Comment tirer parti de la mise en place du prélèvement à la source

Comment tirer parti de la mise en place du prélèvement à la source Les propriétaires de biens locatifs ont une opportunité de réduire la note fiscale s'ils concentrent leurs travaux en 2018.

Cette fois-ci, c'est la bonne. Au 1er janvier 2019, l'impôt sur le revenu ne sera plus recouvré sur avis d'imposition mais prélevé à la source. La réforme fiscale initiée par le gouvernement de Manuel Valls, dont l'entrée en vigueur a été différée d'un an par celui d'Edouard Philippe, a beau être bordée afin d'empêcher les contribuables d'optimiser leur situation et de payer moins d'impôts qu'avec l'ancien mode de collecte, les professionnels du conseil financier ont identifié un moyen de profiter de la mise en place du prélèvement à la source. Et, bonus, celui-ci n'est pas réservé aux patrimoines les plus élevés. Plus exactement, il concerne tous les propriétaires de biens locatifs non meublés imposés au régime réel. L'astuce ? Faire beaucoup de travaux en 2018.

Voilà l'explication : 2018 est une année blanche. Pas au sens où on ne paie pas d'impôt sur le revenu en 2018, mais au sens où les revenus non exceptionnels de 2018 (salaires, retraites, revenus de remplacement, revenus des indépendants et revenus fonciers récurrents) ne seront pas imposés. Sinon, on aurait assisté à une double imposition en 2019. Du fait que l'impôt sur les revenus courants de 2018 soit annulé, l'intérêt de recourir au déficit foncier, dispositif permettant de déduire ses charges de ses revenus fonciers, puis, si le montant des charges dépasse celui des revenus fonciers, de son revenu global (dans la limite de 10 700 euros par an), se trouve considérablement réduit. La tentation de reporter ses travaux à 2019 est donc grande, ce qui aurait des conséquences néfastes sur le secteur du bâtiment.

Pour éviter que les ménages reportent leurs dépenses de travaux en 2019, la prise en compte du montant moyen des travaux engagés en 2018 et en 2019 dans le calcul des charges déductibles en 2019 a été rendue possible

Afin d'éviter ce phénomène, le gouvernement a prévu deux choses. D'une part, une déduction intégrale des dépenses de travaux payées au cours de l'année 2018 pour la détermination du revenu net foncier de l'année 2018. De quoi inciter les contribuables percevant des revenus exceptionnels – et donc imposables – en 2018, à réaliser des dépenses de travaux en 2018, puisqu'elles auront un effet fiscal. D'autre part, la prise en compte du montant moyen des travaux engagés à la fois en 2018 et en 2019 dans le calcul des charges déductibles en 2019, au lieu de 100% du montant des travaux engagés en 2019. Attention, cette dernière mesure ne concernera que les dépenses de travaux non urgents et réalisées sur un bien locatif acquis avant le 1er janvier 2019. 

Trois cas sont alors possibles : s'il ne réalise pas de dépenses de travaux en 2019, le contribuable pourra tout de même déduire 50% des sommes payées en 2018. S'il en réalise pour un montant équivalent à celui de l'année 2018, le montant retenu correspondra à la moyenne des sommes payées lors de ces deux années. Enfin, s'il reporte ses dépenses de travaux en 2019, il ne pourra imputer que 50% des sommes payées en 2019.

Moralité, les contribuables qui, au titre de 2018, ont des charges importantes ou des revenus exceptionnels, ont tout intérêt à concentrer leurs dépenses de travaux sur 2018. En effet, dans ces conditions, les charges de l'année 2018 pourront produire un effet fiscal dès l'année 2018. Elles en produiront également un au titre de l'année 2019, avec la prise en compte de la moyenne des charges des années 2018 et 2019 et, le cas échéant, le report des déficits fonciers générés au titre de 2018.

Exemple

Prenons l'exemple d'un contribuable qui paie 50 000 euros de dépenses de travaux entre 2018 et 2019 :

  1. S'il paie 50 000 € en 2018 et 0 € en 2019, les charges prises en compte fiscalement seront de 50 000 € en 2018 et 25 000 € en 2019 (soit la moyenne des dépenses des années 2018 et 2019), soit 75 000 €
  2. S'il paie 25 000 € en 2018 et 25 000 € en 2019, elles seront de 25 000 € en 2018 et 25 000 € en 2019, soit 50 000 €
  3. S'il paie 0 € en 2018 et 50 000 € en 2019, elles seront de 0 € en 2018 et 25 000 € en 2019, soit 25 000 €.

Admettons que les revenus fonciers de ce contribuable se décomposent par ailleurs en :

  • 10 000 € (2018) et 60 000 € (2019) de recettes foncières annuelles
  • 10 000 € (2018 et 2019) d'autres charges.

Dans le premier cas, son déficit foncier constaté en 2018 atteindra 50 000 € (10 000 - 50 000 - 10 000) se décomposant en : 10 700 € imputables sur le revenu global de 2018 et 39 300 € reportables sur les revenus fonciers des dix années suivantes. En 2019, les dépenses de travaux, déductibles au titre de 2019, s'élèveront à 37 500 € [(50 000 + 25 000) / 2]. Le revenu net foncier du contribuable s'élèvera donc en 2019 à 12 500 € (60 000 - 37 500 - 10 000) sur lequel le déficit foncier en report au 31 décembre 2018, soit 19 300 €, sera imputé. Il lui restera donc 6 800 euros de surplus.

"Nous préconisons vraiment de payer le maximum de charges en 2018 dans le cas où elles représenteraient plus du double des revenus fonciers positifs ou, à défaut, d'attendre 2020"

Dans le deuxième cas, en 2018, le contribuable pourra opérer une déduction intégrale des dépenses de travaux de l'année 2018. Son déficit foncier constaté en 2018 s'élèvera donc à 25 000 € (10 000 - 25 000 - 10 000) se décomposant en : 10 700 € imputables sur le revenu global de 2018 et 14 300 € reportables sur les revenus fonciers des dix années suivantes. En 2019, les dépenses de travaux, déductibles au titre de 2019, seront plafonnées à la moyenne des dépenses de l'espèce payées en 2018 et 2019, soit à 25 000 € [(25 000 + 25 000) / 2]. Le revenu net foncier du contribuable s'élèvera donc en 2019 à 25 000 € (60 000 - 25 000 - 10 000) sur lequel le déficit foncier en report au 31 décembre 2018, soit 14 300 €, sera imputé. Son revenu foncier net imposable en 2019 s'élèvera donc à 10 700 € (30 000 - 14 300).

Dans le troisième cas, il n'y aura pas de déficit foncier constaté en 2018 (10 000 - 0 - 10 000 = 0). En 2019, les dépenses de travaux, déductibles au titre de 2019, s'élèveront à 25 000 € (50 000 / 2). Le revenu net foncier du contribuable s'élèvera donc en 2019 à 25 000 € (60 000 - 25 000 - 10 000).

"Nous préconisons vraiment à nos clients de payer le maximum de charges en 2018 dans le cas où elles représenteraient plus du double des revenus fonciers positifs ou, à défaut, d'attendre 2020", ponctue Marcelina Stark, directrice associée chez Angelys Group, spécialisé dans la restauration d'immeubles de caractère. Pour plus de détails sur les charges et travaux déductibles des revenus fonciers, consultez notre article dédié au déficit foncier.