L'in-app se met (doucement) au header bidding

L'in-app se met (doucement) au header bidding Des spécialistes de la monétisation in-app comme Admax et Mopub témoignent de l'avancée d'une pratique jusque-là cantonnée au Web.

Si le header bidding, qui consiste à mettre en concurrence ventes directes et programmatiques est aujourd'hui utilisé par la plupart des médias français pour monétiser leur inventaire sur le Web, c'est beaucoup moins vrai en ce qui concerne l'univers applicatif. Nombreux sont les éditeurs ayant encore recours au modèle de ventes en cascade, qui consiste à appeler les partenaires les uns après les autres, jusqu'à ce que l'un d'entre eux se décide à prendre l'impression mise en vente.

"Des SSP comme Freewheel ou Teads ne permettent pour l'instant pas une connexion server-side"

Plusieurs raisons à ce décalage. D'abord, le fait que le standard open source en matière de header bidding, prebid.js, est une technologie qui n'est pas conçue pour l'univers in-app. "La version pour le monde applicatif n'a été lancée que deux ans après prebid.js, en 2017", détaille Vincent Tessier, brand et agency lead EMEA chez Mopub, la division publicitaire de Twitter. A cela s'ajoute la difficulté, côté acheteurs, de mettre au point une solution d'in-app bidding pour se connecter aux wrappers existants. "C'est beaucoup plus simple de s'intégrer sur le Web qu'in-app", estime Adam Smart, directeur produit de la division gaming chez Appsflyer. Certains ad-networks sont d'autant moins motivés à dépasser cette contrainte technique qu'ils opèrent dans un marché bien verrouillé. C'est le cas du secteur de la vidéo où les acteurs sont peu enclins à faire le jeu de la concurrence. "Des SSP comme Freewheel ou Teads ne permettent pour l'instant pas une connexion server-side", regrette Felipe Arocha, fondateur de la solution de header bidding in-app Admax.

In-app, le header bidding concerne donc pour l'instant essentiellement le display classique. Et c'est forcément problématique pour une technologie dont la promesse est de profiter de l'émulation entre les acteurs et les formats pour booster les CPM. D'autant que le recours à la méthode ne permet même pas vraiment aux éditeurs de simplifier leur stack technologique. "Même lorsqu'ils ont déployé une connexion server-to-server aux solutions du marché, certains vendeurs demandent à l'éditeur d'intégrer leur SDK pour des raisons plus ou moins valables", note le fondateur de Hubvisor, Sylvain Travers. C'est le cas d'Amazon, Criteo, Facebook, Google Smart, Xandr pour des raisons de rendu des créations publicitaires ou d'accès la donnée. "Improve Digital et Rubicon font partie des rares à effectuer une connexion server-to-server sans SDK... mais c'est parfois déceptif", confirme un expert du header bidding. 

Les éditeurs qui espéraient profiter du header bidding pour limiter les intégrations de SDK en sont donc pour leur frais. Et il leur est d'autant plus difficile de trancher sur ce sujet qu'ils font généralement appel à une société externe pour développer leur application. "Cela rajoute un interlocuteur qui n'est, en plus, pas toujours familier des spécificités du monde publicitaire", observe Felipe Arocha. Un interlocuteur qui facture en plus au temps passé. "C'est bloquant pour l'éditeur car intégrer un nouveau SDK rajoute un coût non négligeable qu'il faut justifier par un ROI rapide", confirme Felipe Arocha.

"Admax vient de convaincre Amaury Media et Next Media"

Difficile pour un acteur comme Admax de faire son trou dans ces conditions. L'adtech espère que son tout nouveau SDK l'y aidera. Elle se propose, en effet, d'y intégrer directement les SDK des partenaires qui demandent que le leur soit installé, header bidding ou non. "Nous sommes compatibles avec Criteo et Smart et travaillons à l'être pour Facebook", précise Felipe Arocha. La solution, qui travaille avec 20 Minutes et Ouest France depuis le début de l'année, vient de convaincre Amaury Media et Next Media. "Le coronavirus a mis un frein aux discussions que nous avions amorcées début 2020 mais c'est de nouveau un sujet", assure Felipe Arocha. L'argumentaire est le même que celui qui a été présenté aux acteurs du Web il y a quelques années : un gain en efficacité opérationnelle, un meilleur yield des revenus et une latence moindre. "Le header bidding permet aux éditeurs d'application de proposer une meilleure expérience utilisateur et, par ricochet, d'augmenter leur revenu par utilisateur", abonde Vincent Tessier. Le dirigeant de Mopub observe, lui aussi, une vraie traction du côté des éditeurs d'applications.  "Ça s'est vraiment accéléré quand Facebook, un gros acteur de ce marché, a accepté de s'intégrer aux solutions existantes."

"Mopub mène la charge mais il va falloir que de nouveaux acteurs s'y mettent pour que le taux d'adoption évolue plus vite"

Le nombre d'éditeurs qui utilisent Advanced Bidding, la solution de Mopub, a été multiplié par 8 entre le deuxième trimestre 2019 et le deuxième trimestre 2020. Le gaming, un des secteurs les plus matures en matière de monétisation publicitaire, est parmi les plus actifs sur le sujet. "Nous avons multiplié le volume de transactions passées par notre solution par 152 en l'espace d'un an", se félicite Vincent Tessier. Le dirigeant de Mopub n'en dira pas plus. Si l'absence de valeur absolue ne permet pas de prendre la réelle mesure du phénomène, la division publicitaire de Twitter est, semble-t-il, le leader du marché. "Mopub mène la charge sur ce sujet, confirme Adam Smart. Mais il va falloir que de nouveaux acteurs s'y mettent pour que le taux d'adoption évolue plus vite." Vincent Tessier en a bien conscience. "Ventes en cascade et header bidding vont coexister encore quelques temps sur le marché de l'applicatif."