Ce qui attend la fintech en 2019

Open banking, détection de la fraude, internationalisation... l'année 2019 sera encore pleine de défis pour les fintech.

Alors que 2018 a été une année record pour les fintech dans le monde, avec une augmentation de 6% du nombre de levées de fonds (et même 10% en Europe), pour une augmentation de 82% du montant total collecté (28% en Europe), il semble évident que l’année qui débute sera plus complexe pour l’ensemble de l’écosystème. Les signaux de marché, entre tensions politiques internationales et fléchissement des marchés boursiers, indiquent que des années difficiles pourraient débuter pour le capital-risque. Néanmoins, le secteur de la fintech offre encore de très nombreuses opportunités de croissance. Voici les sujets qui, selon nous, sont à regarder avec attention cette année.

1. Les néobanques européennes partent à la conquête du monde

C’est la grande question de 2019 : les champions pan-européens des néobanques vont-ils réussir leur expansion mondiale ? Revolut communique sur plus de 3 millions d'utilisateurs, alors que la N26 en affiche 2 millions : des chiffres qui, en dépit du buzz qui les entoure, les rangent du côté des petites banques locales traditionnelles. À titre d’exemple, si elles étaient des banques françaises, elles seraient classées entre le Crédit du Nord et le Crédit Mutuel Arkéa en nombre de clients. Pour autant, leur rythme de croissance est impressionnant. Ces deux pure-players parviennent à s’implanter dans de nombreux pays à la fois, très rapidement. Profitant de leur succès en Europe, N26 et Revolut ont d’ailleurs tous deux annoncé leurs ambitions nord-américaines. N26, fort d’une nouvelle levée de fonds de 300 millions de dollars en janvier, devrait y arriver mi-2019. Revolut a également commencé à regarder du côté de l’Asie : en novembre dernier, le Britannique a annoncé l’acquisition d’une licence à Singapour et au Japon. N26, pour sa part, est soutenu par Tencent (le propriétaire de WeChat) depuis mai 2018 : avec ce nouvel allié, il cherchera certainement à développer ses liens avec l'Asie. Dans ce duel serré, des acteurs locaux ne ménagent pas leurs efforts pour devenir des leaders sur leurs marchés respectifs, comme BNeXT en Espagne ou LunarWay dans les pays scandinaves.

L’expansion internationale est également à l’ordre du jour pour les néobanques ciblant les professionnels, même si la consolidation n’a pas encore débuté dans ce domaine. Qonto, la néobanque française des entrepreneurs et des PME, prépare ainsi son expansion européenne, qui la conduira à affronter des acteurs locaux tels que Penta en Allemagne, Tide au Royaume-Uni, mais également les banques BtoC qui entrent dans la bataille BtoB, à la recherche de meilleures marges et de meilleurs taux de rétention… Rien d'étonnant à ce que Revolut ait lancé son offre "Revolut for Business" il y a 2 ans.

2. La DSP2 se concrétise enfin

 L'open banking est une thématique phare depuis déjà plusieurs années, mais avec l’entrée en vigueur de la directive DSP2, l’année 2019 devrait être marquée par un foisonnement encore plus important de start-up fournissant des services et outils répondant à des logiques d’API, pour faciliter l’ouverture et l’"unbundling" des services financiers. Par exemple, Particeep et Linxo (en France), Truelayer et Starling Bank (au Royaume-Uni) ou Nordic API Gateway et Neonomics (dans les pays scandinaves) développent déjà de nouvelles expériences bancaires autour de leurs places de marché d’API. 2019 sera une année décisive pour ces entreprises : nous assisterons probablement à une première vague de consolidation. En outre, grâce à ces plateformes, de nouveaux business models devraient émerger, afin d’offrir davantage de valeurs aux institutions financières, mais surtout aux clients. Les premiers signes de rapprochement entre retailrech et fintech commencent à apparaître : des start-up telles que Mishipay, Flux, Joko ou Paylead s'appuient sur les fournisseurs d'API pour offrir de nouveaux services aux clients, dans le cadre de leurs achats, en se connectant directement à leurs comptes bancaires. La collecte et l’enrichissement des données des utilisateurs sont aussi mis à profit pour développer de nouveaux types de programmes de fidélité et améliorer la connaissance client des commerçants, centres commerciaux et émetteurs de cartes.

