Qu'attendent les locataires, oubliés de la campagne présidentielle ?

Préemptée par les "affaires", la campagne présidentielle semble avoir oublié l’essentiel : parler aux Français. Le logement figure parmi leurs préoccupations principales, et c’est leur source de dépense numéro un : comment ne pas en faire une priorité ?

Etre locataire en France : un point sur la situation

Selon l’enquête menée par Harris Interactive pour Guy Hoquet l’Immobilier, la France est coupée en deux : celle de la province, qui est touchée par les difficultés d’accès au logement de façon assez marquée, et celle de la région parisienne, très fortement concernée par cette problématique. En effet, 7 Français sur 10 en France (et 9 /10 en région parisienne) estiment qu’il est difficile de trouver aujourd’hui un logement en France, tandis que 64% ont mis plus d’un mois à le trouver.

Pour pallier cette difficulté et gagner du temps dans leurs démarches, 1/3 des Français s’adressent à une agence immobilière.

Au premier rang des obstacles qui les empêchent de concrétiser leur projet, tout d’abord le montant des loyers, qu’ils estiment trop élevés pour 49% d’entre-deux. Ils mettent également en avant le fait que les biens disponibles sur le marché ne correspondent pas à leurs besoins. Pour 33% des sondés, ce serait le type de contrat professionnel qui constituerait un obstacle, tandis que 8% font état de difficultés à l’accès à cause de leurs origines sociales ou ethniques.

Malgré ce tableau noir, un chiffre interpelle : 8O% des locataires se disent satisfaits des relations avec leurs propriétaires, ou avec l’organisme qui gère leur logement (qui peut être une agence immobilière, ou un syndic). Si mécontentement il y a, cela tient à un déficit de travaux de la part des propriétaires, notamment dans le cadre de l’isolation des fenêtres, mais aussi sur l’enclenchement des réparations dans le logement en général.

Enfin, vis-à-vis des politiques, leur message est clair : observant que le sujet du logement est le grand absent de la campagne présidentielle, ils attendent avant tout un durcissement des normes pour les propriétaires dans le cadre de l’état des biens mis en location (67%) et une baisse de la fiscalité locative (62%).

Propositions pour améliorer les conditions d’accès à la location

Sur les prix des logements qui sont trop élevés, une réponse est à apporter : sur un marché régulé par la loi de l’offre et de la demande, il faut construire davantage, et donner aux communes le pouvoir de décider, en fonction de leurs besoins, de l’utilisation de leur foncier. Permettre aussi aux promoteurs d’acquérir du foncier à des prix plus intéressants, dans la mesure où ils reportent ce bénéfice sur les acheteurs.

Sur les difficultés d’accéder au logement, il faut faire évoluer cette matrice qui veut que le locataire doive justifier d’un CDI pour se loger : aujourd’hui, on embauche 7 fois sur 10 en CDD, il y a un décalage profond entre le marché de l’emploi et celui du logement. A quand un grand ministère du Logement, comme le fut en son temps celui de Jean-Louis Borloo, entre 2005 et 2007, qui réconcilie ce couple impossible ? Le gouvernement actuel a lancé, en 2015, le dispositif VISALE, qui lui donne la possibilité de se porter garant d’un locataire en contrat intérimaire, ou déterminé, dans le secteur privé, durant les trois premières années du bail locatif. C’est une mesure peu connue des locataires mais qu’il faut utiliser ! Il faut faire évoluer les mentalités, et notamment des propriétaires, qui prévoient de se garantir fortement face à un locataire qu’on sait difficile à expulser, s’il ne paie pas. Aujourd’hui, les propriétaires ne sont pas du tout incités à mettre leur bien en location (et donc à contribuer à la baisse des prix), tout d’abord parce qu’ils sont matraqués fiscalement, mais également parce qu’ils ont peur des impayés de loyer et qu’ils sont contraints, via la législation, à ne pas pouvoir libérer leur bien. Pourquoi, au contraire, arrêter d’opposer locataires et bailleurs en rendant plus souple l’entrée, et la sortie dans un logement ? Le même précepte s’applique à l’encadrementdes loyers, qui encore une fois, oppose les deux parties, et surtout, n’a pas fait de preuve de son efficacité réelle à Paris, parce que limité aux baux à la relocation et réellement efficace sur les petites surfaces. Pourquoi ne pas créer, comme le demande notre syndicat, un statut du bailleur privé qui récompense les propriétaires qui consentent des loyers raisonnés par des avantages fiscaux ? Il faut créer du partenariat entre les acteurs du logement, pas du conflit !

Aujourd’hui, les professionnels du logement se retrouvent dans toutes les mesures des candidats susceptibles de fluidifier le marché, que cela soit dans le domaine de la stabilité fiscale, qu’il faut instaurer, que dans la libération de foncier avec une exonération de la taxation de la plus-value ramenée à 10 ou 15 ans, au lieu de 30 aujourd’hui. Quant à la baisse de la fiscalité pour les locataires, c’est une bonne mesure également, tant qu’on arrive à la prendre en charge.

Fluidifier, c’est aussi décentraliser davantage la politique du logement, pour l’adapter au local, et notamment en termes de gestion du foncier. De façon générale, il faut laisser le marché se réguler, via une fiscalité stable, tout en permettant à tous d’accéder à ce qui figure parmi les questions les plus importantes de la vie quotidienne : le logement.