Oui, le digital peut mener au burn out

Le burn out peut être lié à un mauvais management, à une mauvaise entente avec ses collègues ou à une charge de travail trop élevée. Mais la digitalisation du monde du travail est un terreau propice pour l'épuisement professionnel.

La digitalisation de notre monde accélère de manière exponentielle le volume d’information et la rapidité de transmission. Se sentant dépassé, cherchant à passer en force, à répondre aux exigences de performance, l’être humain contraint son corps jusqu’à l’extrême limite, à la rupture cognitive, émotionnelle et physiologique. Ce que le burn out met en exergue, c’est la perte de sens. Une perte qui impacte à la fois la motivation et l’équilibre global de l’individu.

Les êtres humains ont besoin de sens pour agir

Ce qui nous caractérise c’est de créer des cultures, c’est-à-dire des espaces non-visibles composés de valeurs, normes, coutumes mais aussi d’une identité commune, d’un sens partagé. Nous avons besoin pour nous impliquer de savoir "pourquoi" et "pour quoi" nous agissons. Or, plus les entreprises vont vite et plus elles oublient de répondre à ce besoin. La communication financière des entreprises cotées, au rythme d’une fois par trimestre, a accentué la recherche de résultats immédiats. La rentabilité est passée d’un moyen à une fin. Les PDG sont devenus les pilotes de ces indicateurs. Ils ont perdu leur rôle de capitaine au long cours et ne proposent plus une vision long-terme qu’ils incarnaient jusque-là.

L’engouement pour les entreprises libérées répond à ce besoin de trouver une vision, une raison d’être, un objet commun qui fait sens et mobilise chacun. Mieux, le contexte global des entreprises est devenu si complexe que plus personne, CEO compris, ne peut embrasser la totalité des informations dont il a besoin pour réussir le pilotage de son organisation.  Il faut dorénavant répondre à la complexité du monde par la coopération et la mise en synergie des ressources humaines pour réussir la transition et relever les défis de la mondialisation.

Tout ce qui est vivant est en interaction : le tissage comme réponse

Par ailleurs, tout ce qui est vivant est en interdépendance et en interaction. Nous sommes le fruit de coopérations incessantes. Internet s’est développé en mimant le fonctionnement des neurones du cerveau et désormais, des milliards de connexions ont lieu, toutes les secondes, agencées, pour la plupart, par des algorithmes qui modifient les relations initiales et spontanées. Ces connexions spontanées accélérant, comme nous l’avons vu, les flux, ne permettent plus l’intégration des informations. Cela ressemble à du bruit qui défile, s’accumule, et fait disparaître les liens précédents.

Ce manque de possibilités d’intégration des données prive la construction de la connaissance qui est le fruit de l’intelligence, à savoir, la capacité de relier les choses entre elles. Plus les informations sont consultables à l’extérieur de notre cerveau et moins nous disposons à l’intérieur des éléments suffisants pour réaliser des liens de pertinence et de créativité. Nous diminuons nos ressources cognitives pour anticiper demain. La spirale est alors négative. Moins de capacités cognitives entraîne plus d’efforts et accroît les risques de burn-out, accentue la dévalorisation progressive de l’image de soi des individus.

Nous sommes des êtres sociaux qui avons besoin de lien humain, d’interactions en face à face. Nous avons besoin de conversations longues pour nous comprendre et permettre de faire converger nos représentations du réel pour aboutir à une raison d’être partagée, à une gouvernance accordée, à des ententes durables et des accords reposant sur du sens et du lien. C’est grâce à ces tissages de qualité que nous pouvons déployer créativité, innovation et originalité.

En respectant les principes de bases de la vie, nous pouvons retisser du lien, recréer du sens et permettre aux organisations comme à leur personnel et leurs managers de combiner l’exigence de performance avec le temps de l’être humain.