Les points clefs de la directive droit d’auteur enfin publiée au JOUE

La Directive Droit d’auteur, adoptée le 26 mars 2019 par le Parlement Européen, a enfin été publiée au Journal Officiel de l’Union Européenne (JOUE), le 17 mai 2019.

L'explosion du numérique et la présence écrasante des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) ont mis le droit d'auteur face à de nouveaux défis juridiques ces dernières années : les questions adressées à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) se sont multipliées pour savoir comment interpréter la directive de 2001, poussant la Commission européenne à entreprendre l'adaptation de sa législation à l'ère digitale.Cette nouvelle Directive a pour objectif de :

- compléter notre législation européenne sur le droit d’auteur en considération de l’évolution des technologiesnumériques ; 

- offrir une protection plus importante des auteurs et des artistes sur les plateformes numériques. 

Elle est donc une sorte de compromis opposant les plateformes aux créateurs et comprend deux articles phares : l’article 17 et l’article 15. L’obligation de contrôle des contenus imposée aux plateformes (art.17) : 

- les plateformes en ligne ont désormais l’obligation de négocier des accords avec les titulaires de droits, notamment les sociétés de gestion collective tels que la SACEM ou la SACD, à défaut de quoi elles devront retirer promptement les contenus signalés de façon motivée notamment par les ayants droits, et témoigner de leurs « meilleurs efforts » pour assurer l’indisponibilité des contenus non couverts par ces accords

- Un nouveau régime de responsabilité novateur pour les hébergeurs de contenus est instauré : leur responsabilité est engagée en dehors de tout rôle actif 

Toutes les plateformes ne sont cependant pas concernées par ces nouvelles obligations et la directive exonère : 

− les structures qui ont moins de 3 ans et qui génèrent un chiffre d’affaires annuel inférieur à 10 millions d’euros 

− les encyclopédies à but non lucratif (comme Wikipédia) ; 

− les places de marché 

− les plateformes de développement et de partage de logiciels en open source ;

− les services individuels de stockage ou encore les répertoires à caractère scientifique ou éducatif. 

La Directive affirme donc clairement sa volonté de responsabiliser les grandes plateformes, en leur laissant cependant une marge de manœuvre, puisqu’elle ne précise pas comment les plateformes devront mettre en œuvre ces obligations de manière concrète (systèmes de détection ou de blocage algorithmique par exemple). Le droit voisin des éditeurs de presse (art.15) 

- Un droit voisin est instauré pour les éditeurs de presse : il assure une meilleure protection des contenus journalistiques sur Internet.

- Une obligation de rémunération des éditeurs de presse est désormais imposée aux plateformes qui exploitent les contenus même en cas de publication de courts extraits. 

A travers cet article, ce sont les pratiques dites de « crawling » (indexation) qui sont visées, car elles ont pour conséquence d’augmenter le flux de visiteurs des plateformes au détriment du site de l’éditeur des contenus. Des zones d’ombre demeurent néanmoins : quelles seront les modalités de calcul retenues pour fixer la rémunération des éditeurs de presse ? Quelles seront les modalités de conclusion des accords ?

Désormais court un délai de transposition de deux ans pour intégrer cette directive dans notre droit national. La France a cependant déjà pris une longueur d’avance, puisque le Sénat a adopté le 24 janvier dernier une proposition de loi visant à créer un droit voisin au profit des agences et éditeurs de presse. 

 Article écrit avec Frédérique Grisel