Objectifs, résultats, budgets : tout savoir du marketing d'influence

Objectifs, résultats, budgets : tout savoir du marketing d'influence Ce marché désormais bien structuré offre aux annonceurs des audiences qualifiées à des budgets moindres que ceux de la télévision ou de la radio, avec des résultats facilement exploitables.

En version assommante, le marketing d'influence se définit comme l'utilisation du potentiel de recommandation d'un influenceur par un annonceur. Résumé par Fanny Bonodot, influencer manager senior chez l'agence créative We are social, "il est avant tout un moyen de remplacer ou d'amplifier la prise de parole média". Quelle que soit sa définition, le marketing d'influence fait encore peur à certaines marques, qui n'ont pas forcément les compétences nécessaires en interne.

Quechua, marque du distributeur d'équipements sportifs Decathlon, a choisi de se faire accompagner par Reech, une agence spécialisée en influence marketing, sur sa campagne d'influence sortie à l'été 2022 qui vante les mérites de sa tente 2 seconds easy sur les réseaux sociaux. "Nous avons commercialisé ce produit pendant la pandémie en 2020 et nous avions prévu une campagne en 2022 pour présenter la nouvelle version trois personnes. L'objectif était double : d'un côté mettre en avant la qualité du produit, de l'autre en accroître la visibilité auprès d'une audience large et outdoor sur les marchés français, allemands et américains", explique Pénélope Sentier, responsable communication chez Quechua. La marque de Decathlon a fait appel à Reech, afin "d'être accompagnée dans le choix de l'identification des influenceurs et pouvoir s'appuyer sur l'expertise en influence de l'agence", ajoute Pénélope Sentier.

Un marché structuré et pour tous

Chance pour les marques, le marché s'est rapidement professionnalisé à partir de 2015-2016, quand les blogueurs sont devenus des influenceurs, analyse Guillaume Doki-Thonon, le CEO et fondateur de Reech. D'un côté les agences d'influence accompagnent les annonceurs et les marques dans leurs campagnes, de l'autre les agences d'influenceurs gèrent la carrière de ces personnages publics. "Les plus gros influenceurs et de plus en plus de petits sont représentés. Certains influenceurs sont représentés par des proches, c'est encore parfois artisanal", note Guillaume Doki-Thonon.

Les campagnes d'influence partent toujours des objectifs fixés par les annonceurs. "Le tunnel est classique, nous allons chercher soit de la notoriété, de la considération et de l'engagement et donc fédérer autour d'une marque soit à convertir, c'est-à-dire faire en sorte que les gens achètent", explique Annaelle Assaraf, COO et cofondatrice de Sparkle, une agence créative qui déploie des campagnes sur TikTok. "Tous les objectifs publicitaires peuvent être travaillés mais faire du multi objectifs n'est pas conseillé. Par exemple, il ne faut pas faire de la vente par code promo si vous n'êtes pas encore connu, vous ne devez pas sauter des étapes", ajoute Guillaume Doki-Thonon.

Pour Fanny Bonodot de We are social, ces objectifs vont conduire à choisir entre quatre grands types d'activation :

  1. "Le ponctuel, ou seeding, qui va se traduire par l'envoi de produits aux influenceurs qui vont les tester derrière."
  2. "La co-création de contenu avec un influenceur lors d'une sortie d'un produit, d'un film ou d'une série. Cela peut se traduire aussi par une invitation à un événement."
  3. "L'expérience, avec un produit spécifique qui s'utilise dans des conditions particulières. Il peut s'agir d'essayer une nouvelle paire de basket de running ou pratiquer une activité dédiée au produit."
  4. "Avec un contrat à long terme, l'influenceur peut devenir ambassadeur et représenter l'image de la marque pendant un an par exemple. Il va être invité aux événements et parler de ses produits".

