Web 2.0 : un engouement qui repose sur quel modèle ?

Les nouveaux services, communément appelés Web 2.0, déferlent aujourd’hui sur le Net. Mais pourquoi un tel engouement ? Quelle taxinomie peut-on faire de ces services ? Et enfin, quels sont leur modèle économique ?

Depuis quelques mois, l’on observe une déferlante de nouvelles prestations Internet. Cette deuxième vague de services proposés par des sociétés naissantes, qui doivent toutefois composer avec leurs aînées devenues géantes, est d'autant plus favorisée que les coûts de production et de diffusion de l'innovation sont extrêmement réduits grâce aux standards open source, aux blogs et flux de diffusion type RSS.

Lancement de concept simplifié et réussites d'audiences parfois lapidaires, il est fort à parier que les capitaux vont suivre en masse maintenant qu'Internet possède une réelle audience capable de consommer des services très élaborés, même si le souvenir de la bulle reste encore assez vif dans les esprits.

Coûts de production réduits (principalement de la matière grise et du temps), coûts de diffusion diminués (principalement du buzz), service en ligne ne nécessitant pas de livrer une marchandise ou d'acheter un contenu pour le revendre (puisque le contenu sera généralement apporté par le client lui-même), tous les facteurs étaient rassemblés pour la naissance d'un modèle gratuit connu sous le vocable  "Web 2.0 ".
Il n'est pas habituel de rencontrer des entreprises spécialisées dans la création de produits gratuits dans le monde du "brick & mortar". Internet permet pourtant à des fabricants d'ordinateur de devenir en quelques années les leaders de la distribution numérique de musique. La curiosité et l'étonnement sont donc nécessaires dans ces nouvelles offres services/média/marchand.

Un peu de classification
La taxonomie du 2.0 et une synthèse des modèles :
-    de services ou logiciels,
-    de synthèse de contenus déjà disponibles, parfois sous forme de "mashup" permettant de s'appuyer sur un service déjà existant et principalement alimenté par les internautes eux-mêmes et en l’absence totale de coercition en ligne,
-    de publication sur le Net pour tout un chacun.
Pour les modèles de services ou logiciels en ligne "Sotfware as a service" comme Netvibes, Zoho, Flickr, (voir aussi cette liste), les charges des entreprises sont principalement des ressources humaines dans l'équipe de développement du produit/service. Les concepts leur sont propres, les contenus ou services sont apportés par d'autres via des "API". Leur utilisateur gratuit n'entraîne pas de charge de structure significative supplémentaire, un utilisateur de plus est donc le bienvenu.

Pour les modèles de synthèse de contenus déjà disponibles et de publication comme Youtube, Wikipedika, Technorati, Craig's List, Del.icio.us, Digg, ou plus proches de nous Dailymotion, Zlio, Fuzz, Wikio, les coûts sont proviennent également de la masse salariale, mais aussi des ressources serveurs, de la bande passante et du stockage des données nécessaires à la réalisation du service rendu. L'utilisateur gratuit est un peu plus pesant dans ce modèle et le coût pour l'entreprise devra être rapproché du revenu que l'on pourra tirer de cet usage.

Dans les modèles "Web 1.0" c'est-à-dire ceux du début des années 2000, les services en vue étaient principalement marchands avec Amazon, Lastminute, WallMart.com, Tesco.com, Dell.com ou plus proches de nous CDiscount/Rue du Commerce ou La Redoute.com. Des services où le cœur de métier est d’acheter, de préparer, d’envoyer ou de transmettre la marchandise, d’encaisser et de supporter les clients.

Certes des "purs modèles" comme Ebay, Google, Yahoo, ou plus proche de nous Kelkoo, avaient déjà inventé la monétisation de services virtuels, mais les utilisateurs ne contribuant que très peu on ne peut pas réellement les classer "Web 2.0". Il est notable que tous ces services ont par ailleurs opté pour onétisation de leur audience auprès d'annonceurs sous une forme ou sous une autre, que ces derniers soient externes ou participants contributifs au service.

A noter tout de même qu'à l'époque le débat d'idées tournait autour de la présumée compétition entre les modèles "online" et les impavides modèles des marchands traditionnels. Finalement ce sont les éditeurs et producteurs de contenu qui globalement ont souffert plus que les distributeurs !

Quel business modèle ?
On notera tout de même qu’il n’y a pas de trace de gratuit/gratuit dans notre historique du Web commercial. Alors que vont devenir les modèles gratuits actuels des jeunes pousses "Web 2.0" ? Il est fort à parier que ces dernières trouveront leur voie et aboutissement commerciaux dans les domaines suivants :

-    Publicitaire tout d’abord. Plus simple à mettre en œuvre, il nécessite toutefois un ciblage précis de l’audience. Quelle valeur aura alors l'utilisateur d'un service gratuit en ligne et le marché pourra-t-il absorber toutes les nouvelles offres de "pages vues" ? Quand on sait par ailleurs que selon Alexa 2.000 sites dans le monde font 90 % de l'audience, c’est déjà un euphémisme de prédire que peu de places seront disponibles si cette "Pareto" aggravée en reste là.

-    "Service en marque blanche" revendu à un acteur non "Web 2.0", mais qui souhaite bénéficier des nouveaux services créés. Là on s'approche d'un modèle d'éditeur de logiciel déjà connu.

-    Gratuit/payant, avec une contribution demandée à l'utilisateur pour accéder à des fonctions avancées du service, modèle déjà adopté par des acteurs comme MyBlogLog, Linkedin, Flickr ou plus proche de nous Viaduc. Tous les services ne pourront pas aller jusque là à mon sens, car la valeur perçue pour la majorité d'entre eux sera trop faible et la concurrence trop nombreuse.

Y a-t-il une place pour de nouveaux services qui ne respecteront pas les règles sous influence 2.0 ? A moins de détenir une technologie propriétaire et très en avance comme Riya.com, je ne vois pas trop de solution alternative. Et encore ces derniers l'on fait connaître avec un moteur de recherche pastiche avant de lancer Like.com leur " SAAS " qui, je suppose, doit être proposé en marque blanche aux web 1.0.

Le gratuit comme budget de communication ? Finalement Riya n'aura pas eu besoin de campagne de bandeaux ou de mots clés, ni de location d'une péniche sous la tour Eiffel. Un service original comme un moteur de recherche de photo avec reconnaissance de visage, une pointe de bouche à oreille et le voilà référant de son domaine.

S'il faut choisir entre une campagne de communication qui va donner une syncope à un investisseur et un blog ou du produit gratuit sur un service, il y aura peu d'hésitation côté entrepreneur.

L'approche gratuite du Web 2.0 est donc une approche de la vente différente : le bénéfice client d'abord et la valeur ajoutée pour l'entreprise ensuite ou après ou jamais. Certains vont se faire piéger par cette nouvelle forme de marketing qui cache un vrai potentiel de services à très forte valeur ajoutée et parfois très ciblés.

Le modèle gratuit/payant ne détruit pas de richesse pour l'entreprise qui le porte si le service possède une valeur réelle et monétisable à un moment donné. Les services à valeur perçue faible n'ont ni plus ni moins de chances dans ce modèle que dans un modèle dit "try & buy" où l'utilisateur peut tester gratuitement pendant une période restreinte. La concurrence parfaite pouvant s'exercer sur le Net (on est toujours à un clic de souris de son concurrent), les "try" peuvent se succéder de service en service jusqu'à ce qu'un d'entre eux dégage une valeur perçue suffisante pour que l'utilisateur se transforme en client. Tout est donc dans la finesse et l'interface, mais là, rien de nouveau sous le soleil même 2.0 !