Tesla est à un nouveau carrefour
Les mois à venir s'annoncent difficiles pour Elon Musk, le serial-entrepreneur à l'origine de Tesla et Space X. Trois défis majeurs s'imposeront à lui.
Tesla vit un moment crucial de son histoire. L'entreprise de voitures électriques dirigée par Elon Musk renaît après une fin 2014 et un début 2015 difficiles. Les livraisons mondiales de véhicules ont dépassé les prévisions au deuxième trimestre (11 507, environ 500 véhicules de plus que prévu) et l'entreprise est en bonne voie pour sortir de ses chaînes de montage son SUV Model X mois (le modèle subissait en juillet les derniers essais). Début 2016, nous devrions voir les premières ébauches de la Model 3 grand public qui devrait coûter aux alentours de 35 000 dollars. Et côté bourse, même le très pessimiste analyste John Lovallo de Bank of America a relevé l'objectif de cours de 65 à 180 dollars, soit une hausse de 177%.
Dans ces conditions, que pourrait-il arriver ? Eh bien, pratiquement tout. Tesla doit agir sur trois niveaux à la fois jusqu'à fin 2015.
Premièrement, il faut que la future Model X arrive dans les temps. Un retard de lancement n'aurait pas forcément un impact significatif sur les livraisons totales de 2015 (estimées à 55 000) mais confirmerait la mauvaise habitude de Tesla de repousser la sortie de ses véhicules et de faire attendre ses clients. Si l'on se place dans l'optique d'un constructeur automobile ce n'est pas vraiment surprenant car la production de nouveaux véhicules complexes peut facilement prendre du retard. Les investisseurs harcèleront Tesla si la Model X n'apparaît pas sur les routes au moment prévu.
Tesla doit perdre sa fâcheuse habitude de retarder le lancement de ses véhicules et de faire attendre ses clients
Deuxièmement, il faut accélérer le rythme des livraisons de la berline Model S. Ce modèle constituera l'essentiel des ventes de 2015 pour la marque. Sur les deux premiers trimestres, l'entreprise n'a pas livré la moitié des 55 000 véhicules commandés pour l'année. Ce qui signifie que Tesla devra mettre les bouchées doubles au second semestre pour boucler les livraisons promises, gérer le lancement de la Model X et préparer la présentation de la Model 3 pour le premier trimestre 2016. En 2014, Tesla avait réussi à construire toutes les voitures prévues mais quelques milliers ont été livrées avec du retard. Finalement, tout n'a été finalisé qu'en janvier 2015. A la fin de l'année, la chaîne de montage a tourné de manière si intensive que Tesla a dû suspendre l'activité et donner à ses employés une semaine de congé forcé en janvier 2015.
Troisièmement, le PDG Elon Musk ne doit pas délaisser Tesla pour gérer le départ à la retraite de son directeur financier Deepak Ahuja et régler le problème de taille que rencontre son autre entreprise, Space X : l'échec du lancement récent d'une mission d'approvisionnement de la Station spatiale internationale.
Chacun de ces trois éléments pris séparément constitue un défi énorme pour une entreprise et ses dirigeants. Musk est un entrepreneur à succès mais il sera mis à rude épreuve dans les prochains mois.
La dernière fois que Tesla s'est trouvé à un tournant de son histoire, c'était juste avant l'annonce des résultats du premier trimestre de 2015. A ce moment, j'avais écrit : "Je pense réellement que, avec le recul, nous regarderons cette période de l'histoire de Tesla comme une transition importante. L'action pourrait se maintenir à 200 dollars pendant un temps ou dégringoler. L'entreprise pourrait suivre le modèle des plus grands constructeurs automobiles et indiquer ses ventes par mois. Le chemin s'annonce ardu. En 2015, toute personne qui détient une part de Tesla, qu'elle soit financière ou autre, comprendra que passer d'une production de 35 000 voitures par an à 500 000 nécessite un capital important."
Mission accomplie. L'action a dépassé 200 dollars. L'entreprise indique désormais les livraisons par trimestre et a contracté un emprunt de 750 millions de dollars pour financer sa croissance et son développement.
Mais, pour cette entreprise, aucun repos n'est permis.
Dans le même temps, la plupart des fabricants automobiles mondiaux prospèrent. Ils vendent plus de voitures qu'ils ne l'ont fait pendant 10 ans et génèrent des bénéfices sur les ventes d'utilitaires et de SUV.
Malgré tout, pour ce défi de mi-2015, Tesla est en meilleure position qu'elle ne l'était en février. La balle est dans son camp. Désormais, tout dépend de la mise en œuvre d'actions concrètes.
Article de Matthew Debord. Traduction par Manon Franconville, JDN.
Voir l'article original : Tesla is at another crossroads