Il est urgent de réindustrialiser la France
Après des décennies de déclin, l'industrie française doit relever le défi de sa réindustrialisation. Entre souveraineté, innovation et durabilité, le Made in France peut redevenir un atout stratégique
Après son âge d’or des années 1950, où elle rivalisait avec l’Allemagne, l’industrie française a amorcé un déclin progressif dès les années 1970. En quatre décennies, cette désindustrialisation a détruit des milliers d’emplois, effacé des savoir-faire précieux et accru notre dépendance à l’étranger. La pandémie de Covid-19 a révélé ces fragilités : pénuries de masques, dépendance aux vaccins, et ruptures dans l’approvisionnement de composants stratégiques comme les semi-conducteurs. Ces failles ont montré combien l’industrie est essentielle à la souveraineté nationale.
Aujourd’hui, le diagnostic est préoccupant. L’industrie manufacturière représente environ 11 % du PIB français, contre 16 % en moyenne dans l’Union européenne. L’écart est encore plus flagrant en termes d’emploi : l’industrie française mobilise 3,2 millions de travailleurs, là où l’Allemagne en compte 7,5 millions. Pourtant, l’industrie joue un rôle central : elle structure l’économie, dynamise les territoires, et garantit l’indépendance technologique du pays.
Pour atteindre l'objectif d'une industrie représentant 12 % du PIB d'ici 2030, il serait nécessaire de créer entre 580 000 et 740 000 emplois industriels supplémentaires. Ce défi est immense et incontournable si la France veut renouer avec une croissance durable.
Malgré des initiatives gouvernementales, comme France Relance et France 2030, dotées de 65 milliards d’euros, visant à revitaliser le secteur industriel, les résultats restent mitigés. En 2023, la France a enregistré un solde positif avec l'ouverture de 57 nouvelles usines, résultant de 170 ouvertures et 113 fermetures. Cependant, cette tendance s'est inversée en 2024, avec plus de fermetures que d'ouvertures d'usines, signalant un ralentissement préoccupant de la réindustrialisation. Parallèlement, des entreprises majeures annoncent des plans sociaux significatifs. Par exemple, Michelin a annoncé la fermeture de ses usines à Cholet et Vannes, entraînant la suppression de 1 254 emplois.
Historiquement reconnue pour son excellence dans le luxe, la France doit aujourd’hui s’imposer comme un acteur incontournable de l’innovation industrielle. Le Made in France, symbole de qualité, doit redevenir un avantage concurrentiel pour les entreprises françaises. Cela passe par une valorisation des savoir-faire traditionnels, mais aussi par des investissements massifs dans des filières d’avenir, telles que les énergies renouvelables, les batteries, et l’industrie 4.0.
La réindustrialisation ne peut se limiter à une simple relocalisation. Elle doit s’accompagner d’une transition vers des procédés durables et compétitifs, en réponse aux défis environnementaux et climatiques. Dans ce contexte, l’industrie verte peut devenir un atout stratégique, transformant les contraintes écologiques en opportunités économiques.
Réindustrialiser la France n’est pas seulement un enjeu économique : c’est une question de souveraineté. Les entreprises doivent investir dans les technologies de pointe. Les territoires doivent valoriser leurs atouts pour attirer des projets ambitieux. Et les citoyens ont un rôle central : en soutenant le Made in France, ils renforcent les emplois locaux et les filières d’avenir.
La France peut redevenir un leader industriel européen et mondial. C’est en réinventant notre modèle autour de l’innovation, de la durabilité et des savoir-faire que nous construirons une industrie forte, résiliente et à la hauteur des défis du XXIe siècle.