français aux Gafa, le groupe Casino passe à l'offensive. Le groupe de distribution français vient d'annoncer le lancement d'une plateforme data baptisée relevanC dans laquelle les annonceurs pourront consulter "la base de données la plus massive, complète et qualitative sur les consommations des Français, leurs intentions et comportements d'achat". La plateforme proposera à terme près de 50 millions de profils et 1 100 segments d'audience.

Ce projet piloté avec société Redpill a une ambition affichée : "contrer le quasi-monopole des GAFA et notamment Google et Facebook". Un discours qui est depuis quelques mois sur toutes les lèvres qu'il s'agisse de groupes médias, d'opérateurs télécom ou d'e-commerçants. C'est aussi le fruit d'une réunion entre le PDG du groupe, Jean-Charles Naouri, son DGA, Julien Lagubeau et le fondateur de Redpill, Marco Tinelli dans le courant de l'été. "Nous voulions réfléchir aux moyens de mettre en place une véritable stratégie data pour le groupe Casino", explique Marco Tinelli.

10 000 magasins et 17,2 millions de visiteurs uniques pour le groupe Casino en France

Pour constituer sa plateforme, Casino s'est appuyé sur les data de ses 10 000 magasins en France (hypermarchés Géant, Casino de proximité, Franprix, Monoprix, Leader Price). A cela s'ajoute l'activité que Casino réalise sur le Web. 90% de son audience sur ce canal provient de son navire amiral Cdiscount. L'e-commerçant français, dont il est actionnaire quasi exclusif depuis 2011, est sur ce terrain le premier poursuivant d'Amazon. Ce dernier cumulait 24 millions de visiteurs uniques sur tous les devices en août 2017 selon Médiamétrie//Netratings contre 17,2 millions pour le groupe Casino.

Le maillage cross-canal de Casino lui permet donc d'observer plus de 60 millions de transactions mensuelles qu'elles soient en magasin ou en ligne. Ces informations seront mises à disposition des annonceurs, des agences et des instituts d'étude à travers la plateforme.

Un modèle de vente de data pure

relevanC mobilise 35 collaborateurs dont une vingtaine de data miners chargés de réaliser tout l'onboarding des données issues des magasins. Une pratique indispensable pour associer une ID online à un acheteur physique. Un travail de fourmi que relevanC a donc choisi de réaliser lui-même plutôt que de le confier à un spécialiste comme Temelio ou Liveramp. La plateforme a réussi à synchroniser 35 millions de profils en l'espace d'un mois et demi. Les 50 millions devraient être atteints d'ici la fin de l'année.   

La data RelevanC activable sur Facebook, Appnexus ou Oath

Les data de relevanC ne seront pas activables sur une sélection de médias partenaires. La plateforme sera ainsi connectée à un maximum de sources d'inventaires dont Facebook, Appnexus et Oath. Pour l'ancien patron de Fullsix, il était indispensable de séparer la data du média. "La pratique du bundle 'media + data' fait le jeu de Google et Facebook qui ont beaucoup trop d'atouts sur ce terrain-là", estime-t-il. 

Une philosophie très éloignée de celle de Gravity

Une philosophie qui est donc diamétralement opposée à celle du projet Gravity qui compte dans ses rangs le groupe Fnac-Darty et qui réserve sa data à des médias partenaires (M6, Conde Nast...). Autre différence notable : la qualité de la data. Casino propose sa data offline là où les membres de Gravity se contentent de proposer leurs cookies Web. On n'y trouve donc pas de donnée loguée en provenance d'un 6play par exemple ou de données d'abonnés de chez Conde Nast. Difficile dans ces conditions d'être aussi performants que Facebook.

Les données de GoSport et Courir disponibles au sein de relevanC

La data de relevanC pourra également être utilisée pour mesurer la performance de campagnes drive-to-store. "Nous serons capables d'identifier les effets d'une campagne online mettant en scène un produit de grande consommation sur ses ventes en magasin, à l'instant T et sur 90 jours", explique-t-il. Des tests ont déjà été menés avec une dizaine d'annonceurs pour mesurer, secteur par secteur, son influence sur les ventes et mettre en place une stratégie de pricing de la data la plus cohérente possible. Marco Tinelli précise vouloir établir une césure claire entre la data dite "certaine", qui pourra être vendue plusieurs euros du CPM, et la data qui l'est moins, de type "look alike", qui sera commercialisée à un prix bien moins élevé. La plateforme devrait être accessible aux partenaires acheteurs d'ici la fin de la semaine.

Dans un univers où c'est le reach qui fait la loi, relevanC a vocation à s'ouvrir à d'autres commerçants. "Nous avons déjà onboardé les données en provenance de GoSport et Courir. Des acteurs de secteurs complémentaires comme la mode ou le voyage devraient nous rejoindre prochainement", annonce Marco Tinelli. Et pourquoi pas des concurrents frontaux comme Auchan ou Carrefour ? Marco Tinelli admet que la réponse n'est pas tranchée. "Plus on aura de data tracée, plus l'offre sera pertinente", précise-t-il, pragmatique.

On peut toutefois douter que Carrefour accepte de mettre sa data à disposition d'une filiale de Casino. D'autant que ce dernier mène un projet similaire en parallèle, lancé il y a plusieurs mois par Georges Plassat. Avec une même ambition : ouvrir la plateforme à d'autres commerçants. L'arrivée d'Alexandre Bompard aurait mis le projet en veille.  Et les géants de la distribution ne sont pas seuls. Criteo a déjà présenté sa plateforme qui permet aux e-commerçants et aux marques de mutualiser leurs données consommateurs. Déjà, il s'agissait de faire le poids face à Amazon....