Cédric Vandervynckt (Criteo) "La mise à jour du programme anti-tracking de Safari n'aura pas d'impact sur le chiffre d'affaires de Criteo"

EVP EMEA chez Criteo, Cédric Vandervynckt revient sur les conséquences de la politique anti-cookies d'Apple pour le spécialiste du reciblage pub.

L'annonce fin juillet 2017 du lancement d'ITP, le programme anti-tracking d'Apple, avait fait beaucoup de tort à Criteo,  provoquant un effondrement de son cours de bourse. Où en êtes-vous un an et demi plus tard ?

Cédric Vandervynckt est EVP EMEA chez Criteo. © S. de P. Criteo

La première version d'ITP a considérablement nui à notre capacité de toucher certains utilisateurs sur Safari. Il nous était devenu très difficile de continuer à faire ce qui a fait notre succès : adresser des publicités personnalisées aux internautes qui ont visité le site d'un de nos clients grâce à l'identifiant Web qu'est le cookie. L'inventaire disponible se réduisant, cela a évidemment eu un impact sur nos revenus. Impact qui a été évoqué à chacune de nos communications financières. Les choses sont depuis revenues à la normale car nous avons développé une technologie qui, en conformité avec les règles édictées par Apple et le RGPD, nous permet de recibler les utilisateurs de Safari. Je ne peux malheureusement pas vous en dire plus sur les modalités. Sans dire qu'on est revenu à un niveau d'activité identique à l'époque pré-ITP, je peux tout de même vous assurer qu'on a retrouvé un niveau de reach identique.

La nouvelle mise à jour d'ITP réduit, depuis début avril, la durée de vie des cookies 1st party de 30 à 7 jours. C'est un problème pour vous ?

Non car le code source d'ITP 2.1 a été mis à disposition des développeurs. Ce qui nous a permis de voir qu'il n'y aurait pas d'impact particulier sur notre technologie et notre chiffre d'affaires.

Apple invoque une volonté de protéger les éditeurs de tout data leakage. Comprenez-vous les raisons avancées ?

Non, je trouve bien dommage qu'Apple complique à ce point la tâche des spécialistes de la publicité ciblée sur Safari alors qu'il est si simple d'en faire au sein de l'univers applicatif où nous avons un identifiant publicitaire, l'IDFA, à notre disposition. Nous avons suggéré à Apple de mettre en place un outil identique pour le Web… mais n'avons pas obtenu de réponse.

On se rend compte que l'arrivée d'ITP a surtout pour conséquence d'accroître le fossé entre ceux qui comme Facebook, Google, voire Criteo, ont les moyens de trouver des alternatives aux cookies… et les autres, aux ressources plus limités. C'est un vrai problème non ?

Je vous remercie de nous mettre sur un pied d'égalité avec Facebook et Google… Plus sérieusement, nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur des équipes R&D très fournies pour trouver des alternatives. Ce qui n'est évidemment pas le cas de tout le monde. En restreignant la marge de manœuvre des spécialistes de la pub digital, Apple pénalise surtout les petits acteurs et donc la diversité au sein d'un écosystème déjà bien concentré. L'impact est également négatif pour l'expérience utilisateur car un internaute préférera toujours recevoir une publicité ciblée donc pertinente plutôt que des communications émanant d'acteurs qui s'adonnent à ce que j'appelle le "spray and pray". A savoir diffuser massivement, à l'aveuglette, en espérant toucher autant de personnes cibles que possible.

Des rumeurs évoquent l'intention chez Google de déployer un système identique au sein de son navigateur Chrome. Ça vous inquiète ?

La situation est vraiment différente pour Google qui a un business model adossé à la publicité. L'arrivée d'un équivalent à ITP sur Chrome serait extrêmement préjudiciable pour certains de ses services comme Google Analytics ou Google Adex. Google ne s'est jamais exprimé en ce sens donc je ne considère pas cela comme une menace à court terme.

Cet article est extrait du dernier numéro d'Adtech News, le supplément mensuel du JDN et de CB News consacré à l'adtech et au martech. Au programme :  une enquête sur l'offensive anti-cookies d'Apple, un sujet sur le bid shading,  une interview du Club Med sur le sujet de l'internalisation de l'achat média, un focus sur Admo.tv, spécialiste du drive-to-Web...