Recruter un commercial : un faux challenge ?

Que ce soit pour sourcer ou évaluer des candidats, tout semble devenir plus complexe. Pourtant, il y a du vivier ! Voici quelques conseils pour vous aider à recruter un bon commercial en 4 étapes.

Le recrutement d’un commercial est souvent abordé avec appréhension. Sourcing, évaluation des compétences, sélection, tout semble plus compliqué. Est-ce réellement le cas ? Une démarche suffisamment structurée est sans doute la clé comme pour tout recrutement.

Les difficultés de recrutement de commerciaux

Dans l’absolu, recruter un nouveau commercial est une bonne nouvelle : c’est le signe que l’entreprise veut ou fait de la croissance. Cependant, la concrétisation de ce recrutement pose souvent problème. En effet, c’est tout au long de la démarche de recrutement, et même au-delà, qu’employeurs et recruteurs rencontrent des difficultés :

  • difficulté à trouver des candidats, à générer des candidatures ;
  • difficulté à se positionner (voire à rivaliser) en termes de rémunération ;
  • difficulté à évaluer et à sélectionner efficacement les candidats.
  • difficulté à rendre un commercial rapidement performant ;
  • difficulté à fidéliser un bon commercial.

Tout semble montrer qu’il y a un microcosme en matière de recrutement de commerciaux. Il y aurait donc une différence, des caractéristiques propres au marché de l’emploi ou au profil des commerciaux qui rendraient leur recrutement plus complexe. Est-ce vraiment le cas ?

Une autre explication serait dans le rapport à l’enjeu vis-à-vis d’un poste connecté directement aux ventes de l’entreprise. Autrement dit : est-il possible que l’on perçoive plus de difficulté (voire que l’on mette plus de complexité) dans le recrutement d’un poste sur lequel on estime avoir encore moins le droit de se tromper ? Une sorte de mythe qu’on se construirait.

Cela prête à réflexion, car le recrutement de profils commerciaux n’est probablement pas plus spécifique qu’un autre recrutement, et voici pourquoi.

Le commercial, un profil comme un autre

Concrètement, le marché de l’emploi des commerciaux n’a pas plus le caractère de « niche de recrutement » que celui d’autres profils. D’une part, et contrairement à certains emplois de l’IT ou relevant de savoir-faire très technique, il s’avère que le vivier de commerciaux n’est pas particulièrement réduit, ni structurellement faible. D’autant plus si l’on considère ces deux phénomènes :

  1. Le turnover sur des fonctions commerciales reste élevé (même si les chiffres sont à la baisse). Par exemple, un commercial junior (moins de cinq ans d’expérience) reste moins de deux ans dans un même poste. Par conséquent, le vivier de profils commerciaux se renouvelle et s’alimente fréquemment.
  2. La veille passive des profils commerciaux. Selon les études, en moyenne, plus de 50% des commerciaux en poste ont leur CV en ligne et/ou sont « en veille ». Les commerciaux déjà en poste constitueraient ainsi le plus gros vivier de candidats, à condition de sourcer aussi en approche directe.

D’autre part, il apparait que les profils commerciaux ne sont ni plus ni moins complexes à recruter. D’abord, le délai de recrutement d’un commercial est de deux à trois mois en moyenne, soit le même délai que pour les autres fonctions « tertiaires » ou supports.

Ensuite, les commerciaux ne sont pas plus enclins au mercenariat : les attentes des commerciaux dans le travail et les causes de départ sont sensiblement les mêmes que pour toute autre population de l’entreprise.

Un commercial ne choisira donc pas toujours le plus offrant ou alors, comme tout le monde, le plus offrant au sens « avec une offre qui répond à ses attentes » : rémunération, projet et culture d’entreprise, carrière, management, équipe, etc.

Ainsi, il s’agit simplement d’établir un profil de poste réaliste reposant sur des critères pesés et priorisés, en dimensionnant ses exigences. Par exemple, ne pas demander par principe dix ans d’expérience en pensant que cela donnerait plus de garanties sur la compétence d’un commercial que sur celle d’un profil junior. Également, ne pas exiger d’un futur commercial qu’il arrive avec un portefeuille clients, là où la "logique gestionnaire" serait plutôt de structurer un processus de prospection pour générer des leads.

Étape 1 : Définir le mix RH du poste de commercial

Le "mix RH" est l’équivalent des 4P du marketing appliqués au recrutement. Définir le mix RH, c’est concevoir le poste, ses modalités, et l’accès à son vivier, en définissant les éléments suivants :

  • Product : les activités du poste, ses enjeux, son contexte, notamment la nature des ventes (BtoB ou BtoC, produits ou services, rapides ou en cycle long, simples ou complexes), les cibles commerciales et les modalités d’exercices (sédentaire vs. nomade, zones de chalandise et de déplacement éventuel, structure commerciale, outils et processus). Ici, il s’agit avant tout de connecter le poste aux objectifs d’entreprise : lancement d’une nouvelle offre, volonté de croissance voire d’accélération de la croissance, besoin de relance, recherche de rentabilité, conquête et/ou récurrence, etc. C’est ce qui détermine à la fois le profil du commercial (en schématisant : chasseur, sur des actions à taux de transformation, éleveur, sur du foisonnement et de la gestion de relation en cycle long, les deux.
  • Price : le salaire, ses composantes, les avantages, et plus généralement les moyens de rétributions. Bien sûr, il y a l’idée de connecter la rémunération aux objectifs du commercial, mais aussi à ses attentes (au sens marketing RH : avoir une rémunération en phase avec sa population), tout en l’alignant avec la politique de rémunération de l’entreprise (dans un souci de cohérence et d’équilibre).
  • Promotion : les messages, le wording, la communication auprès du vivier pour valoriser, attirer, et déclencher une postulation.
  • Place : les sources et canaux de sourcing.

