JO : les objets connectés au service des nageurs pour gagner une longueur d'avance

JO : les objets connectés au service des nageurs pour gagner une longueur d'avance En vue des Jeux olympiques, les athlètes de l'équipe de France de natation s'entraînent avec différents objets connectés pour améliorer leurs performances.

C'est dans le cadre du stade couvert de Paris La Défense Arena, reconverti en piscine, que les nageurs s'élanceront du 27 juillet au 4 août pour tenter de remporter une médaille aux épreuves olympiques de natation. Pour y parvenir, les nageurs comptent sur la force de leur corps. Mais pour optimiser leurs performances, ils peuvent s'appuyer sur un outil supplémentaire : l'IoT. "Cela fait un an et demi que la technologie est autorisée en compétition. Il y a donc une accélération de son adoption par les athlètes grâce à la miniaturisation, l'étanchéité et la facilité d'utilisation des capteurs", constate Robin Pla, conseiller technique national à la Fédération Française de Natation.

La moitié de l'équipe de France porte une bague connectée

L'objectif premier de l'utilisation des objets connectés en natation est d'aboutir à une personnalisation de l'entraînement pour trouver la meilleure façon d'améliorer les performances des nageurs. "Beaucoup de choses se passent sous l'eau. Pour donner des conseils de progression, l'entraîneur a besoin d'être au courant de ce qui s'y passe et jusqu'à présent, on avançait à tâtons", indique Robin Pla. L'apport de mesures fiables et précises, obtenues quasiment en temps réel, permet d'adapter les exercices immédiatement.

L'équipe de France de natation a ainsi adopté différents appareils. Le premier d'entre eux est une bague connectée (de la marque Oura, ndlr) mesurant le sommeil, l'activité, le stress ou encore la santé cardiovasculaire. "La moitié de l'équipe de France en porte une afin de contrôler leur forme et leur capacité à bien récupérer après un effort. Florent Manaudou en fait partie. Mais s'il se doutait qu'il ne dormait pas assez, avoir les données sous les yeux renforce la prise de conscience et pousse à agir", précise Robin Pla. Des capteurs de fréquence cardiaque, utilisés le matin pour surveiller le niveau de fatigue, et à l'entraînement fixés sur les lunettes de natation, leur permettent d'adapter leurs exercices. De même, des centrales inertielles et des systèmes de nage calculent les mouvements du bassin et leur propulsion.

Analyser les départs

La fédération française de natation mène en parallèle, avec l'Insep et le projet ANR NePTUNE, une expérimentation basée sur des objets connectés et de l'analyse par computer vision. Depuis 2021, plus de 300 départs et des tests spécifiques sur plus de 20 nageurs ont été mis en place. Des accéléromètres, des capteurs de force et une vingtaine de caméras connectées sont utilisés afin de créer des modèles de leurs performances pour aiguiller leur entraînement et les aider à optimiser leurs gestes. "Tracker à la main le départ d'un nageur à partir d'images vidéo pour le conseiller prend plus de deux heures, une durée réduite à cinq minutes grâce à la computer vision, ce qui permet de faire des retours directement sur le bord du bassin", affirme Rémi Carmigniani, mécanicien des fluides et chercheur à l'École des Ponts ParisTech, soucieux d'apporter des données scientifiques aux sportifs. Ce dernier a notamment suivi les entraînements du champion du monde Maxime Grousset. "Cette expérimentation pose une base pour la comparaison, se réjouit Robin Pla. Nous pouvons déterminer par exemple à quelle profondeur il doit aller pour obtenir sa performance optimale."

L'IoT n'en est qu'à ses débuts dans le secteur de la natation et plusieurs challenges restent encore à être relevés. A commencer par l'ergonomie. "Rémi Carmigniani est le seul à maîtriser cet outil", confie Robin Pla. Un des objectifs post-JO pour l'équipe de Rémi Carmigniani est de développer un software user friendly pour favoriser la prise en main de la solution et pouvoir l'étendre à tous les bassins. Le chercheur à l'Ecole des Ponts ParisTech travaille par ailleurs sur l'impact des interactions entre nageurs pour les courses en eau libre et l'impact des lignes d'eau pour les courses en bassin.

"Il n'y a qu'une douzaine de compétitions par an, ce qui fait peu pour avoir des modèles robustes"

Le coût est aussi un point d'attention. "Les objets connectés sont devenus accessibles, mais pour nos usages en natation, nous avons beaucoup de prototypes d'écoles dont le coût d'industrialisation est incertain ou des objets avec des licences sur le cloud qui ne nous conviennent pas toujours", observe Robin Pla. Et si l'intelligence artificielle représente une belle opportunité d'aller plus loin dans l'analyse des performances, la constitution d'une base de données demeure un écueil. "Il n'y a qu'une douzaine de compétitions par an, ce qui fait peu pour avoir des modèles robustes", reconnaît Robin Pla, qui compte sur un projet de thèse à venir à propos de la création de modèles de machine learning portant sur les changements des temps de sommeil.

Les perspectives de développement restent tout de même prometteuses. "Nous avons commencé à utiliser des GPS pour la natation en eau libre. Si nous développons l'usage des capteurs pour fournir des données aussi détaillées que ce que peut montrer le Tour de France, cela rendrait les épreuves plus attrayantes pour les spectateurs", assure Robin Pla, qui souhaiterait également voir apparaître un appareil, similaire au capteur de glucose, pour les prélèvements sanguins au doigts lors de l'entraînement. Et Robin Pla de conclure : "Je lance un appel aux start-up, car nous avons peu l'habitude de travailler avec elles et il y a tout à construire ensemble."