Le covid a imposé la téléconsultation, l'IoT va propulser la télémédecine

Le covid a imposé la téléconsultation, l'IoT va propulser la télémédecine L'essor des téléconsultations depuis le début de la crise sanitaire mène au développement de la télémédecine, dans laquelle les objets connectés figurent au centre des parcours de soin.

L'entreprise de télémédecine française Medadom a inauguré ce 13 janvier, dans le cadre de l'Innovation Week du think tank Hub Institut, sa nouvelle cabine de téléconsultation. Pendant ce temps, Doovision santé terminait d'installer une demi-douzaine de cabines de télémédecine et Withings annonçait l'arrivée d'une nouvelle génération d'objets connectés avec le réseau LTE-M. "La crise sanitaire a mené à un bon en avant de l'IoT en santé", affirme Nathaniel Bern, cofondateur de Medadom qui a déjà déployé des bornes de téléconsultation dans près de 700 pharmacies françaises et réalise sur son application près de 1000 téléconsultations par jour. Un constat partagé par le cardiologue Jean-Pierre Binon, membre fondateur de la Maison de l'innovation de la médecine spécialisée (MIMS), créée le 10 décembre 2020 : "Le confinement a renforcé le besoin de suivi à distance et a montré l'utilité des objets connectés dans ce domaine", assure-t-il.

Par leur adoption depuis quelques années, les objets connectés transforment la relation entre le patient et le médecin. "Les appareils connectés transmettent au patient des données sur son état de santé. Ce dernier devient plus autonome, il se prend en charge avec une meilleure connaissance de ses pathologies, cela fortifie la relation avec le médecin", constate le docteur Stéphane Landais, membre de la Confédération des syndicats médicaux français et cofondateur de la toute jeune MIMS, présidée par Olivier Colin. Chez Withings, on observe, en plus de cette relation réinventée, une évolution dans les pratiques : "Les premiers devices adoptés par les particuliers concernaient le bien-être. Désormais, ils s'intéressent aux objets permettant le suivi de leur état de santé, ce qui permet d'ajuster les traitements", indique Audrey Rampazzo, directrice de la communication marketing, notant un fort intérêt des particuliers pour les tensiomètres connectés depuis le début de la crise du coronavirus.

"La télémédecine contribue à rendre le métier plus attractif"

Du côté des médecins, les objets connectés se sont révélés un atout dans la pratique. "Ils offrent des gains de temps dans le diagnostic en fiabilisant les informations", certifie Stéphane Landais. Un avis partagé par son homologue Jean-Pierre Binon : "En cardiologie, il n'y a pas encore de device labellisé mais on se rend compte de l'intérêt des objets capables de surveiller le rythme cardiaque et de remonter des troubles intermittents pour mieux effectuer le suivi de l'insuffisance cardiaque." Les cabines de téléconsultations et de télémédecine favorisent quant à elles les soins dans les déserts médicaux en donnant accès immédiatement à un professionnel. "Cela contribue à rendre le métier plus attractif", estime Roland Danino, fondateur de Doovision santé, qui a installé sa sixième cabine dans une zone industrielle.

Pour les acteurs de la télémédecine, 2021 représente une année de consolidation sur le marché. "La crise sanitaire a démocratisé l'usage de la téléconsultation, par laquelle le patient échange avec son médecin à distance. En 2021, un pas supplémentaire sera franchi avec la télémédecine, dans laquelle les objets connectés interviennent dans la mesure des constantes pour fournir un diagnostic plus fin", explique Roland Danino, chez Doovision santé, qui tient à la présence d'une infirmière pour assister les patients et transmettre au médecin à distance les examens réalisés au toucher. Car pour les acteurs de télémédecine, une cabine liée à cet usage doit rester un espace médicalisé.

La cabine de Doovision santé est entièrement désinfectée par UV après chaque consultation pour automatiser les mesures sanitaires. © DOOVISION SANTE - 2020

"Il faut désormais aller au-delà de la visioconsultation. Il y a encore un gros travail à faire pour identifier les parcours pour lesquels la télémédecine apporte une vraie valeur. Par exemple, il n'y a pas encore de code acte (qui permet d'être remboursé par la sécurité sociale, ndlr) destiné à la facturation pour les kinés et les sages-femmes qui voudraient effectuer de la télémédecine", confirme Marie-Laure Saillard, CEO MesDocteurs, opérateur de télémédecine. Medadom et Doovision Santé ont tous les deux prévus d'ajouter de nouveaux objets pour proposer des spécialités médicales dans leurs cabines, dont l'ophtalmologie et l'échographie pour le second. Ils espèrent ainsi déployer une trentaine de cabines satellite supplémentaires en 2021. Medadom compte pour sa part déployer 25 000 dispositifs d'ici 2024.

Pour encourager l'essor des technologies dans la médecine libérale et initier la labellisation de projets innovants, la création de la MIMS vise à lier tous les acteurs désireux d'innover dans le domaine de la santé, des industriels aux médecins, en passant par les assureurs et les usagers... Withings et Medaviz y sont notamment associés. "Les innovations ne se font plus au sein d'une spécialité mais naissent des échanges", souligne Stéphane Landais, soucieux de créer des interfaces de rencontres. Un forum entre parties-prenantes sera organisé en ce sens à l'automne. "Un chantier énorme est encore à venir car il faut encore faire le tri entre les objets connectés utiles et développer l'interopérabilité", confie Jean-Pierre Binon.

Audrey Rampazzo, chez Withings, estime que la France accuse un retard sur la prévention en télémédecine par rapport aux Etats-Unis, où la demande pour les services de télémédecine devrait être multipliée par sept d'ici 2025 avec un taux de croissance annuel de 38% sur cinq ans, selon le cabinet Frost & Sullivan. La MIMS inaugurera dans ses locaux parisiens en octobre 2022 un showroom sur le "cabinet médical 2030", pour que tous les professionnels de la médecine prennent en main ces solutions innovantes.