Étape 2 : Sourcer efficacement des commerciaux

La recette d’un sourcing efficace est toujours la même :

  • Avoir une offre d’emploi performante, c'est-à-dire visible, ciblée et différenciante. Cela se travaille dès l’intitulé de poste, qui doit être au plus près des mots clés utilisés par les candidats dans leurs recherches (par exemple : « Commercial Lyon »). De plus, une offre se différencie par les facteurs d’attractivité mis en avant sur le poste, son environnement, la dynamique d’entreprise... ainsi que par son exhaustivité sur les modalités : localisation, déplacements (fréquence et zone), et bien sûr rémunération (fixe, variable, et avantages).
  • Utiliser plusieurs sources, en multicanal : la publication d’offre (systématiquement sur les plateformes généralistes, et éventuellement sur des sites spécialisés ou des réseaux d’écoles / d’associations professionnelles), l’approche directe (en particulier via les réseaux sociaux), et la cooptation auprès des salariés, pour toucher leur entourage et leur réseau.
  • Mettre du rythme, pour éviter le déréférencement de l’offre et l’inertie de la démarche de recrutement. Il y a principalement trois façons de procéder : relancer l’offre d’emploi (toutes les deux semaines environ), faire des tests et des ajustements rapides en fonction du volume de candidatures (sur l’intitulé de l’offre, la mobilisation d’autres sources, etc.), et enchaîner les actions, avec de la récurrence et de la réactivité dans les actions de "chasse" d’approche directe.

Étape 3 : Évaluer et sélectionner des commerciaux

Pour évaluer avec cohérence un commercial, il est nécessaire d’intégrer au processus de recrutement les référentiels commerciaux de l’entreprise. Ce qu’il faut pouvoir sonder sur le métier (au-delà du fit culturel avec l’entreprise) : les aptitudes et compétences essentielles dans l’environnement de vente de l’entreprise et dans la posture commerciale attendue. Quelques moyens de conduire cette évaluation lors d’un entretien :

  • Les questions sur le CV/le parcours commercial (timing : 20 minutes) : prendre le CV du candidat dans les mains, et creuser par des questions précises et rythmées une dizaine à une vingtaine de points du CV. Par exemple : Sur cette expérience, c’était quoi votre taux de transformation en phoning ? Ici, c’est vous seul qui faisiez les propales de A à Z ? Dans cette entreprise, c’était quoi votre rôle et votre valeur ajoutée sur la réponse à appel d’offre ? Vous en avez gagnez combien ? C’est un bon résultat selon vous ? Combien d’appels sur une session de phoning ? Combien de RDV d’accroche par semaine ?
  • Les questions ouvertes sur le métier commercial (timing : 10 minutes), pour tester la culture et les connaissances commerciales liées à l’environnement du poste. Par exemple : Imaginons que vous preniez le poste, quel est le temps que vous allez dédier à la prospection ? Avec des cibles TPE/PME, quel est le canal de prospection à privilégier selon vous ? Comment fait-on pour détecter un vrai besoin ? Quels sont les indicateurs que vous allez suivre ?
  • Les tests et mises en situation (timing : 20 minutes) : il s’agit de faire produire au candidat un rendu concret (proposition commerciale, guide de calibrage d’un besoin, etc.) à partir d’un contexte commercial donné, proche de l’environnement de vente réel du poste.
  • La posture en entretien (timing : tout au long de l’entretien) : écoute active, énergie, sourire, intelligence relationnelle, gestion des émotions… sont autant de facteurs de réussite de la relation commerciale, et autant de choses perceptibles chez le candidat en entretien.

Étape 4 : Intégrer un commercial performant

Une démarche d’onboarding d’un commercial se déroule sur plusieurs mois, avec l’enjeu d’obtenir rapidement un retour sur investissement. Quelques pratiques d’intégration peuvent l’accélérer :

  • Le ratio du 70-30. 30% du temps dédiés à des activités d’intégration, de formation et/ou de structuration sur la fonction commerciale ; 70% du temps dédiés aux activités opérationnelles et courantes de la fonction (activités de prospections ; conduite des démarches commerciales ; gestion de l’information commerciale et reporting ; etc.).
  • La fixation d’objectifs opérationnels et SMART. C’est la qualité des premiers objectifs fixés qui détermine la cohérence de la démarche d’intégration. Par exemple, sur des ventes complexes aux PME, une première vente réalisée de A à Z en autonomie peut être un objectif raisonnable sur les six premiers mois.
  • Le questionnement de la fonction commerciale, en intégrant la force de vente (et la nouvelle recrue) à la réflexion. Car leur performance dépend aussi (voire surtout) de la performance de l’organisation et de la structure commerciale.