L'influence se passe principalement sur Instagram. "Ce réseau est le leader incontesté, privilégié par 96% des annonceurs, devant le challenger TikTok, qui enregistre une énorme croissance", détaille Guillaume Doki-Thonon. Certains influenceurs hésitent encore à passer le pas d'Instagram à Tiktok, car "ce réseau nécessite de l'expertise et de la compréhension, il faut en adopter les codes avec un montage dynamique. Pour certains influenceurs, la question se pose encore. Des têtes d'affiche d'Instagram tâtonnent sur TikTok quand d'autres, comme Carla Ginola, qui était déjà présente sur Instagram, performent", continue Annaelle Assaraf. Il y a aussi Youtube, Twitch ou même Pinterest. "Ce dernier est un super réseau sur l'intention d'achat, les boards sont presque des to do listes pour les utilisateurs. Il ne faut pas aller chercher des gros influenceurs, mais des influenceurs légitimes", conseille Guillaume Doki-Thonon.

Avantage de la multiplicité des réseaux, activations et influenceurs, toutes les marques et tous les annonceurs peuvent s'essayer à l'influence. "Nous avons par exemple monté une campagne de promotions immobilières qui nous a permis de vendre deux appartements. Avec Schneider Electric, nous avons travaillé avec un influenceur qui fait des tutoriels d'installation de compteurs électriques et avec Michelin pour des pneus de camion avec un influenceur néerlandais spécialiste du sujet", raconte Guillaume Doki-Thonon. L'objectif va être de choisir des influenceurs qui vont coller au discours de la marque. "Pour choisir un influenceur, nous regardons son ton, sa ligne éditoriale, ses taux d'engagements, en parallèle des objectifs de la marque. Le tout forme un ensemble qui permet de trouver le bon influenceur dans le but de co-créer avec lui", résume Fanny Bonodot.

Un seul KPI, plusieurs budgets

Pour évaluer une campagne d'influence, le KPI le plus regardé est le taux d'engagement. "La taille des communautés ne sert pas, car il faut estimer les vrais followers et ceux qui sont engagés. L'engagement va se calculer à partir des like, des partages et des commentaires rapporté à la taille de la communauté. On regarde aussi les impressions, la portée et les ventes en trackant des liens ou des codes promo pour voir le trafic généré", explique Guillaume Doki-Thonon. Précision par Annaelle Assaraf : "Sur Tiktok nous regardons les vues de la vidéo. Alors que sur Instagram, nous comptons sur la communauté de l'influenceur, sur Tiktok la vidéo doit plaire à tout le monde". La qualité des commentaires est aussi à prendre en compte : "Si une vidéo a 20 000 vues mais que seuls 150 commentaires font référence à la marque, ce n'est pas bon. Il va falloir analyser la qualité des commentaires", ajoute Fanny Bonodot. La campagne menée par Quechua et Reech sur Instagram pour la tente 2 secondes easy a généré 3,5 millions d'impressions, 1,2 million de vues uniques ("portées", dans le jargon) et 43 000 engagements.

Attention toutefois, Guillaume Doki-Thonon alerte sur "les KPI hallucinants de TikTok qui représentent parfois deux fois la France. Le réseau social ne respecte pas les normes IAB (Interactive Advertising Bureau, ndlr) qui harmonisent le décompte des vues par exemple et peut donc décompter des vues à partir de 0 seconde".

"Si on veut que la marque soit numéro 1 et qu'on a un petit budget, ce n'est pas cohérent. Le coût dépend de la taille de la communauté, de la plateforme, de la complexité, des déplacements à inclure ou pas. Tout budget est possible", juge Fanny Bonodot. Pour Guillaume Doki-Thonon, "il vaut mieux tester tous les réseaux au début pour voir comment les cibles répondent et investir ensuite. Nous pouvons faire un test pour 50 000 euros ce qui équivaudrait à 1 million d'euros dépensés en télévision. C'est déjà un bon budget moyen pour faire de belle campagne et tester les leviers". Il n'y a donc pas de barrière à l'entrée, "un petit budget sur du seeding avec une bonne stratégie peut fonctionner, il ne faut pas 1 million d'euros pour faire une bonne campagne", conclut Fanny Bonodot. A vous de jouer.