Avec Coalition, l'appli StopCovid du gouvernement existe déjà

Avec Coalition, l'appli StopCovid du gouvernement existe déjà Une première version de cette appli mobile, développée par un Français, vient de sortir. Elle pourrait contribuer aux développements en cours chez les autorités françaises et européennes.

Alors que le gouvernement a annoncé travailler avec l'Inria, l'Allemagne et la Suisse sur le développement de StopCovid, une application de traçage numérique des contacts de la population avec des personnes infectées, une équipe menée par un Français a déjà sorti une appli similaire. Coalition a été publiée en anglais le 14 avril sur le Play Store (Android) et peut déjà être téléchargée en France. Des versions francophones et iOS devraient suivre rapidement la semaine prochaine. 

Derrière ce projet, on trouve Micha Benoliel, un Français basé à San Francisco, fondateur de la start-up Nodle, qui développe un réseau de connectivité pour l'IoT basé sur le Bluetooth. On lui doit aussi l'application Firechat, utilisée un temps par les festivaliers et les manifestants hongkongais pour communiquer en l'absence de réseau mobile grâce à la technologie mesh. "J'ai une équipe qui travaille depuis dix ans sur les technologies de communication en peer-to-peer, je me suis dit que nous pourrions aider en proposant une solution respectueuse de la vie privée", explique-t-il. 

Identifiants anonymes

Une fois téléchargée et lancée, Coalition tourne en permanence en arrière-plan sur le téléphone, dont le Bluetooth doit rester activé. "Nous utilisons un processus basse énergie qui consomme moins que le Wifi", assure Micha Benoliel à ceux qui s'inquiètent de voir l'application dévorer leur batterie. Sur l'appli, l'utilisateur peut déclarer s'il est infecté par le coronavirus.  Plus aucune action n'est ensuite nécessaire.  

Lorsque le téléphone d'un utilisateur sain entre en contact avec celui d'un utilisateur infecté, il reçoit quelques heures plus tard une notification lui conseillant de se faire tester. Le procédé pourrait fonctionner en temps réel, mais il est volontairement retardé pour éviter un effet de panique. L'heure et le lieu de ce contact ne sont pas communiqués. Via le Bluetooth, l'appli est également capable de détecter la distance entre les deux téléphones et la durée de ce contact, qui influencent grandement les risques d'infection. Dans une seconde version de l'appli, il est prévu de développer avec des épidémiologistes un système d'évaluation du risque d'infection, en fonction de ces paramètres de distance et de temps.  

Protocole open-source

Contrairement à d'autres approches plus centralisées, la plupart des informations demeurent sur le téléphone, explique Micha Benoliel, qui assure que cette appli à but non lucratif ne communique aucune donnée personnelle à des tiers. "Chaque utilisateur de l'application génère un nouvel identifiant anonyme toutes les heures. Lorsque qu'une personne se déclare infectée, l'historique de tous ces identifiants anonymes générés les 14 derniers jours est envoyé dans le cloud. 
Les applis des autres comparent ensuite ces identifiants avec ceux croisés par le téléphone pour prévenir l'utilisateur s'il a été en contact avec une personne infectée." 

"Nous sommes en contact avec le gouvernement pour voir s'il peut participer au développement du code"

Cette application est open source, afin que n'importe qui puisse s'en saisir pour développer sa propre version. Elle est également interopérable avec d'autres protocoles en cours de création, comme le PEPP-PT (Pan-european privacy preserving proximity tracing) en cours de développement à l'échelle européenne. Elle sera aussi compatible avec le protocole commun que préparent Apple et Google pour faciliter la communication entre leurs appareils.  "Cela n'aurait aucun sens que chaque application ne fonctionne que dans un seul pays, en particulier dans l'Union européenne", note Micha Benoliel. Les gouvernements pourront donc utiliser des briques technologiques de cette appli pour rendre les leurs compatibles avec d'autres protocoles, de sorte que tous les systèmes se parlent entre eux. "Nous sommes d'ailleurs en contact avec le gouvernement français pour voir s'il peut participer au développement du code informatique, l'utiliser ou y ajouter des fonctionnalités", précise l'entrepreneur.

Rappelons que l'efficacité de ces applications n'est pas encore démontrée. Il est par exemple difficile de savoir quelle masse critique il est nécessaire d'atteindre dans une population donnée pour dépeindre un tableau représentatif de la contagion. Singapour a déployé en mars l'application TraceTogether,  qui a inspiré de nombreux pays, ainsi que le développement de l'appli Coalition. Les autorités ont depuis reconnu qu'avec seulement 15% de la population utilisant actuellement le service, il était impossible de s'y fier et de remplacer le suivi traditionnel des contaminations. Si elles peuvent permettre d'alerter et de détecter certains cas rapidement, ces applications comportent aussi le risque de créer un faux sentiment de sécurité chez leurs utilisateurs.