David Gabai et Tom Hayat (Storelift) "Dès juillet, le premier magasin autonome Boxy sera accessible à tous"
Avec ses boutiques automatisées, la start-up Storelift entend s'imposer sur le marché de l'alimentaire de proximité en France. Ses fondateurs détaillent au JDN leur innovation technologique.

JDN. Vous venez de lever 5 millions d'euros auprès de Cap Horn et Local Globe avec l'ambition de devenir la première chaîne française de magasins de proximité, connectés et autonomes. Comment est née l'idée de ce projet ?
David Gabai. Notre ambition est de créer de la micro-proximité. Dans le retail, les paniers des magasins de proximité alimentaires baissent chaque année : le panier moyen est aujourd'hui d'une dizaine d'euros. Or, ce type de magasin reste plébiscité, sans qu'il n'ait jamais évolué. Nous voulons donc créer de nouveaux types de magasins, disponibles tout le temps, pratiques et près de chez soi. Storelift est née en avril 2018. Nous avons consacré la première année à étudier les prémisses de la technologie, à rencontrer les investisseurs et les retailers. Nous avons obtenu une première partie de la levée de fonds en mars 2019 qui nous a permis de recruter des ingénieurs pour développer la technologie.
Comment fonctionne votre technologie ?
Tom Hayat. Nous créons un magasin à partir d'un container de 15 m2 réhabilité et livré à l'aide d'une grue. On le branche sur une prise électrique, et c'est parti ! Le magasin fonctionne un peu sur le même principe qu'Amazon Go. Le consommateur télécharge notre application, Boxy, puis enregistre sa carte bancaire. Un QR code est alors généré sur l'application. A l'entrée du magasin, le consommateur scanne le QR code. Une fois à l'intérieur, notre technologie détecte automatiquement les articles sélectionnés en magasin par le consommateur grâce à une quinzaine de caméras et près de 600 capteurs installés au niveau des rayons. La solution peut ainsi gérer plusieurs clients en même temps au sein du magasin qui propose 400 produits essentiels à la vie de tous les jours. Le client est ensuite débité de ses courses quelques secondes après sa sortie de l'établissement sans être passé par une caisse automatique. Le ticket de caisse est directement envoyé sous format digital. Nos serveurs sont basés dans le local technique du magasin. Nous envoyons juste les informations du panier dans le cloud afin de débiter le client. Toutes les données restent dans le magasin.
"Nous sommes les seuls à avoir pris le pari de développer notre solution intégralement en interne"
Quel est l'avantage de votre solution par rapport à vos concurrents ?
D.G. Toutes les autres solutions comparables sont basées sur une répartition des tâches entre le retailer qui exerce son métier de distributeur, l'entreprise tech dont le métier est de concevoir les capteurs et les caméras, auxquels s'ajoute parfois un acteur pour la partie monétique et paiement. En Asie, quelques acteurs gèrent tout de A à Z, en plus d'Amazon, mais dans la zone occidentale/européenne, nous sommes les seuls à avoir pris le pari de développer notre solution intégralement en interne. Nous maîtrisons tout notre environnement et nous sommes capables de mettre en production des processus de support par exemple. En cas d'erreur sur un ticket de caisse, nous recevons la requête et nous sommes en mesure de la corriger. Notre solution intégrée permet de nous concentrer sur l'utilisateur. Nous pouvons changer rapidement une offre, adapter un magasin et mieux gérer sa croissance.
Comment gérez-vous la dimension logistique ?
D.G. En aval, nous mettons en place un magasin automatique mais en amont, notre solution implique de nombreux prérequis inexistants dans les magasins classiques en termes de qualité de la donnée, de processus de commandes, d'organisation des colis, etc. C'est pour cette raison que nous avons créé une enseigne. On considère que notre nouveau magasin nécessite de nouveaux métiers sur toute la chaîne, de A à Z.
T.H. Nous nous adossons à des grossistes et des centrales d'achat pour acheter nos produits et les stocker dans notre entrepôt à Ivry-sur-Seine. Notre magasin est intelligent car nous connaissons tout son stock en temps réel avec une précision supérieure à 99%. Nous savons exactement combien de produits seront nécessaires pour approvisionner l'espace commercial, à la référence près.
Comment voyez-vous Storelift évoluer ?
D.G. Depuis octobre, la bêta privée est réservée à un millier de salariés de Châtillon. Dès le mois de juillet, le premier magasin Boxy géré et exploité par Storelift sera accessible à tous. Notre vision à long terme est de devenir le leader de la proximité alimentaire en France en s'inscrivant dans les évolutions de consommation. Nous ciblons toutes les zones où la densité de population est importante mais où la concentration commerciale est largement en dessous de la moyenne nationale. Notre objectif est de combler ce maillage où les distributeurs traditionnels ne sont pas présents car ils n'y trouvent pas de rentabilité ou n'y voient pas d'intérêt. Aujourd'hui, la proximité alimentaire ne dépasse même pas les 10% de parts de marché. Notre objectif est de faire en sorte que celle-ci soit enfin accessible à tous avec des prix similaires à la grande distribution pour atteindre 30 à 40% de parts de marché.
Tom Hayat, sorti des Ponts et de l'ENS Cachan, et David Gabai de l'EDHEC Business School fondent Storelift en 2018. L'ambition du duo est de lancer la première chaîne de magasin de proximité autonome et connecté.