Casque de réalité virtuelle, au-delà des usages grand public

Passé l'effervescence du lancement du Vision Pro aux États-Unis, le casque va aussi rendre les usages professionnels existants – réalité virtuelle et augmentée – encore plus performants.

À peine sorti que les technophiles se projettent déjà dans sa seconde version en imaginant l’appareil plus léger, avec une autonomie de batterie plus longue, ou encore plus accessible. Cette première version arrive pourtant avec d’autres atouts au-delà des prouesses technologiques et techniques : elle embarque, côté software, tout l’héritage innovant du géant à la pomme, notamment sa place de marché d’applications tiers, qui n’a été inventée qu’à la troisième génération de l’iPhone en 2009. C’est dire le potentiel de cette première version d’un produit qui se veut le précurseur du space computing ou dans la langue de Molière, l’informatique spatiale. Oui pour l’occasion, l’entreprise a voulu faire évoluer les terminologies comme la réalité virtuelle, augmentée ou mixte que nous utilisions afin d’insister sur le nouveau cap technologique franchi dans le domaine. 

En quoi cette innovation peut-elle être bénéfique dans le cadre de l’entreprise ? 

Si nous sommes encore loin du télétravailleur augmenté pour des raisons à la fois d’accessibilité (la facture peut vite grimper), de praticité (travailler plusieurs heures dans la journée casque sur le visage paraît excessif) et de rapport au réel, le casque relance d’autres usages business. Il relance toutes les expériences de réalité augmentée et virtuelle qui ont commencé à se démocratiser avec le téléphone. Des usages qui s’expriment bien souvent par des expériences ponctuelles car comme le rappelle la dernière étude faite par Stanford University et le professeur Joy Leighton début février sur le Quest 3, ces appareils peuvent provoquer les distorsions visuelles, les sentiments d'absence sociale et le mal des transports dans des utilisations prolongées.

Pour avoir pu travailler au développement d’une application (tiers) de design d’intérieur faite pour la Vision Pro quelques mois avant sa sortie en faisant partie du programme développeurs de la marque, l’effet attendu est beaucoup plus convaincant et impactant avec cette immersion complète qu’à travers un écran de téléphone. Là où il fallait déplacer son téléphone ou sa tablette pour voir des objets en 3D dans une pièce, par écran interposé donc, les voir “directement” avec ses nouveaux yeux augmentés, nous propulse dans une expérience à s’y méprendre, à la limite du réel, pour ne pas dire réelle.

Les interactions sont tellement nouvelles qu’il faut du temps pour imaginer et tester les solutions de demain. Maintenant que la hype de la sortie est passée, il va falloir voir si la mayonnaise prend avec les développeurs, qui sont les plus à même de venir enrichir le catalogue d’applications et nouveaux usages : si le code ne change pas énormément et poursuit une évolution assez prévisible de Swift, la 3D est un aspect complètement inédit dans l’expérience utilisateur.

Développement des hard et soft skills

Bons nombres d’usages peuvent se démocratiser au sein des organisations. C’est un outil vraiment pertinent pour développer ce qu’on appelle en science sociale, les soft skills. S’entraîner et se préparer à des prises de parole en public dans des conditions du réel avec son audience, qui plus est, avec des personnes qui vous regardent tout en s’entraînant à s’approprier l’espace de la scène à disposition est un très bon moyen de travailler son appréhension, son éloquence et sa gestion du stress. Cela peut être également, dans la même lignée, réaliser des exercices de relaxation pour favoriser bien-être et concentration à l’image des applications comme Flowborne ou Mindfullness qui nous plongent dans un environnement virtuel calme et apaisant, où le virtuel est une invitation à la déconnexion, les animations rythment la respiration.
Les entreprises tout comme le milieu éducatif vont pouvoir faire évoluer certains de leurs programmes de formation et dépasser la théorie. Apprendre le fonctionnement d’une machine complexe et s’entraîner à la réparer pour les techniciens sans mobiliser des ressources réelles qui peuvent vite rencontrer des problématiques de coût, de disponibilité, d’espace et d’impact environnemental. Des formations liées aux opérations de maintenance également ou encore en médecine pour pratiquer des actes chirurgicaux. 

Pour les entreprises qui lancent de nouveaux produits sur le marché, cela peut être l’opportunité de tester leur accessibilité en se mettant à la place de personnes en situation de handicap grâce à l’immersion. De la même façon, les ressources humaines peuvent s’en emparer en imaginant des programmes de sensibilisation aux handicaps et mettre en situation des collaborateurs pour qu’ils réalisent les différentes situations et qu’ils puissent adapter aux mieux leur intégration au sein de l’entreprise. 

Le casque est par ailleurs un outil avec des fonctionnalités d’accessibilité prévues dès le départ. Il est possible de remplacer les interactions nécessitant les mains avec la dictée vocale, d’activer des options pour les personnes atteintes de déficiences visuelles. Une façon de redonner des opportunités innovantes  aux personnes en situation de handicap pour faciliter leur quotidien en entreprise.

Des usages pour augmenter l’expérience client

Si Ikea a joué un rôle dans la démocratisation du meuble à assembler soi-même, l’exercice est toujours vécu avec une certaine appréhension pour bon nombre d’entre nous. L’entreprise avait en 2018 conçu une application de réalité augmentée via téléphone qui facilitait la compréhension des dimensions des produits. Avec le casque, on peut vite imaginer libérer ses mains du téléphone et mesurer en direct la place que prend un meuble, voire afficher une aide personnalisée pour le montage des pièces à assembler comme le propose en démo l’application JigSpace, un bureau à assembler en quelques étapes. 

Plusieurs expériences d’achats retail prennent aussi forme, comme Décathlon qui permet de voir les produits sous tous les angles avant de les acheter, ou d’autres apps pour le prêt-à-porter où l’on peut faire son shopping dans un environnement en bord de mer avec le son des vagues pour se mettre dans l’ambiance. 

Lego innove aussi avec le développement d’un jeu où l’on peut laisser libre court à sa créativité en construisant, avec des briques virtuelles, ce que l’on souhaite dans son environnement “réel”, et animer devant son casque les constructions et personnages de ses créations. Dans le retail, qui est un secteur qui utilise largement les technologies de réalité virtuelle et augmentée, le casque pourra faciliter les différents cas d’usages et notamment les expériences pré et post achat pour le branding et l’inspiration. 

Bien loin d’un monde du métavers, ce type de casque semble s'ancrer davantage dans des usages ponctuels du quotidien et répondre à des problématiques précises en entreprise comme le développement des soft skills et des compétences métiers de ses collaborateurs ou encore imaginer de nouveaux services pour renforcer la valeur offerte à ses clients. Et tout ça, au présent : le hardware de cette première génération est plus que convaincant et les premières applications existent déjà.