Comment l'auto-édition peut-elle devenir la norme de distribution du livre ?

Depuis une dizaine d’années, l’auto-édition séduit un nombre grandissant d’auteurs, mais également de géants mondiaux de la distribution numérique, tous désireux de s’émanciper du poids des intermédiaires du livre.

Si la prédominance de l'auto-édition n’a fait nul doute lors de ce Salon du Livre de Paris 2017, les chiffres du marché sont encore bien plus probants en ce qu’ils attestent d’une constante croissance. Un succès qui paraît même insolent au regard de la progression fortement ralentie et irrégulière du marché français du livre dans son ensemble… Pour autant, la rencontre avec les lecteurs demeure un enjeu crucial pour l’ensemble des acteurs de l’auto-édition. Pour y parvenir, il est fondamental que maisons d’édition traditionnelles et acteurs de l’auto-édition s’engagent sur la même voie, autour de convictions fortes. En effet, contrairement à une idée reçue, les éditeurs ne sauraient souffrir d’une quelconque promotion des auto-éditeurs, en ce que les deux métiers sont parfaitement différents, en dépit d’un objectif commun qu’est bien celui de relever les défis du numérique, pour permettre l’émergence des nouveaux talents du Livre. 

Faire (entièrement) confiance au numérique

Glorifié ou diabolisé, il est au moins certain de déchaîner les passions, a fortiori dans un pays doté d’une culture et d’un attachement au Livre aussi puissant. Mais que les puristes se rassurent, le livre numérique ne fera pas disparaître le livre papier, comme le MP3 n’a nullement tué le disque ! Au contraire, c’est en multipliant les formats que l’on multiplie les usages, et donc les publics... Preuve en est, la croissance du ebook, certes raisonnée (les ebooks représentent 3,5% du marché total du Livre en 2016, selon GFK) est aujourd’hui bénéfique à l’ensemble du secteur.

Mais, l’impact le plus fort que puisse avoir le digital sur le secteur réside surtout dans les progrès techniques et technologiques, avec comme figure de proue l’impression à la demande. La prouesse désormais possible d’une impression qualitative à l’exemplaire unique est naturellement promesse d’une baisse drastique des coûts pour les éditeurs, les auteurs et de fait les lecteurs ! Profitons de cette aubaine pour innover et convaincre un public toujours plus large de consommer nos livres. 

Démocratiser (enfin) l’accès à la fonction d’auteur

Ce titre d’ « auteur », trop longtemps réservé à une élite culturelle française, la seule à même de coopter ses pairs, est dans le même temps convoité par près de 20% des Français selon un sondage IFOP 2014. A l’heure où l’entrepreneuriat (et même l’auto-entrepreneuriat) est le nouveau Saint Graal de nos étudiants, où chacun peut prétendre à une formation professionnelle certifiante sur Internet, à l’heure de la libéralisation des compétences, il paraît inconcevable que quelques géants du livre aient autant de réserves à s’ouvrir aux jeunes pousses de l’auto-édition. Certains ont pourtant fait leurs preuves : nul besoin de rappeler que la saga 50 Shades of Grey était initialement…autoéditée !

Une libéralisation que les acteurs de l’auto-édition ont d’ailleurs bien comprise puisque la quasi-totalité d’entre eux prennent déjà à bras le corps la formation et la professionnalisation de ses auteurs ! En effet, non contents de les éditer, de les imprimer, et parfois même de les distribuer à moindre coût, ces derniers rivalisent de concours, d'ateliers ou de tutoriels autour d’enseignements allant de la correction orthographique, à la création graphique, en passant par l’indispensable promotion... Aussi, à l’heure où les ruptures sociales et numériques n’épargnent plus notre marché du Livre, c’est bien tout le secteur qui doit se tirer vers le haut, en inventant un système adapté aux nouvelles aspirations des auteurs comme aux exigences accrues des lecteurs, sans pour autant jamais renier sur l’impératif de qualité de nos œuvres littéraires…