Régler un conflit avec un collègue

Par Nicolas Jaimes

Régler un conflit avec un collègue

Vous avez de plus en plus de mal à vivre en open space avec votre voisin ? Vous n'arrivez plus à travailler avec votre partenaire de projet ? Vous pensez qu'il est difficile de s'entendre avec tout le monde et que les conflits en entreprise sont un mal incontournable ?

Détrompez-vous, les désaccords sont le moteur d'une équipe et permettent de faire avancer les projets. Les ignorer serait donc une erreur préjudiciable au bon fonctionnement de la société. Découvrez les conseils du Journal du Net pour résoudre vos différends avec vos collègues.

Eviter les malentendus

Il vous semble avoir entendu un collègue vous critiquer en réunion et cela vous a choqué ? Avant même d'entrer en conflit ouvert avec celui-ci, assurez-vous de ses intentions. Il n'est pas rare qu'une dispute soit le fruit d'un simple malentendu, une broutille qui prend une ampleur démesurée si elle n'est pas rapidement élucidée et qui peut conduire à une véritable guerre de tranchées.

"Il est important de démêler tout malentendu éventuel avant d'exprimer son ressentiment, conseille Jean-Edouard Grésy, fondateur d'Alter Nego, cabinet spécialisé dans la négociation et la gestion de conflits. Plus on tarde, plus on laisse la situation pourrir et plus l'on risque de prêter à l'autre des mauvaises intentions, peut-être à tort." En traitant rapidement les incompréhensions, on augmente les chances de régler conflits avant de franchir le point de non-retour.

Déminer les conflits larvés

En situation de crise, la réaction naturelle, et la plus facile, est de laisser les choses inchangées. Soucieux de préserver la tranquillité du bureau et désireux d'éviter un conflit ouvert, on préfère ne rien faire, quitte à laisser la situation dégénerer. C'est une erreur, la fuite n'a que pour seul effet de laisser les problèmes s'accumuler.

"Pire même, si l'on ne réagit pas, on devient responsable de la situation, prévient Jean-Edouard Grésy. Le collègue initialement fautif aura beau jeu de dire qu'il ne pouvait se rendre compte de ses maladresses puisque personne ne lui en avait parlé." C'est pourquoi il faut prendre ses responsabilités en allant à la rencontre du collaborateur incriminé. "Il est important d'agir rapidement, dès que l'on a pris conscience du problème, pour éviter l'escalade de réactions", conseille Bénédicte Haubold, fondatrice d'Artélie Conseil.

Prendre du recul pour être objectif

Lors des conflits, les sentiments de chacun peuvent être poussés à l'extrême. Quelle qu'en soit l'origine, vous devez prendre le temps d'apprivoiser votre réaction naturelle. "Tâchez de retrouver un équilibre émotionnel en prenant du recul, pour rester maître de vous", conseille Jean-Edouard Grésy. Différez l'entretien de confrontation pour être plus calme et avoir le temps d'analyser la situation objectivement. "Lorsque les sentiments prennent le dessus, on regarde les faits à travers un prisme déformant, analyse Bénédicte Haubold. On ne sait plus séparer le vrai du faux."

Si vous ne réussissez pas à garder votre objectivité, vous ne pourrez identifier les sources du conflit ni repérer ce qui pourrait être amélioré. Difficile dans ses conditions de prétendre trouver une solution.

Relativiser l'importance du conflit

On dit souvent que l'épanouissement de tout collaborateur passe par le maintien d'un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle. Cette assertion concerne aussi les conflits qui existent au sein d'une entreprise. Ceux-ci ne doivent pas atteindre des proportions exagérées et vous affecter de manière trop forte. "Il ne faut pas transformer un conflit avec un collègue en affaire de vie ou de mort, conseille Jean-Edouard Grésy. Vous avez une vie en dehors du travail, des centres d'intérêts et vous devez les préserver."

En relativisant leur importance, vous réduisez leur impact mais facilitez aussi leur résolution. On a moins de mal à faire des concessions lorsque l'on a remis les enjeux à leur juste place.

Préparer ce que l'on va dire

Vous ne supportez plus que votre collègue vienne vous consulter pour un oui ou pour un non ou qu'il attende le dernier moment pour vous donner sa part du travail ? Dites-le lui, mais préparez votre intervention. Avant d'aller à sa rencontre, énoncez les faits exacts pour vous-même, faites le point sur ce que vous lui reprochez et préparez votre discours. "N'hésitez pas non plus à en parler longuement avec un tiers pour que celui-ci vous fasse part de votre ressenti et vous conseille sur ce que vous devriez faire", affirme Bénédicte Haubold. En improvisant, vous courrez le risque de vous laisser emporter par la discussion ou d'oublier d'aborder les points les plus importants.

