Pumpkin, de citrouille du paiement à carrosse des néobanques ?

Pumpkin, de citrouille du paiement à carrosse des néobanques ? Six mois après son rachat par le Crédit Mutuel Arkéa, la fintech lilloise qui propose un outil de transfert d'argent entre particuliers présente sa nouvelle application et ses ambitions européennes.

Il y a embouteillage dans le paiement en 2017. Entre la multiplication des néobanques françaises et étrangères, l'arrivée d'Orange Bank, le déploiement du paiement dans Facebook Messenger et le lancement des offres mobiles des banques françaises, difficile de s'y retrouver. Cette concurrence n'effraie pas Pumpkin, start-up lilloise spécialisée dans le transfert d'argent entre particuliers. Six mois après son rachat par le Crédit Mutuel Arkéa (pour un montant non communiqué), la fintech aux 300 000 utilisateurs revient avec une application toute neuve, signée Ora Ïto, le designer français connu pour avoir détourné de grandes marques comme Louis Vuitton et Apple. Ce nouveau graphisme aux couleurs fluo est accompagné d'une nouvelle fonctionnalité : "l'ardoise". Elle permet de faire les comptes entre amis, pour un voyage par exemple, et de se rembourser mutuellement une fois toutes les dépenses effectuées.

Il est possible de choisir la couleur de l'application Pumpkin : rose, bleu ou or. © Capture JDN

Surtout, la jeune pousse fondée en 2014 a pour ambition de créer un compte courant en 2018 (carte de paiement, IBAN…) mais ne souhaite pas reproduire ce qui existe déjà. Pour Hugo Sallé de Chou, cofondateur de Pumpkin, "les néobanques ont tendance à apporter comme seule innovation une meilleure accessibilité, plus d'instantanéité et de l'ergonomie. Le produit n'est pas forcément adapté aux usages. Avec Pumpkin, nous voulons créer un compte courant communautaire car on est rarement seul dans sa vie. Quand on est jeune, on vit avec ses parents, ensuite on fait des études et on se met en colocation, après on est en couple puis on fonde une famille à nouveau…", explique-t-il, sans donner plus de détails sur les futures fonctionnalités de ce compte courant.

Ce changement de stratégie n'était pas une évidence pour les fondateurs de Pumpkin. L'année 2016 fut pleine de doutes et de questionnements. "On avait un produit qui fonctionnait, générait de la traction mais on ne savait pas du tout où aller", se souvient Hugo Sallé de Chou. "Fin 2016, nous avons donc pris la décision de repartir from scratch, c'est-à-dire qu'on a redéveloppé l'application de A à Z. Ce chantier a pris neuf mois. Le problème c'est que du coup il n'y a pas eu de nouvelles fonctionnalités pendant cette période", souligne Victor Lennel, autre cofondateur.

Nouvelle méthodologie, nouvelle équipe

Pumpkin n'a pas seulement changé l'expérience utilisateur, elle a aussi revu tous ses processus. Elle a par exemple instauré un dialogue récurrent avec ses bêta testeurs qui leur font des retours sur les nouvelles fonctionnalités. "Maintenant notre produit peut changer tous les mois. On peut rajouter une fonctionnalité tout bête. C'est comme ça que nous avons rajouté l'option multicartes et multi-IBAN dans l'application", précise Constantin Wolfrom, troisième cofondateur. La start-up envisage de lancer une nouvelle fonctionnalité par mois dès 2018.

Pumpkin a aussi structuré son équipe. Entre 2015 et 2017, elle est passée de trois salariés avec quelques stagiaires à 38 aujourd'hui. Basée à l'origine à l'incubateur lillois Euratechnologies, la start-up a déménagé dans le centre de la capitale du Nord et a ouvert un bureau à Paris où se trouvent les équipes commerciales et marketing. Elle a également mis en place une équipe de huit business developpers qui boostent les relations en région. En appui, elle a créé un statut d'ambassadeur, c'est-à-dire un utilisateur influent dans un campus étudiant. Ils sont plus de 60 à travers les 150 campus partenaires de Pumpkin et devraient être une centaine d'ici début 2018.

"Notre offre BtoB réduit quasi à zéro notre coût d'acquisition client"

La question du financement a également été source de questionnements. Pumpkin ne prélève aucune commission sur les 10 millions d'euros échangés tous les mois sur sa plateforme. La start-up tire ses revenus d'une offre BtoB, une billetterie destinée aux associations des campus étudiants. "On est prestataire et partenaires de presque toutes les associations de France. On encaisse toutes les cotisations, les participations à des événements (voyage au ski, événement sportif, gala de Noël…) et on prélève une commission sur chaque transaction. C'est notre réseau de distribution. On fait une pierre deux coups. On a créé un cercle vertueux qui nous permet de générer des utilisateurs tout en gagnant de l'argent", indique Hugo Sallé de Chou. Mais cette activité BtoB ne permet pas à Pumpkin d'être rentable. "Cela nous rapporte un petit peu mais c'est loin de pouvoir financer notre entreprise. L'avantage c'est que ça réduit quasi à zéro notre coût d'acquisition client", précise-t-il. Son rachat par le Crédit Mutuel Arkéa à hauteur de 80% de son capital a donc été une bouffée d'air. La banque investit en tout 15 millions d'euros dans la start-up pour les trois prochaines années.  

Deux à trois villes européennes

Ce financement va notamment lui permettre de se développer en Europe. Déjà présente en Belgique, en raison de la proximité avec Lille, la start-up envisage d'ouvrir deux à trois villes européennes au deuxième semestre 2018. "C'est important d'avoir une vision internationale le plus tôt possible. On a vu trop d'entreprises en France remettre ça à plus tard et finalement louper le coche car elles n'avaient plus la mentalité, qu'elles se reposaient sur ses acquis", analyse Hugo Sallé de Chou. 60% des utilisateurs de Pumpkin sont des étudiants, de plus en plus nombreux à partir en Erasmus. "Fondamentalement, se développer dans une ville européenne ne change pas grand-chose car on reste dans la zone euro et les usages se ressemblent", ajoute le cofondateur. Comme en France, Pumpkin n'a pas prévu de faire de publicité.

Pumpkin enregistre plus de 1 000 nouveaux utilisateurs par mois

La fintech enregistre plus de 1 000 nouveaux utilisateurs par jour, et la grande majorité provient du bouche-à-oreille. Chaque nouvel utilisateur de Pumpkin génère à lui seul six utilisateurs, selon la start-up. Une statistique qui lui permet de prédire que Pumpkin comptera 1 million d'utilisateurs d'ici fin 2018. "Communiquer c'est bien mais il faut d'abord construire une caisse de résonance. Si vous mettez une publicité et que personne ne vous connait, ça tombe dans l'oubli. On arrive peu à peu à cette caisse de résonance en France. Tout ce travail sera bénéfique pour se développer à l'étranger. Je pense même qu'on ira plus vite qu'ici", conclut Hugo Sallé de Chou.