Omer Waysman (Danone) "Les services DtoC doivent être complémentaires de nos canaux de distribution classiques"

Le directeur global e-commerce et business development de Danone revient sur les initiatives de son groupe pour renforcer la relation avec les clients.

JDN. Le groupe Danone multiplie aujourd'hui les initiatives Direct to Consumer (DTC), pourquoi ?

Omar Wayman est global ecommerce director de Danone. © S. de P. Danone

Omer Waysman. Nos sites DtoC ne sont pas uniquement des canaux de ventes. Nous les voyons comme une partie intégrante du parcours consommateur. Un laboratoire au sein duquel nous pouvons tester la diffusion de contenus spécifiques et personnalisés. Qu'il s'agisse d'afficher de nouvelles promotions ou de réaliser un nouveau dispositif marketing. Nous testons puis partageons le retour d'expérience avec nos partenaires.

Ces sites sont également un lieu de collecte de données 1st party car c'est un enjeu pour nos marques que de pouvoir créer du lien avec les clients et leur adresser des contenus conformes à leurs attentes. Enfin, c'est aussi un point d'information et, à ce titre, l'occasion de poursuivre la relation client au-delà de l'achat. C'est, par exemple, partager des recettes et des conseils d'alimentation aux parents comme nous le faisons via l'eshop de notre marque Blédina en France ou Nutricia en Australie. Ou encore en dire plus sur nos engagements sociétaux, comme nous le faisons au sein de notre site Evianchezvous. L'important, c'est de proposer du contenu à valeur ajoutée. C'est à cette condition qu'on peut espérer avoir un impact sur les ventes. Tout simplement parce qu'on aura été capable de nouer une relation poussée avec le consommateur.

Qu'est-ce qui justifie de lancer un site de livraison d'eau quand vos distributeurs le permettent déjà ?

Les services DtoC doivent apporter une offre complémentaire à nos canaux classiques. Dans le cas du site Evianchezvous, (lancé il y a plus de dix ans maintenant) une des valeurs ajoutées, c'est le recyclage. Le livreur qui vous apporte vos bouteilles peut également récupérer les vieilles. C'est vertueux.

Faire du DtoC, c'est un moyen de remédier à l'intermédiation de vos distributeurs on et offline ?

Absolument pas ! Il ne s'agit pas d'y remédier car nous sommes très contents de la relation que nous avons nouée au fil des années avec nos partenaires business. D'ailleurs, l'enjeu, c'est plutôt de renforcer la relation avec ces distributeurs pour accroître notre pénétration digitale. Il faut, pour cela, sans cesse tester de nouveaux modèles ou services.

Un exemple ?

Faire du precision marketing. Prendre la quintessence de la data de l'un de nos distributeurs et y ajouter nos insights, pour créer des segments d'audience auxquels on adressera des contenus personnalisés, publicitaires ou non, dans une logique de bon message au bon moment à la bonne personne.

Parlons data justement. Où en êtes-vous sur ce chantier ?

Le chantier, il est entrepris depuis longtemps. La volonté d'avoir de la data 1st party pour cerner les attentes des consommateurs ne date pas d'hier. Des partenaires nous aident depuis le début à optimiser et collecter de la donnée. Mais le vrai challenge, c'est celui de l'industrialisation de son utilisation. En étant, par exemple, capable de lancer une campagne de promotions personnalisées à grande échelle. C'est, à ce jour, très difficile. Pas parce que la technologie fait défaut. Des solutions existent… Mais parce que les habitudes ont la vie dure. Il faut faire évoluer les mentalités car il est indispensable de faire intervenir l'humain dans ce schéma de personnalisation.

Pourquoi ?

Parce qu'il n'y a pas de "one size fits all". Parce que vous pouvez appartenir à un segment X un jour et à un segment Y un autre. Et que l'intelligence humaine reste indispensable pour y voir clair. La data va aider chaque business owner à mieux vendre mais pas que… Elle va également lui permettre de mieux comprendre les attentes de ses utilisateurs et isoler les performances de chacun de ses produits.

Une bonne alternative à la stratégie 1st party, c'est de se tourner vers le social commerce, avec des acteurs comme Facebook, Tiktok ou autres, qui ne manquent pas de données…

"Nous avons testé le format live shopping"

Nous ne voyons pas actuellement ces plateformes comme des canaux e-commerce en Europe, contrairement à l'Asie, car ce ne sont pas des environnements utilisés par les clients pour acheter des produits frais. Ce sont, en revanche, des canaux très intéressants pour tester de nouvelles méthodes marketing. Nous avons notamment testé le format live shopping dont on parle beaucoup aujourd'hui. Nous avions participé à un live cooking organisé par Carrefour et le site 750grammes durant le confinement. C'était l'occasion de mettre en avant des recettes nutriscore A ou B pour inciter les gens à mieux manger.

Quel était l'objectif ?

Il s'agissait autant d'innover que d'apporter un peu de bien-être aux participants. Le point positif, c'est que nous avons réussi à toucher des audiences importantes sur la partie live comme sur le replay. Avec notamment plus de 1,5 million de vues sur Youtube. L'audience était plutôt hétéroclite, avec des jeunes comme des personnes âgées. Nous n'étions, en revanche, pas encore capables d'isoler un impact sur les ventes et de répondre à une question comme : le panier des personnes exposées était-il plus sain que le panier moyen, suite à cette expérience ?

Cet article est également publié dans Adtech News, supplément papier du magazine CB News réalisé par le JDN, dédié à l'adtech et au martech. Dans l'édition d'octobre, un dossier sur la CTV, une interview de Danone sur le DtoC, une réflexion sur le PIFA, un focus sur Trygr et le baromètre du programmatique