Par ailleurs, préférez évoquer le problème de vive voix plutôt que d'écrire un mail de récrimination. "Les écrits restent et peuvent se retourner contre vous, prévient Bénédicte Haubold. Vous pourrez regretter des tournures choisies sous le coup de l'émotion."

Ne pas se poser en accusateur

Au cours d'une confrontation, la plus grande erreur est de se présenter gonflé de reproches. L'autre se sent acculé et répond sur le même ton. Du coup, la situation se dégrade. "Lorsque l'on se pose en accusateur, on donne l'impression de remettre en question la valeur professionnelle de l'autre, résume Bénédicte Haubold. En plus, se contenter de critiquer votre interlocuteur lui donne l'impression que lui seul doit proposer des solutions." Au risque de se braquer.

Sans se montrer hypocrite, il faut aborder le problème de manière consensuelle. Vous pouvez essayer d'amener l'autre à aborder le sujet en lui posant des questions. Et s'il reste dans le déni ou n'ose pas aborder le sujet, faites part de votre sentiment et proposez des solutions pour améliorer ce qui peut l'être.

Epouser le point de vue du collaborateur

Pour résoudre un conflit avec un collègue, il ne faut pas hésiter à épouser son point de vue et comprendre sa perception de la situation. "Allez le voir pour vous mettre d'accord sur votre désaccord, conseille Jean-Edouard Grésy. Dites-lui, "si j'ai bien compris, nous avons une différence de perception sur ce point précis, toi tu penses ça alors que moi je pense plutôt ceci, n'est-ce-pas ?"" Cette technique de négociation qui consiste à exprimer le point de vue du débatteur pour aller vers le vôtre permet de créer les conditions d'un dialogue constructif et de trouver un terrain d'entente.

Lors de la confrontation, restez factuel et n'émettez aucun jugement de valeur susceptible d'énerver votre collaborateur. Demandez-lui s'il désire en parler et ce qu'il ressent. Peut-être est-il autant affecté que vous par ce conflit ?

Ne pas faire de surenchère

Il n'est pas toujours facile, dans le feu des débats, de conserver son calme. C'est pourtant indispensable si l'on veut trouver une issue au conflit. Toute stratégie de surenchère est à ce titre vouée à l'échec et dénote un manque certain de professionnalisme. Si un collègue vous agace car il vous envoie des mails écrits en majuscule, ne faites pas de même, cela ne donnerait rien sinon accroître votre inimitié réciproque.

"Lorsque l'on répond coup pour coup, il devient compliqué de faire de reproches puisque l'on fait la même chose, en pire", note Jean-Edouard Grésy. L'escalade peut être telle que l'on ne se rappelle même plus comment le conflit a commencé ou qui a fait quoi. Difficile dans ses conditions de résoudre la situation.

Faire appel à un médiateur

Parfois, la situation est telle que vous ne pouvez pas la résoudre vous-même. Il est nécessaire de faire appel dans ce cas à une tierce personne. Arbitre ou médiatrice, selon son grade hiérarchique, elle devra juger le conflit avec objectivité et pourra vous aider à y trouver une issue. Attention toutefois à avoir tout essayé au préalable. "Le recours à la hiérarchie sans avoir tenté de résoudre soi-même le problème est une erreur", constate Bénédicte Haubold. Il faut attendre l'échec des négociations avant de demander de l'aide. Sans cela votre collègue pourra vous reprocher de ne pas lui en avoir parlé.

"Lorsque vous êtes en conflit avec un manager qui abuse de sa position hiérarchique, vous ne devez pas hésiter à demander un rendez-vous à trois, avec votre n+2 par exemple", conseille Bénédicte Haubold. Cela évitera que les choses prennent un tour trop personnel.

Trouver une solution de rechange si nécessaire

"Lorsque le conflit n'évolue pas, vient un moment où vous devez réfléchir à un moyen de satisfaire vos intérêts sans l'autre", analyse Jean-Edouard Grésy. Vous aurez beau avoir les meilleures intentions du monde, si vous avez affaire à une tête de mule et une fois le point de non-retour atteint, il vous faudra tirer un trait sur toute tentative de réconciliation. Cela peut signifier aller voir ailleurs ou le contraindre à collaborer avec vous malgré tout.

"Quoiqu'il en soit, il faut parfois accepter qu'aucune relation n'est éternelle et que, dès qu'elle devient toxique, il vaut mieux s'en désengager", résume Jean-Edouard Grésy. Il en va de votre épanouissement personnel et professionnel.