Elodie Perthuisot (Carrefour) "Le quick commerce fait partie du cœur de métier de Carrefour"

La directrice exécutive e-commerce, data et transformation digitale de Carrefour précise la stratégie du groupe sur le volet quick commerce, depuis sa prise de participation dans Cajoo au mois de juillet.

JDN. Dans quelle mesure la crise sanitaire a-t-elle fait basculer Carrefour vers la livraison rapide ?

Elodie Perthuisot, directrice exécutive e-commerce, data et transformation digitale de Carrefour. © Nicolas Gouhier

Elodie Perthuisot. Nous sommes très actifs sur le sujet de la livraison en général, qui a été express avant d'être quick. Au début de la crise sanitaire en avril 2020, nous avons signé un partenariat avec Uber afin d'être les premiers en France à proposer la livraison express. Tout au long de la crise sanitaire, nous avons livré les clients en 30, 40 minutes. Nous avons ensuite raccourci les délais car un certain nombre de nos magasins se sont mis à livrer en 20 minutes. Grâce au partenariat avec Uber, nous avons pris conscience de l'intérêt de ce mode de consommation pour nos clients car les commandes se sont accélérées pendant la crise et la tendance se poursuit depuis le début de l'année. D'après nos retours clients, ce mode de consommation et de livraison correspond à la version e-commerce de leurs magasins de proximité combiné à l'aspect pratique propre aux courses de dépannage. Au-delà de la crise sanitaire, nous avons donc compris que cela répondait à un besoin profond des consommateurs et de nos clients. La tendance du quick commerce fait partie de notre cœur de métier chez Carrefour, en tant que spécialiste des courses sur le digital. 

Carrefour a pris une participation minoritaire dans Cajoo cet été. Quelles sont les particularités du business model qui ont retenu votre attention chez cet acteur ?

Dès le printemps 2021, nous avons découvert les acteurs du marché, dont Cajoo, le premier à s'être implanté à Paris. Nous avons établi des contacts réguliers avec le fondateur. Pour renforcer notre présence sur nos territoires, la cohérence géographique avec un acteur français tel que Cajoo était parfaite. Cajoo est un acteur spécialiste du quick commerce qui a construit son business model autour de la livraison en 15 minutes. Il est né avec cet ADN et c'est ce qui nous a intéressé. Etant donné que le business model du quick commerce nécessite du financement, nous sommes entrés en discussion avec Cajoo dans le cadre de sa nouvelle levée de fonds, et ce dans le but de tisser une relation capitalistique et un partenariat industriel plus fort. 

"Nous sommes entrés en discussion avec Cajoo dans le cadre de sa nouvelle levée de fonds"

Justement, quels sont les apports mutuels de ce partenariat industriel ?

Du côté de Carrefour, nous apportons à Cajoo notre connaissance du retail à commencer par la constitution des assortiments et les conditions d'achat qui y sont associées mais aussi notre expérience sur la gestion des entrepôts e-commerce. Nous avons un apport d'expertise pour Cajoo sur les différents volets retail et e-commerce. Sur le volet digital et IT, Cajoo est très fort puisque la start-up a développé son application mobile en interne et un warehouse management system (WMS) pour gérer ses dark stores, sans oublier l'application de gestion des bikers. Ce qui est important pour nous, c'est d'être là pour conseiller les équipes lorsqu'elles en ont besoin sans les perturber dans leurs méthodes de travail. Nous connaissons très bien le fonctionnement des applications et les échanges d'expertises sont riches, mais Cajoo reste maître de son application et de son système car c'est justement la puissance d'une start-up d'aller vite sur un sujet précis.

Quels sont les objectifs à moyen et long terme de Carrefour dans le quick commerce ?

Le quick commerce est en construction et il n'en est qu'à ses débuts. C'est essentiel d'être présent au démarrage du marché pour saisir toutes les conditions de réussite. Cajoo nous apporte justement la possibilité d'explorer ce marché. Nous ne connaissons pas la taille qu'aura le marché dans un an ou deux, ni l'équation économique, mais nous sommes convaincus de l'intérêt d'y aller. Nous devons gérer les objectifs de court terme tels que l'acquisition client ou encore le taux de repeat. Nous devons comprendre les KPI du business model tout en acceptant de ne pas être capable de le projeter à trois ans.