Les quatre points clés pour lier éco-responsabilité et IoT

Les quatre points clés pour lier éco-responsabilité et IoT Les entreprises de l'IoT qui ont déjà commencé à appliquer l'éco-responsabilité à leur production livrent leurs conseils et leur méthode face aux difficultés.

L'éco-responsabilité consiste à mener différentes actions pour limiter l'impact environnemental des produits et des sociétés. Entre argument marketing, nouvelle ligne de business ou véritable conviction, elle est de fait mise en avant : Ikea par exemple a présenté le 29 avril dernier une collection d'articles recyclés et l'entreprise lilloise Revival se positionne comme la première chaîne industrielle de recyclage de chaussures. L'IoT ne fait pas exception. "Il y a une prise de conscience sur le marché en faveur d'électronique raisonnable mais appliquer l'éco-responsabilité dans l'IoT est compliqué", affirme Raphaël Autale, PDG de la société d'ingénierie française Tekin.

"L'impact le plus important des objets connectés est lié à la puce"

Une difficulté mentionnée par l'ensemble des acteurs interrogés. "Comment prouver que l'on est capable de tracer tous les composants, alors que l'impact le plus important des objets connectés est lié à la puce, généralement fournie de l'étranger", souligne Cyril Proye, IoT marketing director chez Linxens, fabricant dans le domaine des composants électroniques pour les marchés de la sécurité et de l'identification, pour qui l'éco-responsabilité représente un programme d'entreprise important. Alors, malgré ces difficultés, comment s'y prendre ? Les entreprises qui s'y essaient, dans l'industrie ou la smart home, livrent leurs conseils.

Le premier d'entre eux concerne la durabilité des produits. "Avant de penser à la recyclabilité, il faut garantir la durée de vie des objets connectés. Les produits de Delta Dore rendent par exemple connectés des volets roulants installés pour au moins trente ans, il faut que l'IoT en fasse de même", affirme Guillaume Etorre, directeur général en charge du pôle Smart Home de Delta Dore. Dès la conception de ses nouveaux produits, la marque évalue leur durabilité et veille aux économies d'énergie. "Nous présenterons en fin d'année des produits liés à la gestion automatisée des volets roulants avec de l'e-paper, cette encre électronique qui ne consomme rien tant que l'on ne modifie pas les valeurs", explique Guillaume Etorre. Un avis partagé par Cyril Proye, de Linxens : "Augmenter la durée de vie des produits est la meilleure solution pour limiter les déchets." Dans la maison connectée, la société française Ogga, spécialisée dans les solutions de smart building, rend tous les produits ouvrables, démontables, réparables et évolutifs avec des ports d'extension pour privilégier la réparation et éviter que des produits ne soient jetés.

Une démarche de longue haleine

L'axe fort de l'éco-responsabilité concerne le choix des matériaux pour déterminer lesquels peuvent être recyclés. "Le plastique est à cet égard le plus facile à recycler", remarque Stéphane Gagnat, président d'Ogga. Mais les objets connectés regorgent également de connecteurs, de cuivre, de fils d'or… Linxens est en discussion avec ses partenaires pour parvenir à tracer tous ces composants. "Il s'agit d'une démarche de longue haleine mais il est important de montrer l'exemple dans ce domaine", assure Cyril Proye. De son côté, l'entreprise française experte dans la diffusion de parfum Scentys qualifie systématiquement depuis sa création en 2004 les matériaux utilisés pour être certain qu'ils répondent à des contraintes de robustesse et de fiabilité. Le prochain objectif de Scentys, dont tous les produits sont éco-conçus, vise à ce que les matériaux soient aussi biosourcés. Si les produits recyclés présentent "un léger surcoût", les entreprises qui les utilisent y gagne la reconnaissance des clients, "devenus plus sensibles à la démarche", assure Guillaume Etorre.

"C'est en analysant le cycle de vie des objets connectés que l'on peut identifier là où il est nécessaire de mener des actions"

Au-delà des matériaux, définir le cycle de vie du produit – pour permettre la réutilisation ou le recyclage des composants – est essentiel dans les démarches d'éco-responsabilité. C'est tout l'enjeu du programme d'éco-responsabilité du fabricant français d'objets connectés Altyor (lire notre article Altyor crée un indice d'éco-responsabilité pour les objets connectés). "C'est en analysant le cycle de vie des objets connectés que l'on peut identifier là où il est nécessaire de mener des actions", confirme Pierre Loustric, président de Scentys. Pour gérer les retours de ses objets connectés, Delta Dore s'est associé il y a plus d'un an avec le site de produits reconditionnés BackMarket. De son côté, le fournisseur Upciti a noué des partenariats avec des entreprises de recyclage pour ses batteries et désosse le hardware pour les donner à des écoles.

En revanche, dans le secteur de la santé, le processus se révèle plus complexe. "Dans le cas de Tekin, les outils chirurgicaux connectés sont produits en petit volume d'une centaine de pièces par an, et sont souvent à usage unique. Changer de matériaux ou en réduire les quantités pour les rendre plus éco-responsables est compliqué car le médical a des boucles longues de développement, avec des produits conçus pour plus de dix ans. Nous ne sommes pas prêts dans le secteur, ni matériellement, ni culturellement", reconnaît Raphaël Autale, PDG de Tekin. Le cycle de vie est lui aussi compromis pour les produits à usage unique, jetés à la poubelle et donc non retournés au fabricant.

Autre élément à garder en tête, le cycle de vie du produit implique de prendre en compte l'impact des usines. Linxens mesure ainsi son taux de déchets, d'émission de CO2 et de carbone que les responsables d'usine visualisent régulièrement à partir de courbes dédiées. Scentys construit pour sa part une nouvelle usine à Cergy en Ile-de-France, en veillant aux critères RSE. "Les composants utilisés sont achetés et assemblés en France, un moyen de réduire l'empreinte carbone", soutient Thibault Kesteloot, manager R&D chez Scentys. "Il faut avant tout que cette démarche émane de la direction pour qu'elle soit portée dans la durée car il s'agit d'un travail continu", prévient Pierre Loustric, qui conseille également à ses confrères de se faire accompagner d'un cabinet spécialisé sur le sujet afin de dessiner un plan d'action efficace.