Arnaud Le Roux (Showroomprivé) "En six mois, Showroomprivé a lancé 43 innovations et 65% sont liées à l'IA générative"

Arrivé en mai 2024, le chief innovation officer de Showroomprivé, Arnaud Le Roux, partage la nature de ce nouveau poste et les initiatives du groupe sur l'IA et la blockchain.

JDN. Showroomprivé n'a pas attendu la création de votre poste de CIO, il y a 6 mois, pour innover. Peut-on dire que votre rôle s'apparente à celui d'un monsieur IA ?

Arnaud Le Roux, chief innovation officer de Showroomprivé. © Showroomprive

Arnaud Le Roux. La création de mon poste vient d'une rencontre avec David Dayan, le PDG de Showroomprivé, fin 2023 avec la certitude qu'il faut incarner l'innovation. Et même si personne n'a attendu pour innover, il fallait accélérer cette innovation et l'horizontaliser dans l'ensemble des strates de l'entreprise.

La discussion est venue de l'IA en effet, mais pas seulement. Showroomprivé est un acteur reconnu du Web 2.0, mais comme beaucoup d'autres e-commerçants, il doit basculer vers le Web 3.0. Et ce Web 3.0 est un triptyque technologique autour de l'IA générative, de la blockchain, qui n'est pas morte, et des réalités mixtes. La blockchain va devenir essentielle avec des lois comme le digital product passeport (DPP).

Vous dites travailler à toutes les strates et avec toutes les entités du groupe. Comment s'organisent vos missions avec les équipes ?

Nous ne voulions surtout pas créer une tour d'ivoire de l'innovation, ça ne doit pas être la chasse gardée d'une équipe. A mon arrivée, je suis allé chercher les champions de l'innovation qui étaient déjà dans nos murs, ou bien les désigner dans les équipes qui avaient moins abordé ces sujets, pour en faire des ambassadeurs de l'innovation. J'ai créé un comité dans lequel chaque ambassadeur vient une fois par mois pour entendre ce que les autres équipes font, pour mettre en commun les sujets et voir où sont les croisements. Nous avons lancé 43 initiatives depuis 6 mois et 65% de ces initiatives sont liées à l'IA générative.

Pouvez-vous citer certaines de ces initiatives, peut-être les plus structurantes ?

On peut commencer par une jolie histoire : un ancien retoucheur dans l'équipe contenu s'est mis par plaisir à développer une IA qui permet de retoucher des contenus visuels, de les détourer, puis de les améliorer et de les recontextualiser. Et nous lui avons proposé de mettre en œuvre un projet pour créer une IA by Showroomprivé. C'est une forme d'entrepreneuriat, il gère son propre projet chez nous et nous l'accompagnons pour l'amener à maturation.

Autre exemple : avec le temps, le nombre de fiches produit grandissait et le temps dédié à la création de chaque fiche s'est trouvé mécaniquement réduit, elles contenaient donc de moins en moins de mots. Pour les compléter, nous avons développé une IA qui reprend tout le champ sémantique d'une fiche produit et ajoute des descriptions. Nous travaillons aussi pour accompagner nos commerciaux, avec l'automatisation d'un certain nombre de tâches récurrentes à faible valeur ajoutée. Il y a également notre chatbot interne qui a pour but d'aider les collaborateurs sur des questions RH redondantes. En résumé, nous sommes sur des natures de projets très différentes, du contenu visuel, du verbatim propre au LLM, du chatbot avec toute la partie RAG et de l'automatisation de tâches sur des Excel ou Salesforce, par exemple.

Showroomprivé est aussi agnostique en termes de technologie utilisée ?

Chez Showroomprivé nous n'utilisons pas un LLM, une technologie ou un GAFAM. Nous mettons systématiquement en concurrence tous les modèles. Et on réitère constamment tous les 2-3 mois pour passer en revue les nouvelles versions. Avec l'IA, il y a un véritable pivot, et cela nécessite de nouvelles compétences. Nous avons déjà et continuons de recruter des prompts designers dans les équipes.

Si 65% des initiatives sont dans l'IA générative, sur quoi portent les 35% restant ?

Lors de la neuvième édition du notre incubateur startups, deux des six jeunes pousses qui nous ont rejoints sont spécialisées sur la blockchain. Et en effet, ces sujets nous intéressent et nous pensons qu'il y a une intrication très forte entre IA et blockchain. Cette dernière sécurise, rassure, trace, et historise, là où l'IA est génératrice. Nous souhaitons maitriser cette intrication naturelle dans les années à venir, pour nous, pour nos clients, et pour nos partenaires, qui vont être soumis à des lois comme le DPP.

"Nous avons quelques projets de blockchain pour que les équipes métiers imaginent les usages appliqués à leur domaine."

Depuis le 3 juillet 2024, lors des événements internes, nous proposons à nos collaborateurs d'avoir un NFT correspondant pour les collectionner. C'est une façon d'acculturer l'entreprise à ces nouvelles technologies qui vont prendre en valeur. Nous avons quelques projets de blockchain qui se mettent en œuvre pour que les équipes métiers puissent imaginer les usages appliqués à leur domaine. La blockchain est dans une phase de désillusion sur la courbe de Gartner, mais elle va revenir et se répandre un peu partout autour de nous.

Et enfin, nous explorons des initiatives de réalité mixte. Mais nous n'en sommes qu'au début, donc je ne peux pas trop m'avancer. Nous nous intéressons à la vie d'un produit en 3D et comment l'utiliser tout au long du parcours de recherche. Nous avons bien vu que le buzz du métaverse n'a pas pris, mais il est le début d'un mouvement qui s'inscrit dans la durée. Dans les années à venir, la nature des écrans et le Web.30 va clairement aller vers du mixte type Apple Vision.