Jason Gardner (Marqeta) "Morning utilise notre plateforme de carte de paiement"

La fintech américaine fondée en 2010 émet des cartes bancaires physiques et virtuelles. Elle est présente depuis un an dans plusieurs pays européens, dont la France.

JDN. Pouvez-vous nous présenter Marqeta ?

Jason Gardner, CEO de Marqeta. © Marqeta

Jason Gardner. Marqeta est une plateforme ouverte qui permet d'émettre des cartes de paiement. Elles peuvent être physiques, virtuelles pour faire des achats en ligne, ou tokenisées, c'est-à-dire qu'elles peuvent être intégrées dans Apple Pay et Android Pay (Google Pay, Samsung Pay…, ndlr). Nous sommes plus ouverts que nos concurrents car notre architecture est basée sur des API. Nous nous adressons aux banques digitales, aux entreprises de livraison à la demande, aux solutions de paiement, de prêts… Nous ne donnons pas le nombre de clients que nous avons mais communiquons sur quelques noms. Dans le crédit, nous travaillons avec Affirm et Kabbage (deux fintech US, ndlr). Dans la livraison, Doordash et Instacart. Nous comptons aussi Square dans notre portefeuille. Nous avons 250 salariés, qui sont presque tous basés en Californie. 

Etes-vous intéressés par les banques traditionnelles ?

Ce ne sont pas des cibles. Nous préférons nous concentrer sur les entreprises qui veulent construire de beaux produits from scratch, ce que les banques ne font pas car elles ont un legacy et ce n'est pas dans leur culture. De leur côté, les néobanques comme Revolut proposent de super produits bien designés et qui répondent au besoin des consommateurs. Nous avons parlé à beaucoup de grandes banques en Europe et aux Etats-Unis, mais nous ne sommes en discussions avancées avec aucune d'entre elles.

Quel est votre business model ?

Nous tirons nos revenus de l'interchange (le pourcentage n'est pas communiqué, ndlr). Nous ne communiquons pas sur notre chiffre d'affaires.

Depuis quand êtes-vous présent en Europe ?

Tout juste un an. Nous avons ouvert un bureau à Londres en janvier 2018 qui compte aujourd'hui huit personnes. Il y a également deux profils marketing basés à Berlin. Nous nous intéressons particulièrement à l'Allemagne, au Royaume-Uni et à la France car ce sont des gros marchés, mais nous ciblons tous les pays de l'Union européenne. Par exemple, nous avons signé un contrat avec Klarna (une fintech suédoise qui permet aux consommateurs de payer après réception du produit, ndlr). Nous prévoyons de recruter en Europe en 2019, mais je ne peux pas vous dire combien.

"Nous avons ouvert un bureau à Londres qui compte aujourd'hui huit personnes"

Où en êtes-vous en France ?

Nous avons signé avec la banque digitale Morning. Nous annoncerons prochainement d'autres clients. La France est un marché où la carte bancaire est très présente et beaucoup de néobanques et d'entreprises de prêts se sont développés ici. Nous avons donc beaucoup d'opportunités à saisir.

Existe-t-il des différences entre les Etats-Unis et l'Europe sur votre marché ?

Oui, il y a quelques différences. Tout d'abord, l'environnement réglementaire. En Europe, le niveau d'interchange est différent et il faut prendre en compte la DSP2 (directive sur les services de paiement, ndlr) et le RGPD. Deux réglementations qui n'existent pas aux Etats-Unis. Notre équipe data et analytics a passé 18 mois à étudier ces textes pour être sûrs d'être conformes.

Comme nous avons construit notre système de manière ouverte, nous sommes en adéquation avec la DSP2. S'il y avait une DSP3, je pense que nous serions aussi compliant. Autre différence : les Européens sont plus des utilisateurs de cartes de débit alors que les Américains détiennent davantage de cartes de crédit. Mais cela ne change pas vraiment notre business.

Pour opérer dans l'Union européenne, vous avez besoin d'un agrément. Où l'avez-vous obtenu ?

Nous exploitons l'agrément de monnaie électronique d'une autre entreprise, dont nous ne donnons pas le nom (Marqeta est donc un agent d'un établissement de paiement, ndlr). Elle a des agréments dans plusieurs pays européens. En cas de Brexit, nous aurons toujours un agrément valable. Nous ne voulions pas demander notre propre agrément car nous souhaitions nous focaliser sur la technologie et le business d'abord. Quand nous aurons grossi en Europe, nous demanderons un agrément.

Est-ce que le Brexit va affecter votre business ?

Le dénouement du Brexit est encore incertain. Pour l'instant nous ne changeons rien et continuons à opérer comme si le Royaume-Uni était toujours dans l'Union européenne. Nous avons mis en place des scénarios si le Brexit a lieu, mais nous pensons que ça n'arrivera finalement pas.

Quels sont vos objectifs 2019 ?

Nous allons évidemment nous concentrer sur notre développement en Europe et continuer à grossir aux Etats-Unis et au Canada. Nous partirons en Asie l'année prochaine.