3. L’identification et la détection de fraude

Il suffit de s’intéresser à l’actualité pour constater que la fraude reste l’une des préoccupations majeures des acteurs des services financiers… En Grande-Bretagne, The Telegraph a notamment lancé pendant l’été 2018 une campagne "Make Banks Act on Fraud" pour mettre la pression sur les banques à ce sujet… La fraude online est stimulée tant par l’explosion du e-commerce que par l’imagination sans fin des criminels. Elle était estimée à 744 millions d’euros pour la France en 2017 par l’l’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement : des coûts supportés principalement par les banques et les e-commerçants.

Cette tendance va indéniablement se poursuivre en 2019. Mais il y a une bonne nouvelle : grâce aux progrès considérables apportés par les dernières innovations en matière d'intelligence artificielle et de biométrie, les banques et les distributeurs vont avoir de nouvelles armes. Dans l’e-commerce, les changements réglementaires autour du 3D Secure vont inciter les prestataires de solutions de paiement à renforcer leurs dispositifs anti-fraude. La période est donc plus que propice pour tous les entrepreneurs qui repensent les façons de lutter contre la fraude.

 4. Vers une (r)évolution proptech ? 

Un marché important attend toujours d'être bousculé : l'immobilier. 2019 sera-t-il l'année de la révolution proptech ? Même si celle-ci n’en est encore qu’à ses balbutiements, l’intérêt croissant des entrepreneurs pour le sujet augure de changements majeurs à venir avec : 

-    Des solutions plus fluides pour accéder au crédit, notamment avec des courtiers 100% en ligne comme Pretto en France ou Habito et Trussle au Royaume-Uni.

-    De nouvelles manières de vendre un bien immobilier rapidement, grâce à des "ibuyers" comme Nested au Royaume-Uni, Casavo en Italie, Prontopiso en Espagne et Homeloop en France. Avec ces nouveaux entrants, tout le monde peut vendre un bien en moins d'un mois, en échange d’un rabais conséquent. Ces plateformes pourraient bien être les agents immobiliers de demain, et ajouter à leur offre des produits financiers tels que des assurances habitation et des opportunités de financement.

-    De nouveaux modes de financement des acquisitions immobilières, avec des start-up comme Proportunity et Unmortgage au Royaume-Uni ou Virgil en France, qui permettent aux acheteurs de compléter leur apport personnel et d’augmenter leurs capacités d’emprunt.

-    La simplification de l’investissement locatif, avec des plateformes pour garantir le paiement des loyers comme Garantme, Unkle ou Cautioneo, ou des start-up qui surfent sur le développement d’Airbnb pour offrir des solutions de gestion clé-en-main aux propriétaires, telles que Rentify ou Goodlord en Grande-Bretagne.

Ces quatre sujets nous semblent particulièrement prometteurs, mais d’autres thématiques intéressantes sont aussi à suivre, telles que :

-    Les nouveaux modèles dans le crédit à la consommation, reposant sur des modèles d’abonnement, à l’image de l’offre d’Alma en France ou de Viabill au Danemark.

-    La montée en puissance de produits et services de retraite alternatifs à destination des baby-boomers. Citons notamment Grandhood au Danemark et Abaka au Royaume-Uni.

-    Les nouveaux modèles d’assurance et de gestion des risques, en particulier avec l’assurance paramétrique, qui permet un remboursement immédiat en cas de sinistre. Par exemple, Descartes Underwriting en France ou Floodflash en Grande-Bretagne sont positionnés sur ce sujet.

Clairement, 2019 sera une année encore très riche en innovations dans les domaines de la fintech et de l’insurtech, en dépit du climat macro-économique plutôt incertain.