Facturation électronique : quel calendrier pour être prêt à temps ?
La réception de factures électroniques sera obligatoire à compter du 1er septembre 2026, et leur émission à la même date pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises, et au 1er septembre 2027 pour les petites et moyennes entreprises (PME). Si cela peut sembler lointain, c'est pourtant maintenant qu'il faut lancer le sujet. Cela ne signifie pas pour autant se jeter dès maintenant sur la première plateforme de dématérialisation partenaire de l'administration (PDP) venue.
Vincent Giraud, associé expert-comptable référent sur la facturation électronique dans le cabinet de conseil PKF Arsilon, explique qu'il n'y a pas un planning unique pour toutes les entreprises : un grand nombre de flux de paiement et d'encaissement ou avec beaucoup d'outils métiers entraîne une plus grande complexité interne, et exige donc plus de temps pour se mettre en conformité. Pour lui, les entreprises ont intérêt à être intégralement prêtes au 1er septembre 2026, même celles concernées par l'obligation d'émission en 2027, pour avoir "une vision de l'entreprise dans son ensemble".
Dès maintenant : faire un diagnostic
Première étape : lancer un diagnostic de ses processus pour "faire le constat de l'existant, et se demander comment atteindre l'objectif", conseille Vincent Giraud. Dès maintenant, car "si le diagnostic relève une difficulté majeure, comme un changement d'ERP, l'ensemble de la procédure sera très chronophage ". Selon lui, le diagnostic seul peut se faire en trois semaines ou un mois dans une PME ou une ETI.
En se basant sur l'outil de diagnostic lancé par PKF Arsilon, Vincent Giraud conseille d'insister sur quatre piliers. D'abord, la typologie de flux entrants et sortants : BtoB, BtoC, avec des organisations non assujetties, cas de figure avec processus de facturation spécifique...
Deuxième pilier : la qualité des données, "s'assurer que le référentiel client est exploitable, vérifier les éventuels doublons de fiches clients". Cela concerne aussi les CRM et outils métiers, s'ils communiquent directement avec le logiciel de facturation. Car la non fiabilité des données peut avoir des conséquences financières immédiates, avertit le consultant : "si le numéro de TVA n'est pas renseigné, la PDP va rejeter la facture, vous ne serez donc pas payé."
Troisième pilier : les processus. "Quels sont les intervenants dans la vente et l'achat, le cycle de vie de la facture : identifier qui l'émet, qui la valide, qui déclenche le paiement... Si ce processus est complexe, il faudra le prendre en compte dans le timing". Et réinterroger sa pertinence. "Si aujourd'hui dix personnes peuvent valider un achat, demandez-vous si vous pouvez simplifier ce mode opératoire".
Enfin, dernier sujet : l'environnement informatique : réaliser une cartographie de tous les outils en lien avec la facturation, "se demander s'ils sont en ligne avec les attendus : format de facture, champs demandés…Si ce n'est pas le cas, regarder avec les éditeurs les moyens d'upgrader ". Une mise à niveau impossible ne nécessite pas forcément de changer son logiciel : des opérateurs de dématérialisation, solutions raccordées à une PDP (certaines en proposent d'ailleurs), peuvent faire le lien avec le logiciel de facturation.
Juin 2025 : premiers tests pour les plus avancés
En juin, l'annuaire regroupant l'ensemble des adresses électroniques d'échanges de factures électroniques via les PDP sera opérationnel. Les plateformes pourront commencer à l'alimenter avec les adresses de leurs clients, une obligation à terme. Si cela n'a rien d'obligatoire, le président de la FNFE-MPE (Forum national de la facturation électronique et des marchés publics électroniques), Cyrille Sautereau, indique que c'est une bonne occasion, pour les entreprises prêtes, de commencer à tester la facturation électronique, en envoyant les factures simples aux clients dont l'adresse de facturation électronique est déjà connue, et en incitant ses fournisseurs à faire de même.
De son côté, le président de l'ordre des experts-comptables, Damien Charrier, assure qu'il n'y a "pas d'urgence, mieux vaut attendre d'avoir une vue globale. Pour les entreprises qui savent où elles vont, c'est très bien de tester, mais cela ne concerne pas la masse des entreprises". L'ordre des experts-comptables conseille ainsi de se renseigner sur la facturation électronique durant le premier semestre 2025, et de se rapprocher de son expert-comptable avant la fin du semestre.
Eté 2025 : écrire et lancer le plan d'action
Une fois le diagnostic effectué, Vincent Giraud conseille de définir un comité de pilotage pour mener le chantier, avec le dirigeant de l'entreprise, le directeur administratif et financier, le directeur des systèmes informatiques, et idéalement le directeur commercial et le directeur achats, qui interviennent dans la chaîne de transaction.
Place alors à l'écriture du plan d'action. Selon les besoins de l'entreprise, cela peut se faire en interne, ou être partiellement ou entièrement délégué en externe. Pour le consultant, l'idéal est d'avoir un plan prêt en sortie d'été, –éventuellement le dernier trimestre 2025 pour les TPE ou les PME avec des systèmes très simples.
Lors du déroulement du plan d'action qui suivra, "il y a un vrai enjeu de conduite du changement, d'embarquer toutes les équipes concernées, c'est-à-dire la quasi-totalité du front office". Avec pédagogie, en "essayant d'avoir des remontées terrain pour que chacun donne son point de vue". Objectif : "les amener à prendre conscience des enjeux de la réforme, de leurs futures obligations, de la façon dont leur métier va évoluer".
Premier ou début du deuxième trimestre 2026 : choisir sa plateforme
L'ordre des experts-comptables conseille de choisir sa plateforme d'ici le premier trimestre 2026, pour la mettre en place au plus tard au deuxième trimestre. Selon Vincent Giraud, une fois la plateforme sélectionnée, son déploiement peut se faire en moins d'un mois.
Pour lui, c'est vraiment la dernière étape, et si les niveaux hiérarchiques supérieurs doivent être embarqués dès la mise en place du plan d'action, pour les équipes vraiment opérationnelles, cela peut attendre d'avoir choisi sa PDP. "Cela peut avoir un impact négatif de dire que la façon de travailler va changer sans avoir encore l'outil, sans pouvoir montrer".
Reste à tester et à s'approprier la PDP. Le consultant recommande au grand minimum trois mois pour ce faire.