Alain Normand (DSI, Groupe Lemoine) "Beaucoup de développements spécifiques ont été réalisés pour pallier les manques de notre ERP"

Avec un parc d'ERP hétérogène et des contraintes fortes de ROI, le DSI du Groupe Lemoine a décidé de mettre en place un APS. Il revient également sur l'ensemble du périmètre géré par sa structure.

Quel est le périmètre de votre DSI ?

Le Groupe Lemoine est un groupe familial, qui emploie aujourd'hui 400 personnes et génère 70 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel. L'entreprise fabrique des produits d'hygiène utilisant du coton. Cela va des bâtonnets ouatés, les cotons tiges, au coton à démaquiller, en passant par le coton hydrophile. Nous distribuons nos produits à travers les marques distributeurs des enseignes de grande distribution.

Historiquement, le Groupe Lemoine s'est diversifié par des opérations de croissance externes réalisées en Hollande et en Belgique. De ce fait, notre système d'information couvre différents sites, avec en plus des deux sites belges et néerlandais quatre sites situés en Normandie.

Quels sont les applicatifs informatiques qui sont sous votre responsabilité ?

En 1999, l'entreprise a choisi de mettre en place un ERP au niveau des sites français. Beaucoup de développements spécifiques ont été réalisés depuis, pour pallier les manques de l'ERP qui était en fait beaucoup trop généraliste.

Nous avons également une application de MES, c'est-à-dire de Management Execution System, qui est en quelque sorte la couche basse de l'ERP. C'est à ce niveau que nous mesurons le TRS (ndrl. Taux de Rendement Synthétique), pour connaître la performance de la ligne de production.

Nous interfaçons également une partie de notre système d'information avec celui de nos clients grâce à un EDI (ndrl. Environnement de Développement Intégré) de Generix, ce qui nous demande également beaucoup de développement.

Et pour la partie bureautique ?

Nous utilisons la suite Microsoft Office. Notre messagerie est externalisée chez Orange.

Donc, vous n'avez pas de serveur de messagerie ?

Non, je suis ici depuis 4 ans, et j'étais précédemment habitué à du Lotus avec des options de groupware. Une fois chez Lemoine, j'ai voulu développer notre messagerie avec ce type de fonctionnalité, et comme tout le monde est en Outlook, je me suis tourné vers Exchange. Mais au final il n'y a pas eu de demande véritable, et nous sommes restés avec un simple système de messagerie POP.

"Nous sommes restés avec un simple système de messagerie POP"

Enfin, au niveau serveur, quel est votre plate-forme technique ?

Nous sommes dans un environnement Windows que nous hébergeons nous mêmes, et pour nos bases de données de production nous utilisons de l'Oracle.

Vous êtes en train de mettre en place un Advance Planning System qui va lier vos différents sites de production. Quel est le projet d'origine ?

Suite à une étude que nous avons réalisée, nous avons conclu qu'une organisation de la supply chain au niveau du groupe devenait nécessaire.

De là, plusieurs solutions techniques étaient envisageables. Nous avions la possibilité de passer par un ERP groupe, ou bien de passer par un APS (ndlr. Advance Planning System).

Pourquoi un APS plus qu'un ERP ?

Mettre en place un APS est plus rapide que de mettre en place un ERP. Par ailleurs, la mise en place d'un ERP groupe laissait espérer un ROI au minimum sur deux ans. Avec l'APS, nous pensons obtenir un ROI sur un an, voire peut-être même sur 6 mois.

Enfin, nous voulions absolument pouvoir travailler avec des fonctions de planification. Jusqu'alors, nous utilisions des tableaux Excel pour faire cela, et ce n'était plus possible.

Que contient l'APS et quel est le coût global de ce type de projet ?

Il comporte deux parties. D'un côté, nous avons un module de gestion de la demande, c'est-à-dire tout ce qui concerne la prévision des ventes. La seconde partie concerne la planification de la production. Au niveau des finances, nous sommes sous les 250 000 euros pour la partie APS

"Il s'agit de s'interfacer avec trois ERP assez obsolètes, et cela demande un travail très important"

Quelles ont été vos contraintes ?

Il s'agit de s'interfacer avec trois ERP assez obsolètes, et cela demande un travail très important. Si nous avions choisi de mettre en place un ERP groupe, nous n'aurions pas eu ce souci. Et puis la mis en place d'un APS est le premier projet groupe que nous lançons.

Ou en êtes-vous dans ce projet ?

Le projet a démarré il y a un an. Le choix de la solution APS a été effectué fin 2008 et nous devions démarrer la production en septembre prochain. Mais nous avons pris du retard. Nous partons de trois systèmes d'information hétérogènes, la France, la Belgique et la Hollande, et nous avons dû faire face à des difficultés pour passer à un référentiel de groupe. Cela c'est avéré plus compliqué que prévu.

L'intégration de la partie planification de la production a été effectuée par TXT, qui fournissait également la solution. La partie intégration de la prévision des ventes a quant à elle été menée par Sopra Group.

Et puis comme dans beaucoup de PME, nous manquons de disponibilité. Au final, nous avons deux mois de retard sur le calendrier prévu, et nous arrivons dans la période délicate des congés. Je pense que nous allons en définitive démarrer les tests en juillet-août.

"Je suis à la fois sur ce projet DSI et chef de projet supply chain"

Dernier point, je me retrouve avec une double casquette. Je suis à la fois sur ce projet DSI et chef de projet supply chain.

Justement, comment gérer cette situation ?

Par le passé, j'ai été consultant sur des ERP très présents dans l'industrie, ce qui fait que je connais bien la partie métier de ce type de projet. Et puis j'avais travaillé dans la planification, et j'ai poussé pour que l'on développe des outils de ce type là dans le groupe Lemoine,

La mise en place de ce type de projet demande une adhésion forte de la part des personnes dont les habitudes de travail sont impactées par le changement. Comment gérez-vous cela ?

Il est vrai que faire adhérer les gens est un processus assez long. C'est d'autant plus vrai que ce type de nouveau projet amène avec lui de nouvelles notions, comme l'ordonnancement. Les personnes concernées ne voient souvent pas de quoi il s'agit. Mais il faut voir aussi que ces changements touchent peu de personnes. Sur la partie APS, trois personnes sont concernées, et sur la partie planification cela touche en tout et pour tout 15 personnes.

Quels sont les indicateurs que vous avez mis en place pour vous assurer que la mise en place de ce projet permettra d'améliorer la production ?

Sur la question de la prévision de vente, nous avons aujourd'hui entre 25 et 50% d'erreurs par mois. Notre objectif avec ce nouveau système est de tomber à 15%. C'est un objectif que nous avons travaillé avec Sopra Group, et qui est tout à fait concevable pour une activité telle que la nôtre.

Ensuite, l'APS doit aussi nous permettre d'éviter de générer du stock. L'idée est de réduire nos stocks de 30% tout en maintenant un bon taux de service (ndrl : pourcentage de produits livrés à temps dans les références et les quantités requises au client). C'est un défi intéressant, puisque par le passé, nous avions réussi à diminuer nos stocks, mais au prix d'une diminution également du taux de service.

Enfin, ce nouveau système va permettre plus de réactivité pour nos commerciaux, pour qu'ils puissent aller chercher de nouveaux marchés. C'est un objectif certes moins quantifiable, mais que nous avons également.