Avec son nouvel indice, Bordeaux Métropole lutte contre les îlots de chaleur

Avec son nouvel indice, Bordeaux Métropole lutte contre les îlots de chaleur L'indice de confort thermique urbain a été conçu pour mieux comprendre le territoire et adapter les politiques publiques d'implantation d'îlots de fraîcheur.

C'est en remportant un prix que les équipes de la métropole de Bordeaux sont rentrées du salon Smart City World Expo de Barcelone. Elles ont reçu un award dans la catégorie "Energie & Environment" pour le projet ICTU, l'indice de confort thermique urbain. Dernier né des projets IoT de la métropole, cet indice consiste à faire le diagnostic du territoire et sert d'outil d'aide à la décision grâce à des données transverses sur le confort thermique. Les îlots de chaleur sont cartographiés en 2D, non pas en se limitant aux températures de surface mais en prenant en compte différents paramètres, dont le ressenti des individus. L'objectif de l'indice est de permettre aux élus de mieux comprendre le territoire.

Concrètement, des capteurs de température et d'humidité connectés ont été déployés sur onze sites différents pour mener des campagnes de mesure. Les données issues de 80 points de mesure ont été couplées à des informations satellites et à des bases de données morphologiques, ce qui permet d'obtenir la température d'un site en tenant compte de la densité du bâti, du revêtement du sol ou encore du stress hydrique. En parallèle, des enquêtes ont été menées auprès des habitants pour connaître leur ressenti sur place afin de corréler les données scientifiques à leur bien-être. "Pour être sûr que la réponse corresponde à un ressenti réel sur place, nous avions disposé des QR code dans les rues. Nous avons enregistré plus de 500 réponses", détaille Yann Mareschal, chargée de mission usages émergents et durables au sein de la direction générale du numérique et des systèmes d'informations de Bordeau Métropole.

La conception de cet indice de confort thermique urbain a demandé deux ans de travaux, des premiers échanges à sa mise à disposition. "L'origine du projet est le besoin d'identifier quelles sont les meilleures stratégies de rafraîchissement par les végétaux en fonction de la morphologie urbaine", explique Yann Mareschal. Un marché public d'innovation a été lancé et a été remporté par le cabinet d'études Verdi ingénierie qui a mené le projet avec le soutien d'une équipe transverse composée d'agents de la métropole. "La difficulté majeure a été que les acteurs autour de la table avaient des problématiques différentes. Il nous a fallu définir quelles variables garder et celles à exclure", raconte Yann Mareschal. Le projet a représenté un coût de 80 000 euros, dont 75% ont été financés par l'Etat via le plan France Relance.

Prioriser les zones où agir

L'indice a permis de montrer les zones où les arbres n'assurent plus de rafraîchissement. © Bordeaux Métropole

L'un des premiers résultats est de pouvoir orienter la politique de plantation d'arbres. La métropole de Bordeaux a planté plus de 350 000 arbres et arbustes en trois saisons et s'est fixée pour objectif de poursuivre jusqu'à atteindre un total d'un million de végétaux. "Il nous faut prouver que les arbres sont bel et bien des bioclimatiseurs. L'indice nous a permis de réaliser un test sur une vingtaine d'espèces d'arbre : certaines aident à rafraîchir mais cet effet n'agit plus au-delà de 30°C", souligne Yann Mareschal. L'ICTU est également un outil pour prioriser les zones où agir. Un exemple : il a permis à Yann Mareschal de s'apercevoir que les arbres situés dans les allées de Tourny n'assurent plus leur rôle de rafraîchissement.

L'intérêt pour le confort thermique urbain n'est pas nouveau, Bordeaux avait mené en 2014 des prises de vue thermique par satellite pour détecter les îlots de chaleur. "Le sujet devient de plus en plus prégnant et touche un grand nombre de collectivités", confie Jean-Noël Olivier, directeur général du numérique et des systèmes d'information de Bordeau Métropole. Au salon Smart City World Expo, les demandes de représentants de collectivités pour connaître la méthodologie d'élaboration de l'indice ou les variables sélectionnées ont été légion. Le prix représente un accélérateur pour associer les services métiers de la métropole à l'initiative. "Il faut que tous s'en emparent pour en tirer de la valeur et ce prix récompense justement notre manière de faire", se félicite Jean-Noël Olivier, qui milite pour une fin de "la smart city consistant à déployer de la technologie pour la technologie, au profit d'une ville astucieuse qui veille à l'écoconception des solutions. La prochaine étape de développement de l'ICTU est d'intégrer la simulation à l'outil pour visualiser l'impact d'un aménagement végétalisé sur le confort thermique des lieux, et d'industrialiser l'indice à l'ensemble de la métropole.

La donnée est au cœur de ce projet, mais aussi de la stratégie de la métropole. "Le numérique et la data sont au cœur de notre plan stratégique, il y a de nombreux chantiers sur ce sujet", rappelle Jean-Noël Olivier. En parallèle à l'ICTU, Bordeaux Métropole mène par exemple en partenariat avec le bailleur social régional Domofrance le projet Stacoptim, qui permet par de l'IA et un jumeau numérique d'optimiser la consommation énergétique des bâtiments. L'objectif est de réaliser 30% d'économie d'énergie sur les bâtiments ciblés. Un projet lui-aussi lauréat de l'appel à projets "Démonstrateurs d'IA frugale au service de la transition écologique dans les territoires " du plan France 2030.