Immobilier : la révolution numérique est en marche

Depuis dix ans une profonde transformation numérique s’est opérée dans de nombreux secteurs d’activités. L’immobilier, et notamment le monde des agences immobilières et gestionnaires, n’a cependant, lui, que très peu évolué. Mais pourquoi ce secteur a-t-il si peu changé ?

Depuis dix ans une profonde transformation numérique s’est opérée dans de nombreux secteurs d’activités : la grande distribution et les transports, mais aussi plus récemment l’éducation (edtech), les services bancaires et financiers (fintech) et l’assurance (insurtech). Ces secteurs ont vécu un véritable chamboulement, tant en termes de modèles économiques qu’en termes de nouveaux modes de consommation. Pour beaucoup, ces transformations ont généré des gains de productivité significatifs, réduisant ainsi le coût des services pour le client.

L’immobilier, et notamment le monde des agences immobilières et des gestionnaires, n’a cependant, lui, que très peu évolué. Il reste l’un des rares secteurs peu impactés par le digital, en France et à l’étranger. Pourtant, c’est un domaine qui touche de très nombreux consommateurs, en tant que premier poste de dépenses et de premier choix d’investissement des Français. Selon le Crédit Foncier, environ 70% des ménages français privilégient l’immobilier comme investissement.

L’agence immobilière aujourd’hui, un mode de fonctionnement dépassé

D’après un sondage Ifop, l’agent immobilier est l’une des professions qui inspirent le moins confiance aux Français. Les principales critiques évoquées : manque de réactivité, manque de transparence et des frais jugés excessifs. Des constats similaires ont été le point de départ de la disruption numérique dans d’autres secteurs d’activités. De surcroît, les habitudes de consommation ont évolué. En effet, de nombreux propriétaires bailleurs et locataires ont l’habitude de la réactivité d’Amazon, de la simplicité d’utilisation d’Airbnb et des tarifs transparents et compétitifs de Free. On parle aujourd’hui de blockchain et d’intelligence artificielle, alors que de nombreuses agences immobilières et de gestionnaires communiquent encore essentiellement par téléphone et courrier papier.

Mais pourquoi ce secteur a-t-il si peu évolué ? Pour beaucoup, l’explication est la structure même du secteur. Les agences immobilières et les gestionnaires immobiliers forment un marché très fragmenté, avec de nombreuses micro-structures. D’après l’Insee, il existe en France plus de 44 000 sociétés qui ont une activité d’agence immobilière ou d’administrateur de biens, avec en moyenne moins de 4 personnes par structure. Les gros réseaux nationaux fonctionnent d’ailleurs sur le modèle de la franchise et sont essentiellement composés de petites structures indépendantes. Ainsi, nombreuses sont les organisations qui n’ont pas la taille critique pour bénéficier d’effets d’échelle, permettant des gains de productivité, et qui n’ont pas les ressources pour mettre en oeuvre une transformation numérique.

Aux Etats-Unis la vague de la "proptech" est bien lancée

Proptech, venant de "property", est le nom donné outre-Atlantique à ces nouvelles start-up cherchant à innover dans le secteur de l’immobilier. En comparaison à d’autres secteurs, la transformation numérique n’y est qu’à ses débuts. Néanmoins, avec déjà plusieurs sociétés valorisées à plusieurs milliards de dollars, comme Opendoor, Redfin et Zillow, la vague semble effectivement lancée.

Sur les 12 derniers mois, d’après le site Crunchbase, 102 start-up immobilières en Amérique du Nord ont récolté près de 400 millions de dollars auprès d’investisseurs. Parmi celles-ci, de nombreuses cherchent à remplacer le rôle d’intermédiation de l’agent immobilier. Par exemple, la startup Opendoor a développé des algorithmes permettant d’automatiser l’achat de biens immobilier, permettant au vendeur de vendre son bien en ligne, de façon presque instantanée et sans passer par un agent immobilier. La start-up Mynd, quant à elle, cherche à transformer la gestion immobilière et à remplacer les administrateurs de biens, via l’automatisation des processus de gestion.

Enfin, qui dit start-up dit investisseurs, et des premières structures d’investissement spécialisées sur les start-up de l’immobilier apparaissent. Par exemple, les géants de l’immobilier Jones Lang Lasalle et Starwood Capital ont lancé, en partenariat avec Seedcamp, le fonds de capital-risque Concrete. Le fonds investit exclusivement dans les start-up de l’immobilier.

En France, tous les facteurs sont aujourd’hui réunis pour que le numérique vienne également transformer le secteur de l’immobilier : un marché fragmenté, des consommateurs dans l’attente de services modernes, fiables et réactifs, un écosystème entrepreneurial dynamique, et des investisseurs qui s’intéressent de près au secteur. La révolution de l’immobilier aura bien lieu, elle a même déjà commencé !